Sanctions US : pour suivre le grand jeu

Daniel Schneidermann - - Le matinaute - 28 commentaires

Si l'on veut avoir une petite chance d'arriver à suivre le grand jeu qui commence à propos de la sortie des Etats-Unis de l'accord nucléaire avec l'Iran, et des sanctions américaines consécutives contre les entreprises notamment européennes, au-delà des mouvements de menton et des rideaux de fumée habituels, il va falloir se mettre à jour. Et vite. Par exemple sur une question : pourquoi les entreprises européennes qui commercent avec l'Iran tremblent-elles d'encourir les sanctions américaines ? Que craignent-elles exactement ? Et lesquelles exactement doivent trembler ?

Pour comprendre comment les Etats-Unis imposent leur droit au reste du monde, il existe un outil apparemment excellent (et en français, de surcroît) : c'est un rapport parlementaire, le rapport Berger-Lellouche, du nom de ses co-auteurs, deux députés, Karine Berger (PS) et Pierre Lellouche (LR). Rédigé et remis en 2016, c'est un inventaire manifestement très complet des différentes techniques d'abus de droits états-uniens, pour imposer leur loi au reste du monde.

Par curiosité, j'ai fait une requête "Berger-Lellouche" sur Google Actualité, qui recense (à peu près) tout ce qui s'écrit dans les medias mainstream, sur tous les sujets imaginables. Aucune occurrence dans les derniers jours. Ce qui signifie que pas un seul distingué journaliste économique n'a encore ressorti de son tiroir cet outil de compréhension de ce qui va constituer une part importante de l'actualité mondiale dans les mois qui viennent (je ne fais pas mon malin. Jusqu'à ce matin, où j'ai capté au vol une allusion sur RFI, j'en ignorais aussi l'existence. Mais je ne suis pas journaliste économique, personne n'est parfait). Bref, vous avez une idée de mon programme de lecture du week-end (pour les flemmards surmenés, un texte plus court ici).

Et puisque nous en sommes là, à soupeser les allusions sybillines de Macron (et beaucoup moins sybillines de Merkel) à ce que pourrait être une réponse européenne au bras d'honneur de Trump, je vous signale cette proposition, justement, de Pierre Lellouche. Une riposte existerait, qui consisterait...à adopter des mesures sanctionnant les entreprises européennes, si elles se conforment aux exigences américaines. C'est audacieux. Tellement audacieux que cette proposition n'a, elle non plus, été reprise nulle part. Pourtant, cela mériterait d'être au moins débattu, non ?

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