Sainte Rillette, protégez-nous d'Elise Lucet !

Daniel Schneidermann - - Investigations - Le matinaute - 31 commentaires

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Elle s'appelle Catherine Chapalain. Elle est directrice générale de l'ANIA.

Nous vous racontions hier la bataille acharnée que mène l'Association Nationale des Industries Alimentaires, pour tenter d'entraver l'obligation d'étiqueter les pizzas surgelées, et autres délices, d'une signalétique informant clairement les consommateurs de la qualité nutritionnelle des aliments industriels qu'ils ingèrent. En gros, elle préfère d'autres signalétiques, moins claires. C'est vrai, pourquoi donc faire clair quand on peut faire incompréhensible ? Il faut lire intégralement le texte qu'elle a publié pour tenter de démolir Cash Investigation, qui consacrait au sujet son émission de rentrée.

Que Catherine Chapalain en veuille à France 2 d'avoir cité exclusivement, parmi ses adhérents, "les grandes marques", au détriment des PME qu'elle représente aussi, c'est du classique. Tous les syndicats professionnels, FNSEA en tête, mettent en avant médiatiquement leurs "petits" adhérents, pour mieux planquer les gros. Qu'elle récite comme un mantra la liste des délicieux mets qui sortent des usines de ses adhérents, "le saucisson, les rillettes, le caramel au beurre salé, les fromages", pour mieux saisir le lecteur-consommateur aux papilles, classique aussi (même s'il vaudrait mieux, si on peut se permettre, ne pas trop mélanger sucré et salé dans lesdits argumentaires, l'indigestion n'est jamais loin). Tout ceci n'est que la foire-exposition des aliments, pardon, des éléments de langage, que l'on apprend à tartiner dans les écoles de communication.

Mais c'est surtout quand elle tape sous la ceinture, que Catherine Chapalain révèle les dessous des méthodes des communicants. Ainsi de sa description sibylline de l'équipe de tournage de France 2 : "Il y avait deux journalistes, deux cadreurs, un preneur de son, une assistante et une maquilleuse… un vrai plateau de cinéma !" Horreur, une maquilleuse ! France 2 tenterait donc de produire une belle image ? "L’installation a nécessité plus de temps que prévu" : quels bras cassés, sur le service public ! "De son côté, Elise Lucet est arrivée une heure plus tard" : sans doute, en effet, la star aurait-elle dû assister, une heure durant, à la mise en place du plateau. "Ensuite, les deux journalistes se sont installés dans une autre pièce avec leurs ordinateurs et un micro connecté à l’oreillette de Mme Lucet" : quel scandale ! Sainte Rillette protégez-moi ! Elise Lucet était donc en contact avec son équipe !

Il faut remercier Catherine Chapalain d'avoir publié ce texte. Souvent, en effet, on se dit qu'ils exagèrent, à Cash Investigation, que les communicants de la grande industrie ne peuvent pas être tout à fait aussi roublards, aussi retors, aussi insinuants, qu'ils le prétendent. Merci pour cette confirmation.

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