Saint Borloo

Daniel Schneidermann - - Le matinaute - 54 commentaires

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Le débat sur le réchauffement ? Bah ! Avant tout, une histoire de péché et de rédemption.

C'est la théorie du physicien Vincent Courtillot, avec qui France Inter ouvrait sa page matinale spéciale Copenhague. Nous avons péché en polluant, gaspillant et réchauffant. Mais nous pouvons nous racheter en "changeant nos comportements". D'une voix tranquille, le physicien expliquait donc que l'orchestration médiatique planétaire de Copenhague n'est finalement rien d'autre qu'un gigantesque storytelling pour la bonne cause, que les populations occidentales "n'achètent" que parce qu'elles sont manipulées par leur vieux fond judéo-chrétien. Courtillot, qui a émergé ces derniers mois sur la scène médiatique nationale, est un Allègre soft, la provocation et la beaufitude en moins. Comme porte-parole français d'un climato-scepticisme "raisonnable", il est certainement promis à un grand avenir, s'il résiste à la tentation de l'énervement, que l'on sent toujours affleurer.

Juste après l'hérétique de service, la même radio donnait logiquement la parole au ministre Borloo, en direct de Copenhague. En quelques mois, on nous l'a changé, celui-là. Depuis des mois, Saint-Borloo court les routes planétaires. Il paraît même, racontait Sherlock Com' ce week-end, qu'un chef d'Etat africain l'a pris pour Jesus. Même sous des climats modérés, on comprend que ça monte à la tête. Accents épuisés-mais-jamais-las-de-convaincre de l'homme qui jettera dans la bataille jusqu'à ses ultimes forces : à quelques minutes d'intervalle, Borloo semblait s'évertuer malgré lui à donner raison à Courtillot, en incarnant la pollution du débat par une sorte de rédemptionnisme mystico-religieux.

Pollution, oui.Le débat sur la réalité de la responsabilité humaine dans le réchauffement est pollué par toutes sortes d'émotions parasitantes. On le voit bien en lisant l'impressionnant forum de notre dernière émission Ligne j@une, (631 messages à l'heure où écrit le matinaute): une bonne part des contributeurs considèrent que Sylvestre Huet, de Libé, a perdu la joute, bien qu'ayant fait la preuve de sa parfaite maîtrise scientifique du dossier. On peut être énervé sur un plateau, écrire des mails belliqueux, ou jouer les Saints de pacotille dans la presse pipeule, et avoir tout de même scientifiquement raison. Il est important de s'en souvenir.

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