Premières leçons du cyber-harcèlement d'Issou (Yvelines)

Daniel Schneidermann - - Numérique & datas - Le matinaute - 52 commentaires

A l'origine, c'est une blague. Une blague innocente, née en juin 2016 sur le désormais célèbre Forum 18-25, de Jeuxvideo.com. Pour des raisons que je renonce à résumer ici (mais qui impliquent Jesus-Christ et un acteur espagnol), un groupe de jeunes internautes décide de s'en prendre à la commune d'Issou (Yvelines). 

Habitants, commerçants, institutions, personne n'échappe au vandalisme numérique. Une piscine privée est indiquée sur Google Maps comme "piscine municipale" (car il est possible à l'importe quel internaute "d'optimiser l'expérience utilisateurs" sur Google Maps) : le propriétaire reçoit des appels lui demandant ses horaires d'ouverture. Un salon de toilettage pour chiens est indiqué sur Google "fermé définitivement" : son chiffre d'affaires plonge. Près de deux ans plus tard, le trollisme n'a pas cessé, et les habitants envisagent de porter plainte, comme le signale le site La Gazette en Yvelines, qui suit l'affaire de près (la mairie d'Issou a déposé deux plaintes, qui ont été classées sans suite).

Comme beaucoup de faits-divers de l'ancien monde, celui-ci est riche d'enseignements sociologiques et économiques. On rappelle par exemple que le propriétaire de jeuxvideo.com est le groupe Webedia, de l'homme d'affaires Marc Ladreit de Lacharrière, le même qui a trouvé les fonds pour salarier Pénélope Fillon, mais pas pour effectuer une modération efficace de son forum, comme on l'avait déjà réalisé à propos de la campagne de harcèlement dont avait été victime la chroniqueuse féministe Nadia Daam. Une véritable modération des forums, avec suppression systématique des posts sur Issou,  n'a été mise en place, selon La Gazette en Yvelines, que lorsque l'affaire a été mentionnée sur un site national, Rue89, en novembre 2017.

On peut noter accessoirement que les sociétés privées Webedia (avertie par la mairie d'Issou dès octobre 2016) et Google ont été incapables de gérer l'affaire. En revanche, Wikipedia, plateforme collaborative ayant largement recours au bénévolat militant pour la gestion de ses notices (voir notre dossier), a résisté aux tentatives de piratage. Que chacun en tire les leçons qu'il voudra.



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