Panama : tiens, l'ancien boss de France Télévisions publicité est dans la liste

Daniel Schneidermann - - Investigations - Le matinaute - 37 commentaires

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Tout de même, on donnerait cher pour voir en direct la tête d'un journaliste, quand il apprend que le nom de son patron

, ou de son actionnaire, ou d'un dirigeant de son groupe, figure dans les Panama papers, dans la longue liste des clients des avocats optimisateurs panaméens. Ne rien dire ? Etouffer ? Impossible. Il va donc falloir aborder le sujet. Mais comment ? Le plus discrètement possible, et si possible en s'insurgeant au nom de la présomption d'innocence, comme le brave Olivier Truchot, interrogeant un journaliste du Monde, sur BFMTV, à propos de Patrick Drahi. Il a raison, Truchot. Ce n'est pas bien de "jeter des noms en pâture", tant que l'on ne sait pas si on est dans la fraude pure et simple ou dans l'optimisation, ni quel est le degré exact de proximité des "proches" impliqués. Encore faut-il s'appliquer à le savoir, et on ne doute pas que les media Drahi (BFM Business, L'Express, Libé) vont être les premiers à chercher à confirmer ou infirmer ce qu'affirme ce matin Mediapart, à savoir que "désormais, c’est donc bel et bien une coquille financière de Guernesey (Next Limited Partnership Inc, NDR), qui contrôle Altice IV SA, laquelle contrôle Altice Media Group, laquelle contrôle Altice Media France, laquelle contrôle… L’Express, Libération et bientôt NextRadioTV, avec ses titres BFM, BFM Business et RMC".

Des qui n'ont pas reculé, ce sont les journalistes de Cash Investigation, quand ils ont découvert dans la liste le nom de l'ancien patron tout-puissant de France Télévisions Publicité, Philippe Santini. "Un autre homme à côté duquel on ne pouvait pas passer : Philippe Santini, un ancien haut cadre de France Télévisions, notre diffuseur adoré" lance le commentaire (voir l'extrait ci-dessous). Des années durant, Santini a dirigé la régie publicitaire du groupe. Et voici qu'on apprend qu'il a fondé, en 2005, Araph Ltd, basée aux Samoa, en Polynésie, société destinée à détenir un compte bancaire en Suisse. Cash l'appelle. "Inconnu pour moi au bataillon" lâche Santini au téléphone, avant de se murer dans le silence. Ni une ni deux, Lucet enfile son imper, et va l'attendre devant les bureaux de la société de coaching pour dirigeants d'entreprise, qu'il a fondée après son départ de France Télévisions. Peine perdue. L'ancien boss ne lâche pas un mot. "Je refuse que mon image soit utilisée, en vertu de mon droit à l'image" grommelle-t-il en s'engouffrant, col relevé, dans l'immeuble de ses bureaux. Lucet, à l'homme qui s'éloigne : "Est-ce que l'argent provient de votre travail à France Télévisions ?" "Apparemment, Philippe Santini n'aime pas la publicité" conclut le commentaire, implacable.

Comme tous les noms, l'apparition du nom de Santini pose davantage de questions qu'elle n'apporte de réponses. Pourquoi une société à Samoa ? se demande le quotidien suisse 24 Heures, qui a co-enquêté avec Cash. "Besoin légitime de confidentialité pour une affaire familiale? Optimisation fiscale? Ou l’inimaginable? Des hauts responsables d’entreprises publiques comme lui sont exposés à des tentatives de corruption". Si cette longue enquête de France 2 est remarquablement fouillée et claire, le courage proprement dit de Cash, en la matière, est tout relatif : Santini a dirigé la régie de France Télévisions entre 1997 et 2012. Il en est parti depuis quatre ans. La direction du groupe a changé dans l'intervalle. Ne portant aucune responsabilité dans d'éventuelles malversations, la direction actuelle du groupe n'avait aucune raison d'être gênée par la mise en cause de Santini. Reste maintenant à observer les suites internes qu'elle va donner à l'affaire.

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