Orages : alerte, Irma est dans le métro !
Daniel Schneidermann - - Le matinaute - 61 commentaires
On va parler orages. "Vous savez ce qu'est un cumulus ?"
lance le prévisionniste de Météo France Frédéric Nathan à Guillaume Erner, sur France Culture. "Euh, pas vraiment"
. Bien. On va donc revenir aux fondamentaux. "Vous vous réveillez, le ciel est bleu..."
commence le spécialiste. Puis, le petit nuage de vapeur monte dans le ciel, et devient cumulus. Lequel pourra devenir un menaçant cumulo-nimbus. Et voilà pourquoi votre fille est d'humeur orageuse (je résume).
A cette nécessité du retour aux fondamentaux, se mesure l'inculture scientifique générale, et notamment dans les medias. A-t-on vu les matinales radio devoir ainsi revenir aux fondamentaux sur la constitution de 1958 ? Sur le quinquennat de Macron ? Sur les règles du foot ? Mais la science, elle, peut tranquillement se laisser oublier par les medias, jusqu'au moment fatidique où les voyageurs du métro parisien pataugent dans les flaques.
La pluie à Paris. Dans la joie et la bonne humeur. #orage#jourdainpic.twitter.com/2b5TwxwhWb
— julietta (@jv_julietta) 29 mai 2018
Rien d'inhabituel dans les orages que nous traversons, poursuit Nathan. Certes, ce mois de mai 2018 a produit trois fois plus d'impacts de foudre qu'un brave mai habituel (155 000 en France, le triple de la moyenne), mais rien d'alarmant. Pourtant, Erner a des sources discordantes : des agriculteurs de la Drôme ("département que je connais")
. A leurs yeux, on est dans l'inédit. Dans le jamais vu. Alors ? Alors ?
A quoi se perçoit, dans les questions impeccablement professionnelles d'un journaliste, une sourde angoisse ? A quelle imperceptible impatience ? A quel tremblement de la voix ? Car il faut bien la contenir, cette angoisse. Ne pas affoler les auditeurs matinaux de France Culture. Erner connait le risque. Aussi, ce n'est pas lui qui prononce le premier le mot "tropicaux". C'est l'invité. Mais Erner bondit sur l'adjectif. Voilà ! C'est ça. Sur Paris, sur Bordeaux, ces orages tropicaux des derniers jours ! Il ne pose pas la question, mais chacun l'entend : assistons-nous au lever de rideau de l'apocalypse climatique ? Est-ce de Mai 18, qu'il faudra dater la sortie de l'apocalypse des écrans de télé, des pages "climat" des journaux, pour envahir les rues des capitales européennes ? Le météorologue se fait alors porte-parole des climatologues, pour répéter ce qu'ils ne cessent de ressasser : non, les phénomènes "extrêmes" ne seront pas plus nombreux dans les années à venir, mais simplement plus violents, et pas seulement dans les Caraïbes (voir notre émission sur Irma). Et voilà pourquoi il va falloir d'habituer à prendre le métro en bottes, en attendant mieux.
Les cumulus sont en train de dégénérer en cumulonimbus sur #Senlis#HeyMeteoFrancepic.twitter.com/KIoJbcWo3h
— Bernard Trouillet (@BernardT60) 24 mai 2018