Notre-Dame-des-Landes : un peu de basse politique matinale

Daniel Schneidermann - - Le matinaute - 77 commentaires

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Dans le lancinant débat sur Notre-Dame-des-Landes, au moins tel qu'il se déroule en coulisse au gouvernement

, il y a une catégorie d'arguments auxquels plus personne ne semble penser, des arguments oubliés dans un coin de grenier où ils s'empoussièrent : les arguments sur l'utilité de l'aéroport. Si chacun s'accorde à l'estimer, aujourd'hui, inutile, à partir de quelle augmentation du trafic aérien le futur aéroport sera-t-il utile ? Cette augmentation est-elle prévisible ? Dans quel délai ? De quelle nature sera-t-elle ? Est-elle souhaitable ? Lors de notre grande enquête sur le terrain (quatre ans déjà, eh oui !) les partisans du nouvel aéroport estimaient l'actuel "au bord de la saturation". Ce "bord" a-t-il été franchi depuis ?

Comme le remarquait pertinemment Thomas Legrand sur France Inter, l'opposition perceptible Valls-Royal ne porte pas sur ces points mineurs et négligeables. Valls veut l'évacuation des zadistes parce que la Justice l'a ordonnée, scrogneugneu, et Royal s'y oppose parce qu'elle estime cette évacuation matériellement impossible. Sans doute tous deux ont-ils aussi des convictions profondes sur le fond de l'affaire, mais ils les cachent bien.

Etrange trouble matinal, que de se sentir d'accord avec Thomas Legrand. Pas seulement sur ce constat désolé. Mais sur le fait que, dans le blocage d'aujourd'hui, le référendum local, oui, peut être la moins mauvaise voie de sortie. Evidemment, pour peu que son corps électoral soit délimité honnêtement, sans vices de forme, et sans arrière-pensée. Peut-on l'espérer ? Paradoxalement, je pense que oui. Car dans ce référendum, le gouvernement n'a pas forcément intérêt à voir triompher un résultat ou un autre. Avant de hurler dans les forums, écoutez le matinaute faire un peu de basse politique matinale. Certes, il apparait clairement que Valls, pour les raisons énoncées plus haut, veut la construction de l'aéroport. Mais ce n'est pas forcément le cas de Hollande. Que le "non" l'emporte, et se trouvera ainsi validée, au sein des Verts, la stratégie Cosse, de participation au gouvernement Valls-Hollande, contre la stratégie Duflot d'opposition. On verra danser Cosse le long des golfes clairs, en brandissant le scalp de l'aéroport. Hollande pourra aborder 2017 avec dans la poche une partie de l'électorat écolo, et en ayant démonétisé la candidature Duflot. Il serait étonnant qu'il n'y ait pas pensé. Je ne prétends pas que dans ces calculs, se niche le moindre gramme de morale ou d'efficacité. Je parle simplement politique, moi aussi.

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