L'idiome socialiste, et le spleen Aubry

Daniel Schneidermann - - Le matinaute - 41 commentaires

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A quelque chose déroute est bonne.


La débâcle socialiste aux Européennes aura au moins permis de faire émerger une réalité psychologique : Martine Aubry s'ennuie à Paris, rue de Solférino. Elle se confond, elle se morfond, elle se flétrit, elle se ratatine. Elle n'y passe d'ailleurs que deux jours de supplice par semaine. Elle ne revit qu'à Lille, où Madame la maire colloque, inaugure, tranche, décide. Pour davantage de détails, je vous renvoie à vos zebdos préférés, qui en fourmillent tous.

Lisant ces mélancoliques et répétitifs reportages sur le spleen aubryen, on ne peut s'empêcher de repenser à tous les dirigeants socialistes, lors de la soirée télévisée électorale de dimanche. Pas un seul ne voulait dézinguer Martine Aubry. Pas question ! Elle n'était "pas en cause". Tout juste lui demandait-on de bien vouloir "accélérer la rénovation" du Parti.

Pourtant, très vraisemblablement, même s'ils n'avaient pas encore lu (et pour cause) les zebdos de la semaine suivante, lesdits dirigeants étaient au courant, dans les grandes lignes, de l'allergie aubryenne pour la direction du Parti. On peut raisonnablement supposer qu'ils n'ont pas découvert la situation en lisant le journal. Ils savaient tous qu'elle n'était pas à sa place, et pas davantage après qu'avant la déroute. Pourquoi ne l'ont-ils donc pas dit ainsi ? Peut-être d'ailleurs que tel est le message qu'ils tentaient de faire passer, en langage socialiste. L'idiome socialiste, au début du XXI e siècle, est un grand mystère, sur lequel se pencheront, on l'espère, les plus brillants linguistes du millénaire qui s'ouvre.

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