Le patronat, ombres et projecteurs
Daniel Schneidermann - - Le matinaute - 14 commentaires Télécharger la videoTélécharger la version audio
C'est une affaire entendue : Minc a l'oreille de Sarkozy.
C'est forcément vrai, puisque les journalistes politiques le répètent d'article en article, se recopiant les uns les autres. Qu'importe que personne, au fond, n'en sache rien. Sarkozy lui-même ne s'en est jamais revendiqué. Interrogé au sujet de son influence, Minc manie invariablement l'art savant du démenti qui confirme. Et tous ses interlocuteurs se disent : "ah ah, s'il n'en dit rien, c'est donc que la chose est vraie". Vrai ou faux, le mythe perdure donc, offrant à Minc un ticket d'entrée à vie dans lémédias. Témoin, sa lettre de ce matin, publiée dans Le Figaro, à "ses amis de la classe dirigeante", dans laquelle il les adjure, après avoir naguère soupiré que cette crise était "grotesquement psychologique", d'entendre aujourd'hui la colère, "même populiste". Qu'importe que l'on s'y perde. L'important dans l'opération est que chacun soit persuadé d'y lire les arrière-pensées de Sarkozy.Il y a les projecteurs, et il y a l'ombre. Sous les projecteurs, les dirigeants de la Société Générale ont donc renoncé à leurs stock-options. Dans l'ombre, il semble bien que l'ancien patron de PSA, Jean-Martin Folz, par ailleurs président du Comité des rémunérations de la Société Générale, ait joué un rôle important, acceptant le plan de stock options avant de manger son chapeau. On le devine entre les lignes. Les détails, on les connaitra plus tard. Dans l'ombre toujours, il semble bien que l'Etat ait poussé à la démission le patron de Valéo, qui avait annoncé un plan de 1600 suppressions d'emplois auquel il ne voulait pas renoncer. Le Figaro ne l'écrit pas noir sur blanc, on a sa pudeur, mais organise un jeu de piste qui permet de le déduire. Les détails, on les connaîtra plus tard.
Les week-ends patronaux sont agités, ces temps-ci. Mais les récits n'en parviennent qu'avec quelques jours de retard. Il faut croire que le journaliste économique a encore davantage de mal à pénétrer les conciliabules du patronat, que le journaliste politique n'en a à démêler les querelles Aubry-Royal, ou les coulisses du Vatican.