-
Rosalie
Ne peut-on pas demander à Pujadas combien de fois il a demandé à Nicolas Sarkozy ou à ses ministres s'ils regrettaient telle mesure qui a accru les injustices dans notre pays, ou qui a gravement accru le déficit budgétaire? En cas de non réponse ou d'esquive, combien de fois a-t-il répété la question? Et il faudrait également ne pas lâcher Pujadas lui-même avant qu'il n'ait répondu ... -
Vincent GRENIER
C'est le mot qu'il faudra bien finir par prononcer.
Car que se passe-t-il depuis quelques années ? A chaque dérapage, on se rend compte que l'on vient de franchir une étape. Chaque nouveau dérapage brise un nouveau tabou. Nous glissons. Jusqu'où ?
Cette citation de Guéant, c'est tout de même quelque chose d'inimaginable ! Imaginez-vous de tels propos venant d'un politique, il n'y que cinq ou dix ans de cela ? Et venant du ministre de l'Intérieur ? Bien sûr que non ! A chaque dérapage, nous glissons encore plus.
Cette glissade, elle mène où ? A la constitution de groupes de volontaires -je vous rassure, non armés- qui assureront la sécurité aux marges des zones de non-droit ? Et qui, le soir, briseront les vitrines des boucheries Halal ? En attendant que l'Etat légifère et admette enfin qu'un retour au calme ne peut être effectif qu'en interdisant aux musulmans (pour leur sécurité) de tenir un commerce ?
Cette glissade, on l'a déjà connue. C'est la dynamique de la haine qui a, effectivement, porté les germes du nazisme.
Accepter aujourd'hui les propos de M. Guéant, c'est les légitimer, et s'attendre à ce que les prochains ne soient que pire encore. -
Philippe Rahard
apparemment, Letchimy n'a pas employé le mot de nazi. Ses propos sont assez clairs et bien formulés. C'est hallucinaant de voir tout le monde réagir sur l'interprétation de ceux-ci et non sur le fond. C'est une chose de traiter quelqu'un de nazi et une autre que de montrer que ses propos et ses raisonnements peuvent conduire à ces dérives. Si les journalistes s'en tenaient aux faits et au fond,au lieu de faire de la presse à sensation de bas étage, on pourrrait avoir un vrai débat sur le sujet.Et sur le fond, il a raison. Toute cette gesticulation ministérielle sur les "étrangers non communautaires" ne font que créer des schismes, mettre des jugements de valeur (ou plutôt de non-valeur) et attiser toutes les dérives qui mènent à toutes les haines et les violences que l'n a que trop connues et que l'on connait encore que trop en beaucoup d'endroits du monde. -
Stéphane J
Sur la vidéo de l'Assemblée, loin de sembler scandalisé, M. Guéant rigole guoguenard, illustrant ce faisant le caractère surjoué de la réaction du gouvernement et des députés UMP. Car comme bcp l'ont déjà dit, il n'y a rien d'insultant dans les propos de M. Letchimy ; il y a juste une analyse qu'on peut trouver juste ou fausse ; et que la perspective historique rend plus juste que fausse. Tandis que la récurrence des propos de Claude et Nicolas se rapprochent plus de l'insulte que de l'analyse...
Quant au sieur Pujadas, on aimerait qu'il soit aussi insistant quand il interview le trop petit Nicolas a domicile. -
Benoit Gonthier
C'est mon opinion et je la partage sur cet écran de fumée... -
airlude
Mais à qui profite le crime !!!??
La droite voulait que l'on parle d'elle... C'est fait! Guéant nous montre que la droite peut être plus à droite que Marine... Et du coup, Marine
se retrouve comme par enchantement (celui-là c'est le rêve de la droite) un peu plus au centre et donc de plus en plus respectable.... !!
(petite prépararion pour les législatives puisque Mr Président a bien dit que la question d'une part de proportionnelle devrait être soumise,
donc ATENTION Si Président repasse c'est Le FN qui passe à l'assemblée)
Pujadas en a fait d'autre et il ne s'arretera pas là. La France s'est-elle posée la question lorsqu'elle a colonisée la moitié de l'afrique et
réduit en esclavage des civilisations entière... à savoir les civilisations se valent-elles ? Manifestement non à cette époque, Guéant devrait
rejoindre Marine, au moins on y verrait plus claire. Quand à Pujadas ... c'est quand qui prend sa carte !!! -
Yanne
Je voudrais mettre un peu tout ça dans le contexte politique et géostratégique.
La théorie du choc des civilisations est la grande théorie des conservateurs américains cueillis à froid par la chute du mur de Berlin et la fin de la guerre froide, donc d'une conception bipolaire du monde. Le véritable nom du livre de Huttington est "Le clash des civilisations et la refondation du nouvel ordre mondial".
Elle ne sert pas seulement a redéfinir un monde multipolaire tel que l'entend Emmanuel Todd, (qui d'ailleurs s'y opposera dans "le Rendez vous des civilisations", écrit en collaboration avec Youssef Courbage), elle redéfinit la place de l'occident, évidemment la première, à l'intérieur d'une nouvelle redistribution des cartes identitaires qui va redéfinir toute la stratégie des Etats-Unis.
Historiquement, elle va servir aux conservateurs américains à asseoir une idéologie qui va leur permettre de perpétuer leur pouvoir. Car c'est aussi une stratégie de politique intérieure pour conserver une Amérique de nature raciale. C'est en outre une stratégie de containment intérieur qui va émettre l'idée qu'hors de la civilisation occidentale, il ne peut exister de démocratie. C'est donc une resucée des idées qui ont présidé à la colonisation. Pour la droite ultra-libérale américaine, c'est une pensée alliée précieuse parce qu'elle favorise les dominants américains qui ont étendu leur pouvoir lors de la guerre froide, ainsi que grandes entreprises qui cherchent l'accumulation du pouvoir dans la sphère mondiale. Evidemment, le 11 septembre va cristalliser et même hystériser cette conception du monde. Jusqu'au moment où il va être prouvé par la guerre en Irak que les USA ne sont pas à la mesure de leur empire.
Le sarkozysme est directement issu de cette pensée, et Guéant en est le héraut (mais pas le héros).
Après les débacles annoncées d'Afghanistan et d'Irak, le second grand coup à cette idéologie a été les révolutions arabes, qui ont prouvé que les Arabes en particulier et les Musulmans en général pouvaient par eux-mêmes chasser leurs dictateurs. On a pensé que très rapidement, ils pourraient accéder à la démocratie.
Malheureusement, les révolutions arabes sont en phase de reflux démocratique, même si rien n'est joué, et que le temps jouera sans doute pour la liberté.
Il y a donc une résurgence de la théorie du choc des civilisations, elle-même élément fondamental de la théorie conservatrice, américaine et européenne et évidemment sarkozyste.
Dans ces conditions, Guéant a beau jeu de ressortir la théorie, les circonstances actuelles, bien que provisoires, semblent lui donner raison. Il va donc rencontrer des oreilles attentives partout dans l'électorat de droite, et pas seulement d'ailleurs pour qui le mécontentement des Potes paraît totalement inapproprié.
La stratégie de réponse du PS vues les circonstances me semble très intelligente : un député socialiste, issu d'un département issu des derniers lambeaux de la colonisation, lui-même descendant des esclaves africains, proteste. Il le fait d'une façon très littéraire, fait référence au nazisme, (qui d'après Hannah Arendt est un produit de la pensée colonialiste). Il est dans son rôle, il a raison de gueuler.
La droite s'enflamme, quitte la salle. A mon avis, c'est un peu trop.
Et pour finir, Hollande fait le chef d'état en disant : "Chacun a dit ce qu'il en pensait. Maintenant, circulez, y'a rien à voir", alors même que Sarko, lui, avait mis de l'huile sur le feu.
Question éminemment philosophique : c'est quoi, une civilisation ? En tant que latiniste, je ferai remarquer que le mot civilisation vient du latin civis, la cité. Or, les premiers à avoir bâti des cités sont des gens qui vivaient entre le Tigre et l'Euphrate, ancêtres des Arabes, et les Chinois.
Guéant est d'une inculture crasse, il ne sait même pas ce qu'est une civilisation, pas plus qu'Huttington.
La cité supposait une organisation très élaborée de la société qui permettait de dégager des excédents alimentaires et de de ce fait de pouvoir libérer une partie des membres de la communauté des activités de survie pure et de ce fait les spécialiser dans des activités a priori inutiles, entre autres dans la guerre, dans des arts tels que l'architecture, et les sciences.
Et donc ça a fait partir tous ces différents domaines pour constituer des ensembles cohérents. Mais les régimes politiques peuvent varier dans le temps dans la même civilisation, ça n'a rien à voir. Rien qu'au Mexique, à l'arrivée des conquistadors, les Aztèques vivaient dans des tyrannies sanguinaires, et dans le Yucatan, les Mayas vivaient depuis plusieurs siècles dans des sociétés où les villes ne servaient que de centres cultuels et où des formes de décisions au niveau des villages ont perduré jusqu'à aujourd'hui, ressurgissant chez les néo-zapatistes du Chiapas. -
constant gardener
Juste pour se détendre :
"(...)
On ne m'ôtera pas de l'idée que, pendant la dernière guerre mondiale, de nombreux juifs ont eu une attitude carrément hostile à l'égard du régime nazi.
Il est vrai que les Allemands, de leur côté, cachaient mal une certaine antipathie à l'égard des juifs.
Ce n'était pas une raison pour exacerber cette antipathie en arborant une étoile à sa veste pour bien montrer qu'on n'est pas n'importe qui, qu'on est le peuple élu, et pourquoi j'irais pointer au vélodrome d'hiver, et qu'est-ce que c'est que ce wagon sans banquette, et j'irai aux douches si je veux...
Quelle suffisance !
(...)
La suite est là. -
Ornithorynque
Vous savez quoi ?
Le passage sur les idéologies européennes, les camps de concentration, le régime nazi, la colonisation et l'esclavage est inutile. Il déforce le propos d'ensemble.
Ce qui précède était plus difficile à entendre pour le Premier ministre. (Que je ne classe pas dans la même catégorie que Claude Guéant)
Seule solution, la fuite. -
Jean-François LAUNAY
Dans cette polémique où quoique fasse le PS, pour les bogôs il aura toujours tort (s'il approuve trop fortement Serge Litchimy, il est accusé d'oublier les vrais problèmes d'emplois, de pouvoir d'achat, etc., s'il essaie de ne pas se laisser engluer dans la glue xénophobe de Claude Gluant, il est accusé de ne pas assez appuyer le député de la Guadeloupe...), il serait bon de lire l'intégralité de l'intervention (ou mieux de regarder la vidéo où l'on peut voir l'obscène sourire du C. Gluant puis sa feinte indignation) -
Cultive ton jardin
[quote=DS]"adaptée au dérapage initial de Guéant"
Je ne pense pas que ce soit un "dérapage". Ou alors, un dérapage contrôlé, volontaire, orienté vers un but. Deux buts, plutôt. Le premier, apparent, mais à mon avis superficiel, conjoncturel, récupérer quelques voix à "la madame", le seul but que voient les commentateurs. Second but, souterrain et beaucoup plus grave, faire passer les idées de la droite dure, les rendre familières, banales, acceptables. Ce n'est pas (pas seulement) de l'électoralisme, Monsieur G pense vraiment ce qu'il dit, monsieur G roule pour la droite la plus extrême. Monsieur G ne veut pas qu'on évoque le nazisme à son sujet, comme d'autres refusent qu'on les taxe de fascistes. Et sans doute ont-ils raison: le mouvement dont font partie ces gens-là n'a pas encore de nom.
Devons-nous attendre la suite et la fin de l'histoire pour le nommer?
Autre chose pourtant: il y a plus de soixante dix ans, on a mis des enfants dans des camps de rétention, on s'est même posé la question de savoir si c'était plus humain de les laisser libres et abandonnés ou de les embarquer avec leurs familles. C'était fini, plus jamais ça. Et puis, ça a recommencé. De nouveau on a mis des innocents en prison avec leurs enfants. Certains ont même fait le choix de confier leurs enfants à des amis plutôt que de les emmener avec eux. Vous vous souvenez de la date, de la première fois où ça a eu lieu, cette infamie? Ben moi non plus, je sais pas, c'est venu tout doucement, tout benoîtement, et puis, un jour, c'était là et c'était devenu normal, banal. Et c'est de très bonne foi que beaucoup d'entre nous diront "On savait pas". Parce que nous n'avons pas été assez nombreux à crier, parce que nous n'avons pas crié assez fort.
Elle est très belle la lettre de Letchimy, très belle et très seule. -
Erwan
Je me permets de reproduire ci-dessous les remerciements que j'ai adressé à M. Letchimy sur son blog:
Monsieur le député,
je me joins sans réserve aux remerciements ci-dessus, votre intervention était profondément juste, n'en déplaise à ceux qui ont joué les vierges effarouchées en quittant l'hémicycle.
Ces derniers voudraient assimiler votre évocation des nazis à une insulte, comme si les nazis étaient "le mal absolu", comme s'ils n'étaient que des monstres sanguinaires. Il est au contraire très important de se rappeler que ceux ont souscrit à ces idées en votant pour Hitler étaient des êtres humains comme vous et moi ; ils ont simplement été influencés par certaines idées qui se sont propagées dans un contexte de grave crise économique, contexte favorable à la désignation de bouc-émissaires par des politiques ambitieux et sans scrupules.
Ainsi je pense que la comparaison était objectivement parfaitement justifiée, tant les idées que M. Guéant (et certains de ses collègues) distille régulièrement dans l'opinion s'inscrivent dans ce type de processus.
À l'heure où de nombreux pays d'Europe voient l'extrême-droite, devenue politiquement correcte, progresser dangeureusement, il est salutaire d'analyser la situation actuelle au regard de notre histoire.
Monsieur le Député, merci. -
emilie bouyer
Juste un clin d'oeil...Nora Berra,membre du gouvernement a conseillé aux "populations vulnérables d'éviter de sortir de chez elles" par ce grand froid,incluant dans cette catégorie les SDF.On la surnomme depuis Lady Gla-Gla...Mais comment va-t-on faire pour vivre sans cette bande de rigolos après le 6 mai ? -
Sterling Archer
Assez d'accord avec ce que disent Freudqo et quelques autres: Sarko et son sbire mènent le débat piégé et se frottent les mains de constater que l'opposition se jette dedans à pieds joints. Il y a une autre manière de réagir aux déclarations de Guéant: pointer calmement leur bêtise et leur utilisation électoraliste. Pas besoin de se lancer du nazi à la gueule, on ne fait qu'entretenir cette stratégie de tension raciste, qui profite toujours à la droite. Faut vraiment être con pour ne (toujours) pas le comprendre. -
kawouede
juste un point, dans le discours de Letchimy : si on peut contester la référence au nazisme (idéologie proprement racialiste) à propos du discours de l'UMP ou lepénisme soft, il y a une partie de la phrase parfaitement juste, celle qui concerne l'invention des camps de concentration.
C'est un fait établi par les historiens (vous trouverez facilement des références sur la toile) que les camps de concentration ont été inventés par les Britanniques (Kitchener) lors de la guerre des Boers en 1899-1902 (pour y mettre des colons hollandais mais aussi des indigènes) ; d'autres disent que ce sont les Espagnols lors de la guerre hispano-américaine de 1898.
Mais je ne suis pas sûr que les journalistes ou même les ténors de gauche le savent vraiment ; peut-être que le député y pensait dans son discours ? En ce cas il a parfaitement raison : l'idéologie des civilisations supérieures / inférieures (le grand républicain* Jules Ferry disait "races" en 1885) a conduit via la colonisation aux camps de concentration - et aux zoos humains, massacres coloniaux, etc. Des historiens très sérieux y voient une des racines de la "guerre totale" qui a été ensuite déclinée sous plusieurs formes, toutes inhumaines en terre pourtant bien civilisée (voir les génocides du XXe siècle) et à des régimes dits "totalitaires" (voir ce qu'écrivait Hannah Arendt elle-même sur les racines colonialistes du totalitarisme).
Bref il faut prendre le temps d'y réfléchir : sur le fond, historiquement, Letchimy a raison, strictement, en laissant entendre que la façon de penser colonialiste d'un Guéant aujourd'hui a conduit par le passé de bons républicains (ou serviteurs de la monarchie constitutionnelle britannique ce qui est tout comme) à commettre des crimes contre l'humanité. Dont les camps de concentration font partie (à ne pas confondre, encore une fois, avec les camps d'extermination où furent assassinés en masse juifs, tsiganes et quelques opposants politiques par les nazis). Le danger de voir la répétition du passé est quasi-inexistant - mais il y a parfois des excités fondamentalistes qui peuvent prendre une arme automatique et massacrer des jeunes militants de gauche sur une île en Norvège, au nom de ces idées.
* ce n'est pas ironique : J. Ferry (on connaît ses lois républicaines) fut un grand républicain, mais aussi un grand colonialiste. A moins que la république dont on se prévaut et dont on se drape depuis 1885 ne soit pas exempte de tout reproche ?
EDIT j'ai lu sur son blog l'intervention de Letchimy http://www.serge-letchimy.fr/2012/02/07/question-au-premier-ministre-sur-les-propos-de-mr-gueant/ et en effet il n'y a rien à y redire. Certes la référence au nazisme se discute, mais il faut remarquer qu'il ne traite pas directement Guéant de nazi, il l'interpelle à propos du nazisme ce qui est différent (mais peut prêter à confusion, surtout un journaliste de TV du soir ?). Très beau texte en réalité, qui explique qu'on a pu le confondre avec Aimé Césaire... -
Lafargue
Le racisme ordinaire - ici d'un membre du gouvernement - est à verser au bilan du sarkozisme.
De quoi ont peur ceux qui désormais bottent en touche en parlant de piège si ce n'est d'être d'accord avec le ministre ? -
Anthropia
Une civilisation qui met les hommes noirs en esclavage et les Juifs en Lager et les non-communistes en camps, etc., vaut mieux que certaines autres ? -
Mouthmouth
Au départ, on aurait pu croire à un énième syndrome Godwin. Cet avatar de la surenchère et du politiquement incorrect est souvent l'occasion, pour les médiacrates et les politichiens, d'un concerto de cris d’orfraies sans pareille...comme depuis hier. On remarquera d'ailleurs les moult déformations, dyslexies et autres détournements de langage auxquels se livrent tant la droite que [s]la droite[/s] les médias mainstream.
En ces heures de plongée dans l'inconnue (dans la connerie), rien ne vaut une bonne vieille analyse de texte.
Tout d'abord le députe Serge Letchimi, un parlementaire comme on en fait plus : il déclame des textes romancés, enlevés, finement écrits...bref, à 20000km de ce que la droite nous a habitué...mais passons. Donc ce défenseur de la langue l'est tout autant des écrits et son propos n'est on ne peut plus juste : « Vous nous ramenez jour après jour à ces idéologies européennes qui ont donné naissance aux camps de concentration, au bout du long chapelet esclavagiste et colonial. M. Guéant, le régime nazi si soucieux de hiérarchisation, était-ce une civilisation ? La barbarie de l'esclavage et de la colonisation, était-ce une mission civilisatrice ?».
Si la seconde assertion (sur la colonisation) ne semble pas faire débat (tient, c'est une avancée), la première (sur le nazisme) ferait scandale...on hurle au syndrome Godwin.
Pour rappel, quel était exactement le propos de Claude Guéant ? : " Contrairement à ce que dit l'idéologie relativiste de gauche, pour nous, toutes les civilisations ne se valent pas. Celles qui défendent l'humanité nous paraissent plus avancées que celles qui la nient. Celles qui défendent la liberté, l'égalité et la fraternité, nous paraissent supérieures à celles qui acceptent la tyrannie, la minorité des femmes, la haine sociale ou ethnique".
En cherchant un peu dans les textes nauséabonds (mais qui sont des sources historiques au combien utiles) du national-socialisme allemand, et en particulier dans le tant commenté mais si peu lu Mein Kampf d'un certain Adolf Hitler (retrouvable sur le site http://www.encyclopedie.bseditions.fr) :
" Toute la culture humaine, tous les résultats apportés par l’art, la science et la technologie, dont nous jouissons aujourd’hui, sont presque exclusivement dus au génie créateur de l’Aryen. Ce fait même implique que lui seul à fondé l’humanité supérieure et qu’il est donc le prototype de ce que nous entendons par le mot "homme". Il est le Prométhée de notre espèce. De son front de lumière a jailli à toutes les époques l’étincelle divine du génie ; elle a perpétuellement ranimé la flamme de la conscience qui éclaircit la nuit des mystères silencieux, grâce à quoi l’homme a pu accéder à la maîtrise et à la domination des autres êtres terrestres... C’est lui qui établit les fondations et qui assuma la construction des murs de tous les grands édifices de la civilisation humaine. »…
… « Ainsi, l’existence de types humains inférieurs a toujours été une des conditions préalables essentielles à la formation des civilisations supérieures... Il est certain que la première culture humaine se fonda moins sur le dressage des animaux que sur l’emploi des humains inférieurs... C’est seulement après l’asservissement de ceux-ci que le même sort fut appliqué aux bêtes, car la charrue fut tirée par le guerrier vaincu avant de l’être par le cheval. Ce n’est donc pas par hasard que les premières civilisations se sont produites là où l’Aryen, dans ses contacts avec des races inférieures, les a soumises et pliées à sa volonté... Tant qu’il a su garder sans pitié son attitude de maître, non seulement il est demeuré le maître, mais encore il a été celui qui protégeait et qui développait la culture. »
« Qui sera l'enfant préféré de la Nature? L'Aryen, le Prométhée de notre espèce, qui devint si grand en piétinant les autres. »…
Sans rentrer dans quelques contextualisations nécessaires (il faudrait, par exemple, rappeler que les Européens (et les savants en premier lieu) croyaient presque tous à l'inégalité des races et à l’existence de civilisation plus avancées que d'autres, et ce jusqu'à la fin des années 1940. Après, il y a eu l'analyse structuraliste (Claude Levi-Strauss) et surtout le fameux "relativisme de gauche", qui n'est en fait pas tant de gauche que scientifique), il faut souligner que l'angle de la supériorité et de l'infériorité est un paradigme nazi. C'est historique, peut-être même philosophique, mais ce n'est pas une dérive à la Godwin.
En conclusion, quand Serge Letchimi nous dit que les digressions de Guéant sur les "civilisations supérieures" nous rappellent les propos même de Hitler, il a totalement raison. DANS LE TEXTE en plus !
Et par extension, on pourra dire que DS a raison quand il écrit que SL a raison : "On peut tout aussi bien soutenir la thèse inverse, et juger la riposte de Letchimy (2) parfaitement pertinente, historiquement juste, et adaptée au dérapage initial de Guéant (outre qu'elle est remarquablement écrite, ce qui ne gâte rien). Et pour ne pas avancer masqué à mon tour, j'admets que telle est exactement mon analyse matinale."
Ouch, je commence à en avoir mal au crâne... -
Benoit Gonthier
Comment voulez-vous que les journalistes n'apparaissent pas comme des symboles du consensus, de la bonne parole s'ils posent de telles questions ?
Oui en effet David Pujadas est coutûmier du fait ça énerve Jean-Luc Mélenchon à juste titre d'ailleurs "Vous regrettez hein ouh c'est pas bien d'avoir dit ça" contester le consensus c'est déja trop en France. En gros on pourrait presque en conclure que Pujadas approuve les propos de Guéant, en plus Hollande s'est très mollement (habitude ?) défendu...
C'est comme une fois j'ai entendu Anne-Sophie Lapix poser cette merveilleuse question à un invité (je sais plus qui c'est, mais cherchez) : "Mais finalement, les reconduites à la frontière, est-ce-que ce n'est pas une bonne solution ?" (je vous jure que c'est vrai je l'ai entendu...). -
Guillaume Champeau
N'y a-t-il pas une erreur de focaliser ainsi sur la question de l'intervieweur, davantage que sur la réponse de l'interviewé ? On peut prendre les questions de Pujadas pour une forme d'inquisition, et peut-être en était-elle une telle que vous la décrivez. On peut aussi se dire que Hollande aurait pu répondre exactement ce que vous écrivez : "la riposte de Letchimy était parfaitement pertinente, historiquement juste, et adaptée au dérapage initial de Guéant". Ca aurait été courageux, et aurait évité à Pujadas de reposer plusieurs fois la question.