Hulot : Marlène Schiappa, victime collatérale
Daniel Schneidermann - - Le matinaute - 38 commentaires
Outre Hulot et Ebdo, qui auront sans doute tous deux du mal à s'en remettre, il y a déjà une victime collatérale dans l'affaire : Marlène Schiappa. En se taisant pendant deux jours -deux jours, une éternité!- muselée par la solidarité gouvernementale, devant les caméras de Quotidien, la secrétaire d'Etat à l'Egalité femmes-hommes perd une première bataille. Article 1 : quiconque évite les caméras de Quotidien est médiatiquement suspect.
En surréagissant ensuite, avec deux jours de décalage, comme pour se rattraper, dans le cadre sécurisé d'une tribune au JDD, en qualifiant d' "irresponsable"
l'article de Ebdo, et d' "abject"
(rien que ça) l'appel d'Anne Jouan, l'une des auteures de l'enquête, à d'autres témoignages de femmes, elle perd la guerre.
Cet impossible combat défensif la contraint d'ailleurs à utiliser les arguments les plus démonétisés des adversaires de #metoo. Ainsi, Hulot serait un collègue "charmant"
, et "respectueux"
? Certainement. Mais quel rapport avec le sujet ? La galerie d'agresseurs révélée par #metoo regorge de mâles jugés adorables par leurs proches. Ainsi, en février 2018, alors que tant de témoignages, depuis bientôt six mois, ont éclairé l'inadaptation de la police et de la Justice à recueillir la parole des victimes, alors que la si utile Association contre les violences faites aux femmes au travail (AVFT) vient de se déclarer en pause forcée faute de moyens, sans que se lève un seul sourcil gouvernemental, les victimes sont aimablement invitées à s'adresser à la Justice ? Bienvenue chez les Bisounours !
Et quand Schiappa, dans la même tribune, accuse la presse de tenter de lui extorquer une réaction sur Hulot, au détriment de tout intérêt pour ses activités de ministre, comment ne pas se souvenir d'une ministre qui, en visite à New York, voici à peine une dizaine de jours, s'était précipitée sur les micros pour intervenir dans un procès ? Une homonyme, sans doute.
Ainsi, même creuse de tout contenu tangible, comme nous l'avons souligné ici, l'opération Ebdo tend un piège redoutable au gouvernement. Comme si l'impact d'un scoop était désormais déconnecté de son contenu véritable. C'est une massue en carton-pâte, mais qui assomme comme une vraie. Et qui n'a sans doute pas fini d'assommer.