General Electric, Saporta : cachotteries et étiquetage

Daniel Schneidermann - - Le matinaute - 44 commentaires

C'est au soir de l'élection, que sortent du bois les petits cachottiers. Ô surprise : General Electric (ex-Alstom) va licencier un millier de salariés, notamment à Belfort, dans l'unité de production de turbines à gaz. La nouvelle est confirmée au lendemain des Européennes. Emoi général, non pas tant lié à la nouvelle, qu'au moment de sa divulgation. Alors secrétaire général adjoint de l'Elysée, puis à Bercy, Emmanuel Macron avait donné un avis favorable à la vente d'Alstom à General Electric (vente-feuilleton, marquée par la prolifération des coups tordus). La nouvelle eût-elle été rendue publique quelques jours plus tôt, elle aurait pu "perturber" le résultat du scrutin. Mais était-elle si bien cachée ? Je retrouve par exemple une analyse de La Croix du 8 mai, faisant clairement état de cette menace. Qui en a parlé ? Qui a repris cette information ?

Carnet rose : au soir de l'élection, la tête de liste EELV Yannick Jadot et la journaliste de RTL Isabelle Saporta officialisent leur liaison (en exclusivité pour Paris Match). Immédiatement, toute la glyphosphère saute sur le scandale : pourquoi Saporta, comme la compagne de Raphaël Glucksmann Léa Salamé, ne s'est-elle pas "mise en retrait" de RTL, le temps de la campagne ? Vaste question déontologique, posée sans réponse satisfaisante depuis l'époque préhistorique Ockrent-Kouchner. Pour en traiter sereinement, il convient de mettre à l'écart toute sympathie politique avec les intéressés. Essayons donc de l'examiner aussi impartialement que si nous avions appris la liaison entre Eric Zemmour et Marine Le Pen, ou entre Dominique Seux et Valérie Pécresse.

Les cas des couples Glucksmann-Salamé et Saporta-Jadot sont-ils comparables ? En apparence, oui. Mais dans le détail, pas totalement. Sur France Inter, Léa Salamé est une intervieweuse. Elle n'est pas censée manifester de préférences politiques. Elle peut être amenée, dans une campagne électorale, à interviewer des concurrents de son compagnon voire, dans l'absolu, son compagnon lui-même. Isabelle Saporta, sur RTL, présente le matin à 7 heures 11 une chronique de parti-pris, notamment -mais pas seulement- axée sur les questions écologiques. A l'écouter, aucun auditeur ne peut douter de son engagement pour la cause. Par exemple dans cette chronique relatant le contentieux entre la préfète d'Indre-et-Loire, et un viticulteur bio de Saint-Nicolas de Bourgueil (je découvre d'ailleurs cette savoureuse affaire), nul ne peut douter que la chroniqueuse prend parti pour le vigneron. Apprendre que Saporta est la compagne de Jadot est donc, politiquement, peu surprenant, et peu susceptible d'avoir frelaté les chroniques de la journaliste. Mais sans doute certains auditeurs, même écolos convaincus, auraient-ils préféré en être prévenus avant consommation. Si j'étais auditeur régulier de RTL à cette heure-là (ce que je ne suis pas) je ne pourrais pas leur donner tort. L'écolo est sourcilleux sur toutes  les questions d'étiquetage.

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