Finkielkraut, Macron, et le groupe Yame

Daniel Schneidermann - - Le matinaute - 101 commentaires

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On s'en serait douté, Alain Finkielkraut n'a pas aimé L'histoire mondiale de la France

, cette monumentale tentative de déconstruction-reconstruction du "récit national" français, coordonnée par l'historien Patrick Boucheron. "Pensez donc, pas une entrée sur l'appel du 18 juin !" Et il n'aime pas particulièrement non plus Emmanuel Macron, "qui est chez lui dans la France de Boucheron". Pensez donc, Macron a déclaré qu'il n'y avait pas de culture française. Il nivelle tout. La preuve ? "A Marseille, il a cité I AM". Mais Finkielkraut prononce "yame". Guillaume Erner, matinalier de France Cutlure, le reprend : "on prononce ayame." Finkielkraut, sans se démonter : "en rap, j'ai beaucoup de progrès à faire".

Tout le monde a le droit de ne pas aimer le rap. Mais ce que révèle cette erreur, c'est que personne, dans l'entourage (familial, professionnel, académicien) de Finkielkraut, tout au long de l'existence quasi-trentenaire du groupe marseillais, n'a apparemment jamais fait sonner le nom de ce groupe à ses oreilles. Ce qui rend Finkielkraut insupportable, ce ne sont pas seulement ses obsessions. C'est une méconnaissance décomplexée, revendiquée, de ce dont il parle, méconnaissance pour laquelle une totale impunité lui est accordée depuis de nombreuses décennies par une partie des medias, au prétexte qu'il en parle avec une éloquence de prophète. Mais Guillaume Erner, vous le saviez bien, en l'invitant, que Finkielkraut ne connait rien au rap, son vieil épouvantail préféré ! Ni à grand chose, d'ailleurs, se forgeant son opinion au jour le jour en lisant les gossips de la presse, comme Trump se forme la sienne en regardant Fox News. Alors pourquoi lui accorder toute une Matinale ? Cette méconnaissance, nous avions eu l'occasion, ici, d'en prendre la mesure, quand nous l'avions invité à venir dégoiser sur les méfaits d'Internet où de son propre aveu, il ne s'aventurait jamais.

Le plus drôle, c'est d'ailleurs que l'internationaliste anti-français et rapophile Macron lui-même s'était planté, en citant I AM lors de ce fameux meeting marseillais, commettant un contresens sur une des chansons du groupe, "nés sous une même étoile". Il se trouve que cette chanson, cinglante dénonciation de l'inégalité des chances à la naissance, dit exactement le contraire de ce que semble résumer son titre (et de ce qu'en avait retenu Macron, en s'en tenant au titre). Rapophiles et rapophobes de postures ont donc ceci en commun qu'ils n'ont jamais écouté une chanson du groupe emblématique marseillais, dont les fondateurs approchent pourtant l'âge de la préretraite, ce qui résume à peu près le débat idéologico-politique français.

IAM,"nés sous la même étoile", capture

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