Egypte, Maroc : pleins feux sur la "galaxie"
Daniel Schneidermann - - Le matinaute - 34 commentaires Télécharger la videoTélécharger la version audio
Essayons d'y voir clair. Le plus terrible, est-ce qu'ils soient invités par les potentats
, tous les potentats de la terre, ou bien qu'ils le cachent ? Les deux s'accumulent. Qu'ils se laissent inviter, est déjà en soi terrible. Certes, chacun dépense ou thésaurise son argent comme il l'entend. L'interdiction de la radinerie, pour les ministres, ne figure pas dans la constitution. Si Fillon préfère consacrer ses économies à refaire la toiture de son chateau de la Sarthe, plutôt qu'à payer ses vacances de Noël, ça le regarde. Mais comment ne voient-ils pas, que cela les place dans la main des puissances invitantes ?
Leurs cachotteries donnent la réponse: ils le voient très bien. Ah, comme ils rasent les murs. Ah, les aveux à tiroirs de MAM ! Et Fillon ! Il faut imaginer Fillon, depuis le début de la tourmente MAM. Il faut imaginer ses dilemmes secrets. Le dire, ou ne pas le dire ? L'avouer de moi-même, ou attendre la fuite, l'inévitable fuite ? Et pour finir par cette débâcle, ce communiqué à la précision faussement médicale, au timing millimétré, alors que Fillon vient de quitter l'hémicycle bruissant déjà de rumeurs et que roulent, fatidiques, les rotatives du Canard enchaîné. Ah comme ils se laissent tous entraîner dans la complicité. Ce matin sur France Inter, Juppé (en substance): Fillon était en voyage officiel en Egypte, il était donc normal qu'il soit pris en charge par les autorités égyptiennes. Ah oui ? Cinq jours à Assouan, et une demi-heure de conversation avec Moubarak pour sauver la face, le joli voyage officiel. Pardon, on oubliait: au cours de ses vacances, Fillon est allé à la cathédrale d'Assouan "se recueillir" pour les coptes victimes d'un attentat (instant de recueillement immédiatement recueilli par un communiqué de Matignon, vive les coptes !)
Les misérables ! Mais si vous avez la conscience tranquille, si tout cela est normal, soyez donc transparents dès le départ. On peut rêver cinq minutes ? Faisons un rêve. Rêvons d'un communiqué de Matignon, aux environs du 20 décembre. "Le premier ministre séjournera cinq jours en Egypte, où il sera l'invité des autorités égyptiennes". C'est tout. Rien de plus. Et idem, pour les innombrables séjours marocains. Vous voyez, on ne demande pas de littérature. Comment ? Qu'entends-je ? Qu'ouïs-je ? C'est de la vie privée ? Votre invitation par un chef d'Etat étranger serait de la vie privée ? (Si si, j'ai bien entendu ça, entre hier soir et ce matin. Un défenseur de Fillon a parlé de vie privée). Et, malheur, misère, jusqu'à Badinter lui-même, révélant à Canal+ que "la galaxie de la politique française" avait été reçue par Hassan II au Maroc. Lequel Badinter, d'ailleurs, accompagnait occasionnellement Mitterrand lors de ses réveillons égyptiens. A quels frais ? Qui payait ? S'il faut déballer, déballons tout !