Des droits de l'homme, de la Grande-Bretagne, et des crimes de guerre
Daniel Schneidermann - - Le matinaute - 56 commentaires Télécharger la videoTélécharger la version audio
Vous avez remarqué comment, aux radios du matin, les nouvelles les plus intéressantes sont toujours données en brèves ?
Encore une. La Grande Bretagne va "déroger à la Convention Européenne des Droits de l'Homme" a expliqué le ministre de la Défense britannique devant le congrès conservateur à Birmingham. Rien à voir avec le Brexit : la CEDH s'applique aux 47 pays membres du Conseil de l'Europe (rien à voir avec l'UE).
La Grande Bretagne, s'exonérer des droits de l'homme ? A noter, précise rapidement France Culture, que des démarches similaires ont déjà été faites dans les dernières années par la Turquie, l'Ukraine, ou la France. On sursaute. La Turquie et l'Ukraine, rien d'étonnant de la part de ces grands débutants en démocratie et droits de l'homme. Mais la France, pays des Lumières ? Vraiment ? Ah oui. C'était après le 13 novembre, dans l'effervescence de l'état d'urgence. On avait déjà oublié. Tout est raconté dans le détail chez nos amis et partenaires de NextINpact.
La Grande-Bretagne, donc, souhaite aujourd'hui éviter les plaintes qui "nuisent à nos troupes, compromettent les opérations militaires, et coûtent des millions aux contribuables", selon le ministre de la Défense, ou encore mettre fin à "l'industrie des plaintes vexatoires" selon la Première ministre Theresa May.
Attention, les plaintes pour torture, pour leur part, continueront d'être examinées. Pas de dérogation pour la torture. Mais alors, de quoi le gouvernement britannique peut-il exonérer ses militaires ? Par exemple, de poursuites pour "entrave au droit à la vie". "Entrave au droit à la vie" : comme ces choses sont joliment dites. Mais dites-moi, la guerre n'est-elle pas précisément faite pour que l'on y commette des "entraves au droit à la vie" ? N'est-ce pas sa définition même ? "Autrement dit, pour meurtre", traduit obligeamment Le Monde (merci Le Monde). Nous y voilà. Un meurtre commis au cours d'une guerre, par hasard, cela ne s'appellerait-il pas un "crime de guerre" ? Mais le terme ne sera pas prononcé. Tout au moins, pas contre nos alliés britanniques par les rares medias français s'intéressant à l'affaire, lesquels le réservent aux troupes ennemies et par exemple, oui, vous avez deviné, aux troupes de "Poutine et Assad", autrement dit de la Russie et de la Syrie, détentrices exclusives de l'appellation, comme chacun sait.
Poursuites soldats britanniques (premiers résultats Google images)