Déploiement matinal, mode d'emploi

Daniel Schneidermann - - Le matinaute - 50 commentaires

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Dans l'affolement, la machine à communiquer fonctionne encore.


Les rouages répondent. Comme à chaque lendemain d'allocution présidentielle, le pouvoir occupe stratégiquement les radios du matin. Hortefeux sur France Inter, le conseiller social de l'Elysée Soubie sur Europe 1, et Fillon en invité spécial sur RTL, se sont déployés à l'aube. Ainsi, mécaniquement, l'opposition socialiste se trouve cantonnée à quelques formules. Elle s'y est d'ailleurs brillamment préparée. "On arrose le sable" dit Montebourg. "Ce sont les miettes du festin des banquiers" dit Hamon. Formules ciselées dans la nuit, et destinées à tirer le meilleur parti des quelques secondes concédées par le déploiement.


Les déployés ont leur feuille de route. Comme à chaque fois, il s'agit d'abord de mener une bataille sémantique dont seuls ses protagonistes discernent clairement les enjeux, certainement considérables. Car la gestion de crise est un art difficile. Il ne suffit pas de prendre des mesures. Il faut aussi éviter de les appeler comme elles ne doivent pas être appelées, et leur coller le plus solidement possible l'étiquette souhaitée. Première consigne de la feuille de route: démentir que Sarkozy aît procédé à des mesures de relance par la consommation. Le jeu consiste à éviter le mot "consommation". "Mesures de justice", proteste Fillon. "Mesures intelligentes de consommation, alors" propose Duhamel sur RTL. Passes d'armes. Sommets de journalisme politique à la française, façon fin du XXe siècle.

Deuxième consigne: désamorcer la critique amorcée dès la veille au soir: Sarkozy n'a pas dit un mot sur la Guadeloupe. Quelques minutes avant 8 heures, Fillon lâche la bombe du matin: il "validera" une proposition d'augmentation des bas salaires "proche des 200 euros" pour la Guadeloupe. Opération réussie: reprises instantanées sur toutes les autres antennes. Sans que personne, d'ailleurs, ne remarque l'étrangeté de la formulation. Pour la Guadeloupe seule ? Et la Martinique ? Et la Réunion ? Et la Guyane ? Et la Nouvelle Calédonie ? Devront-elles attendre des émeutes et des morts ? Précisions à venir, dans la journée.

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