Chut ! La police confisque des couvertures aux migrants
Daniel Schneidermann - - (In)visibilités - Le matinaute - 52 commentaires Télécharger la videoTélécharger la version audio
La police a confisqué des couvertures à des migrants à Paris.
Par grand froid. C'est Médecins sans Frontières qui l'affirme. L'ONG a été avertie par des collectifs d'aide aux migrants. L'affaire se serait produite aux abords du centre de premier accueil, qui a ouvert le 10 Novembre dernier, Porte de la Chapelle, dans le Nord de Paris, et qui est déjà saturé. Ce centre accueillant les résidents selon le critère "premier arrivé, premier servi", les migrants attendent dehors, parfois plusieurs jours de suite. Et selon MSF, "la police a très clairement des instructions pour qu’on ne voie pas trop les migrants. Dans la queue, ils obligent les gens à rester debout, ils ne veulent pas les voir allongés et veulent éviter qu’ils s’installent."
Le ministre de l'Intérieur Bruno Le Roux était interrogé dimanche sur le sujet par les journalistes de RTL et de LCI. Sur le cas particulier, Le Roux ne répond pas. Après le "circulez" réglementaire ("faut arrêter ce sport national de mise en cause des policiers") il ne fournit q'une réponse générale : "ce que font les forces de police, c'est de faire de la mise à l'abri de personnes vulnérables, et ce n'est pas aux policiers de faire la différence sur leurs statuts". "C'est vrai, ajoute Le Roux, quelquefois il peut y avoir une forme de contrainte à mettre à l'abri quelqu'un". Il ne dit pas : "je ne suis pas au courant, je vais me renseigner". Il ne dit pas : "j'ai demandé une enquête, je vous tiendrai au courant". Non.
Donc, jusqu'à preuve du contraire, dans le cas particulier, c'est vrai. Des policiers parisiens, par grand froid, ont confisqué leurs couvertures à des migrants. Ils avaient peut-être de bonnes raisons de le faire. C'est peut-être une manière de les "mettre à l'abri". Peut-être ces policiers étaient-ils accompagnés d'une camionnette qui a aussitôt recueilli les migrants, pour les convoyer vers un foyer agréable et chauffé, avec un thé à la cannelle. Peut-être leur ont-ils rendu les couvertures. Peut-être leur ont-il donné d'autres couvertures. Peut-être n'y a-t-il pas eu beaucoup de cas. On ne le sait pas, puisque le ministre de l'Intérieur, manifestement, n'a pas demandé d'éclaircissements à ses services sur cette affaire précise. Donc, en l'état actuel de l'information, on en reste là : des policiers français, par grand froid, ont confisqué leurs couvertures à des migrants.
Rentrant de week-end après avoir suivi l'affaire sur Twitter, je regarde évidemment le 20 Heures de France 2, dimanche soir. Bien entendu, Delahousse va nous éclairer sur cette affaire. Rien. Pas un mot. Il y a de nombreuses raisons, pour lesquelles ne pas parler de cette histoire de couvertures au 20 Heures de France 2. D'abord, parce qu'il y a d'autres faits d'actualité. La grippe a fait 13 morts dans une maison de retraite de Lyon (3 sujets). Un accident de car a fait quatre morts en Saône et Loire (3 sujets). Un biopic sur Dalida va sortir la semaine prochaine (1 sujet). C'est peut-être pour ces raisons, que Delahousse ne parle pas de cette affaire de couvertures. Pourtant, c'est un twittos frénétique, Delahousse. Toute la soirée de dimanche, il va re-tweeter les tweets de compliments sur son beau prime time sur DSK et les turpitudes du PS (et je vous en informe, même si Delahousse a bloqué Arrêt sur images, qui n'a pas le droit de voir ses tweets). Reste le fait : à Paris, par grand froid, la police a confisqué des couvertures à des migrants, et le journal de la principale chaîne d'Etat n'en a pas dit un mot.