Bourrages d'urnes, petits ouvriers : la révélation de l'évidence
Daniel Schneidermann - - Le matinaute - 54 commentaires Télécharger la videoTélécharger la version audio
Un feuilleton chasse l'autre à rythme accéléré.
Après celui des figurants ouvriers, voici celui des bourrages d'urnes aubrystes au congrès de Reims. Listes électorales falsifiées, consignes massives de fraude: un livre révèle tout. "On ne prend plus de gants, vous bourrez les urnes" aurait lancé le conseiller politique d'Aubry à la mairie de Lille, Guillaume Blanc, à une secrétaire de section lilloise. Une recherche Google sur la phrase vous donnera une idée de l'impact du livre, avant même l'ouverture des librairies. |
Pour une belle opération, c'est une belle opération. Les bonnes feuilles du livre sont en ligne sur le site du Point, deux jours avant la parution de l'hebdomadaire. C'est ici, là, là, et encore ailleurs (je vous laisse chercher). Radios du matin, revues de presse, émissions du soir : le contenu du livre va être passé à la moulinette. Il ne constituera pas une totale surprise pour les @sinautes. Pour ceux qui l'auraient ratée, je vous conseille de vous replonger d'urgence dans notre dernière Ligne j@une de la saison dernière, à propos de la glorieuse fédération socialiste du Pas de Calais. Vous y entendrez décrire par le menu le système des "urnes volantes" dans les votes internes. Manifestement, la collection complète des récits de turpitudes roses était au moins aussi facile à rassembler, que les preuves de fraude dans les récentes élections gabonaise ou afghane.
Les deux feuilletons ont de nombreuses différences. Sur leur gravité respective, chacun se fera son opinion. Mais ils ont un point commun : ils se déroulent tous deux à un point central de l'hystérie médiatique nationale. La personne de Sarkozy, la direction du PS, sont parmi les lieux en France qui comptent la plus grande densité d'observateurs, de commentateurs, d'analystes, de reporters, d'accrédités. Et à chaque fois, il faut attendre, ici un reporter suisse, là un livre paru plusieurs mois après les faits, pour relater ce qui semblait pourtant à la portée de tous les regards (au sens propre, une évidence). Et mécaniquement, la grande machine se précipite sur les révélations avec autant d'appétit, qu'elle en a d'abord mis à les ignorer.