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Hurluberlu
Certes, Berlusconi a été démis non de l'intérieur, par les italiens ou leurs représentants du Parlement, mais de l'extérieur (lémarchés, l'UE, le FMI, etc.). Pour n'importe quel démocrate, c'est une situation inacceptable, et il faudrait donc regretter que l'Italie se soumette aux diktats du Capital contre l'avis du peuple italien, si incongru paraisse-t-il (car en effet, Berlusconi n'est guère un exemple de vertu politique).
Mais —car il y a un mais— c'est oublier un peu trop vite que Berlusconi constitue une véritable anomalie démocratique: c'est un des hommes les plus riches d'Italie, il possède les trois plus grosses télés privées, le principal réseau de distribution cinématographique italien, une boîte de prod. ciné, une autre de prod. télé (endemol), la plus grosse boîte d'édition (livres et journaux) de la Péninsule, et j'en oublie certainement. Théoriquement une telle situation de quasi-monopole de l'information, un si manifeste et gigantesque conflit d'intérêt n'aurait pu exister, encore moins subsister, dans une démocratie saine; mais Berlusconi est apparu en politique en 1994, au moment où tous les partis italiens (démocratie chrétienne, psii) s'effondraient les uns après les autres à cause de l'opération Mains Propres [actuellement, le plus vieux parti présent au Parlement est la Ligue du Nord, crée dans les années 1980]; surfant sur le vieil anti-communisme de la défunte Démocratie Chrétienne, B. a ravi au PCI des élections qui lui étaient pourtant gagnées d'avance. B. a émergé politiquement sur une démocratie malade, en pleine crise politique et morale (la démocratie chrétienne était majoritaire au Parlement sans interruption depuis 1948): mais loin d'être le remède au mal, il ne fut que le symptôme de la déliquescence des institutions —tout en maintenant (grâce à son emprise médiatique) l'illusion d'être l'homme du renouveau [la nullité crasse de l'opposition, infoutue de l'éliminer, n'est pas pour rien dans la longévité dudit symptôme].
Donc, oui, pour un démocrate il est scandaleux de voir un gouvernement légitime démis non par le peuple, mais par les marchés... mais il reste que pour un démocrate, Berlusconi n'aurait jamais pu se maintenir au pouvoir avec un aussi énorme conflit d'intérêt. Aussi, une anomalie de la démocratie (Berlusconi) a été supprimée par une autre anomalie de la démocratie (le pouvoir exorbitant des marchés sous l'ère néolibérale): le choix est cornélien de savoir ce qui est préférable, de la peste ou du choléra.
Il reste aussi qu'il ne faut pas vendre la peau de l'ours avant de l'avoir tué: à chaque défaite électorale de Berlusconi, nombreux furent ceux qui le donnaient fini, et il sut toujours se faire réélire aux élections qui suivirent (au point qu'il est le plus vieux chef de gouvernement du G20, le seul à avoir eu comme homologues Mitterrand et Kohl). Il peut encore faire du mal... -
Djac Baweur
C'est plus fort que moi,ça m'a bien fait rigoler
(vu sur le facebook d'Obey Magazine) -
Bernard
Une dictature est une dictature ! Quelle soit dirigée par le marché financier, le militaire, le politique ou je ne sais quel autre, la population la subit. En réfléchissant un peu et en se rappelant l'histoire émaillée de dictatures, les liens entre l'élite éco financière et l'état major militaire ont souvent été étroits. Un scénario devient évident. Le rouleau compresseur des financiers avance sur les populations aveuglées par leurs gouvernements. L'arrêt sur image devient nécessaire pour comprendre le présent... -
Ornithorynque
La goutte ne remplit pas le vase, elle le fait déborder, cher Daniel.
Les marchés sont très méchants, d'accord. Les marchés sont tout puissants, d'accord.
Le reste de la réalité avait peut-être un peu fragilisé Berlusconi, non ? Et pas seulement sur les marchés. -
emilie bouyer
Ce sont les spéculateurs qui gouvernent le monde. Ceci dit, je suis contente si Berlus disparaît de la scène médiatique. -
Yanne
Je trouve que vous enterrez bien vite la Berlue, et que votre soulagement est bien prématuré.
Il a déjà obtenu un répit de presque un mois, et je ne crois pas qu'il va lâcher comme cela.
L'Italie, c'est sa propriété, et il en a persuadé pas mal d'Italiens. Et tant qu'il aura encore une chance, il tentera de revenir par la fenêtre.
L'Italie est un pays qui est passé dans les années soixante de l'arriération à une richesse indéniable, mais en a connu immédiatement les affres, dans la mesure où sa natalité s'est effondrée. C'est devenu un pays de vieux cons, un peu comme la France. Mais eux ne pensent pas à l'avenir, pas assez d'enfants et de jeunes pour le faire. Ils vivent sur un passé fantasmé de condottieres invincibles et de grandeur naïve.
Et c'est ce que leur offre Berlusconi, sa télévision bling bling pour rêver. Avec pas mal de suggestion politique en plus, et des diktats économiques (consommez, consommez, consommez, de préférence tous la même chose, le monde sera si beau) il faut bien que ça serve à quelque chose, Canale Cinque, Rete Quattro et Italia Uno.
Dans leurs banlieues tristes quadrillées par des centres commerciaux, ils vivent dans les mêmes meubles, portent des vêtements semblables. Leur uniformité fait penser à d'autres temps, un temps où tout était simple, et où tout le monde obéissait au Duce.
La télévision de Mediaset leur raconte une vie merveilleuse, de pin-ups tortillantes et refaites, et de beaux mecs qui agrémentent tous les programmes. Des décors de rêve dont ils sont privés chez eux. Des télé-réalités absurdes leur racontent un monde design et passionné.
Et de plus en plus de violence.
Ils vivent par procuration le médiarêve, et sont chaque jour confrontés à cette réalité uniforme et sans saveur qu'est devenue l'Italie du néo-libéralisme triomphant. Ils se sont persuadés que Berlusconi peut rendre tangible cette idée de l'Italie qui court dans ses émissions.
Je me souviens que l'Italie des années 80, c'était un monde vivant et jeune, prêt à toutes les tentations, une terre que des princes de l'art, du pouvoir et de l'histoire avaient foulé, qui avait cette longue histoire des peuples qui font l'histoire et propagent leur civilisation partout, d'Auguste à Marco Polo, de Vinci à Feltrinelli. Avec des Italiens dont tout dans la manière d'être et d'agir indiquaient qu'ils s'en jugeaient les dignes héritiers.
Puis est venue Canale Cinque et ses programmes si plaisants, si faciles, si fascinants. Le pouvoir de l'image de l'Eglise a laissé la place à celui de Sua Emittenza. Et la dénatalité, et la fin des grandes configurations politiques issues de la guerre, et tout ce que refusent de voir les Italiens, tout ce qui leur est devenu invisible : leur décadence créatrice qui s'est lentement transformée en déchéance, par petites touches inodores, inaudibles, invisibles, indolores.
Mais attention, si vous parlez aux Italiens, aucun ne vote Lega Nord ou Berlusconi. Ils ne le font que dans le secret de l'isoloir. Sans doute, un démon les saisit et leur fait mettre le mauvais choix dans l'urne. Comme dans une histoire de Dario Argento. Un problème de retour du refoulé.
Et croyez-moi, il a encore de beaux jours devant lui, Berlusconi. -
Le fiscaliste
5 sur 5 DS.
Le démocratie, c'est un concept obsolète.Fini les élections, les manifs, les procès, maintenant c'est les spread qui décident. Et les marchés définissent les spread.
Mais au fait, c'est qui...les marchés ? Parce que que j'ai un PV à faire sauté... -
verte
Tellement vrai et désespérant !! -
Germain RITAL
[quote=arnaud romain]: ROLLERBALL. Le film tourné en 1974 se projette en 2018...
Écrit en 1948*, 1984 d'Orwell se projette, lui, en 2050. C'est dire l'intérêt qu'il y aurait à mettre à jour et à se mettre à jour quant au sujet de cette "anti-utopie" qui constitue, avec l' Ubu-roi de Jarry, l'une des deux plus grandes oeuvres politiques de ce "temps des assassins" que "vit venir" Rimbaud.
* 48, soit 84 à l'envers. -
Al Ceste
Berlusconi aura été, avec Mussolini, la pire chose qui soit arrivée à l'Italie au XX° siècle.
Sauf que Duce II est arrivé au pouvoir et s'y est maintenu dans le cadre de la démocratie.
Dit autrement : parce que une majorité d’Italiens l'a soit voulu soit accepté (comme nous avec Sarko, tiens). Ajoutez ceux qui rêvaient d'être comme lui : bling-bling et dingue du cul, vulgaire, malhonnête, ceux que ses combinaziones engraissaient à ceux qui n'ont pas su s'unir pour le chasser du pouvoir et vous l'avez, ce magma qui pue à l’air libre comme les éternelles décharges de Naples. Paiera-t-il tout ça devant les juges ? Même pas sûr.
Le principal champ de ruines qu'il laisse derrière lui est moral. Marcelle Padovani dit bien ça dans le NObs.
PS Bon, maintenant, je vais voter Gavroche. A la différence de voter pour François Papandréou, ça ne me fera pas mal au cul. -
JIEM 92
Bonjour
Pourquoi utiliser le mot "marché", j'utiliserais plutôt le mot "spéculateurs financiers"… des bandits chassent un autre bandit !!!
Autre point sur les bandits : le dérapage du nain Baroin. Dire que c'est lui qui "discute" à haut niveau pour nous sauver. -
Arnaud Romain
La fin n'est point encore écrite.. néanmoins...
Un monde où les "marchés" se substituent, peu à peu, aux instances démocratiques élues par les peuples, un monde où les banques et sociétés transnationales tentaculaires, dans un monde fini, sont condamnées (dans un pur esprit aussi de "too big to fail") à monter au capital les unes des autres afin de se développer, un monde où il faut (comme on le voit monter peu à peu) "du pain et des jeux" au peuple afin que son regard se détourne de l'effondrement graduel de sa souveraineté... ce monde-là, c'est peut-être ailleurs que dans les analyses sociologiques, politiques et journalistiques qu'il faut en chercher l'augure la plus juste et la plus vraisemblable. A ces fins-là, je vous recommande de voir ou revoir le chef-d'oeuvre de Norman Jewison avec James Caan : ROLLERBALL. Le film tourné en 1974 se projette en 2018... dans 7 ans... et dans ce monde-là, les grande capitales ne sont plus capitales de pays, mais les gigantesque "sièges sociaux" de multi-nationales désormais sans concurrence, régnant chacune sur sa "parties du monde". Evidemment, plus besoin de guerres, les peuples sont au pas, et tant qu'ils consomment...! Alors pour nourrir leur violence, les scotcher devant leurs écrans, on leur offre un sport télévisé ultra-spectaculaire, en mondiovision, d'une rare brutalité... un jeu vidéo de chair et de sang. Le système bien huilé se grippe lorsque le jeu accouche d'une star... là où c'est le système et uniquement le système qui doit prévaloir... Le jeu est fait pour lobotomiser, pas pour embraser les coeurs, pas pour nourrir des "passions"... Alors, le "système" des entreprises transnationales tentaculaires se venge...
La fin n'est point encore écrite... mais le brouillon est pas mal avancé... -
MORASSE
Mouais, j'ai voté, mais le coeur n'y est pas... Je pensais que vous alliez nous entretenir des "effractions", qui suivent généralement un coup d'Etat. Nous v'là aux "frasques"... Sans remonter aux mérovingiens, chez nous ça fait beaucoup en deux siècles : 18 Brumaire, 2 Décembre, Juillet 40, 13 Mai... tiens, 13 Mai dont est issu le parti majoritaire (qui ment en se présentant comme issu du 18 juin). Le petit Baragouin devrait retourner prendre des leçons d'histoire. -
tr4nz1t
et du coup même les télés nationales diffusent les images du fameux sourire de merkozy pour illustrer le mépris de c'est deux là envers
berlusconi, alors que certain @sinautes ne voyaient pas comment @si pouvait interpréter ses scène de cette façon.
c'est tellement vrai que: quand on veut tuer son chien, on dit qu'il a la rage. -
Gavroche
Sacré Daniel, qui découvre tout soudain que "la vérité est ailleurs", et que le vrai pouvoir n'est pas dans les mains des politiques, aussi serviles soient-ils...
C'est un peu comme dans les "grandes maisons", quand le petit personnel a fait son temps et n'est plus aussi efficace, on le remplace.
Le pantin Bush a été remplacé par oncle Tom Obama, et le nôtre, l'agité de l'Elysée, sera remplacé, lui aussi, bientôt, par un autre pantin.
Et ça ne changera pas grand chose à l'état du monde.