Au Flunch, la conspiration des Barjols

Daniel Schneidermann - - Investigations - Le matinaute - 83 commentaires

C'est au fond du Flunch de Sarrebourg que les Barjols se sont retrouvés, hier 11 novembre, autour de Denis Collinet. Ils n'étaient pas nombreux : treize membres et deux aspirants Barjols. D'autant moins nombreux que l'un d'entre eux manquait à l'appel. Jean-Pierre Bouyer, qui avait quitté le groupe quelques mois plus tôt, vient d'être mis en examen pour "association de malfaiteurs terroriste criminelle". Il est soupçonné d'avoir préparé un attentat au poignard contre Emmanuel Macron . Ils étaient assez nombreux néanmoins pour attirer l'attention de la spécialiste de l'extrême-droite au Monde, Lucie Soullier, qu'ils ont acceptée sans difficulté autour de la table du Flunch, et qui nous raconte, dès l'aube du lendemain, leur déjeuner de Monsieur et Madame Tout-le-monde, "sans un seul crâne rasé".

Jusqu'à ce matin, les Barjols n'avaient pas fait la Une. Sont-ils les vedettes de la semaine qui commence ? Les Barjols, de prime abord, ne font pas très sérieux. Dans Barjols, il y a barjots. C'est peut-être en réalité pour cette raison que les Barjols ont choisi ce nom. On a de l'humour, au fond des Flunch, entre deux bouffées de haine contre les étrangers en général, et les musulmans en particulier. En outre, ils ne sont pas jeunes, les Barjols. Denis Collinet a 59 ans, et Jean-Pierre Bouyer 62. On voit déjà le film : les papys font de la Résistance identitaire. A l'inverse, le reportage remue involontairement des souvenirs, et des références inquiétantes. Au "fond" du Flunch, ça ne vous rappelle rien ? Le "fond du Flunch". L'arrière-salle. L'arrière-salle de brasserie, vous y êtes ?

Les Barjols, comme de bien entendu, se sont rencontrés sur Facebook. Ca bouillonne sur Facebook. Et comme de bien entendu, Denis Collinet "relaye abondamment", dit Le Monde, les appels au blocage du 17 novembre, contre la hausse du prix de l'essence.  Voici une autre porte d'entrée, pour mes confrères qui voudraient barjoliser cette semaine.

Les Barjols sont opposés aux vaccins qui inoculent "on ne sait quoi" aux enfants, ils pensent que Marine Le Pen a subi des pressions pour rater son débat, et que Coluche n'est peut-être pas mort par hasard. Les Barjols, qui croient tant aux manips, et qui sont au carrefour de quelques hashtags inflammables, sont-ils eux-mêmes le produit d'une manip ? Tout est possible. Il est possible que cette mise en examen opportune ne soit qu'une manipulation policière, destinée à créer, avant les Européennes, un climat de terrorisme brun. Il est possible aussi qu'on ne se préoccupe pas assez de ce qui se dit, le 11 novembre, au fond des Flunch. Toujours est-il que la vigilance est bienvenue. Dans toutes les directions.


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