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Jean-Marc FIORESE
J'interviens très tard dans ce forum, d'autant plus tard qu'aujourd'hui l'émission n'a plus de chroniqueur. Excusez-moi.
Pour commencer, je préfère cette émission en seul à seul entre l'auteur et Judith. J'y vois beaucoup d'avantages que je n'énumérerai pas ici. Disons, pour faire court, qu'ils s'inscrivent dans le rapport de confiance entre les deux personnes rendant la parole de chacun totalement libre.
J'ai lu dans les commentaires que Judith, répondant à l'un d'entre vous, ne souhaitait pas avoir une approche de journaliste. Tant mieux ! Même si certains peuvent-être agacés par le coté professeur de son approche, pour ma part cela me conviens au mieux car elle le fait en restant à sa place de lectrice avec l'expérience d'une littéraire et nous ouvre bien des portes rendant par là l'oeuvre plus accessible.
Enfin, cette façon de mettre à distance l'auteur ainsi qu'elle même et qui découle probablement de cette posture qu'elle a choisie, permet effectivement de maintenir le texte au coeur de la discussion, de soulever mille et une idées qu'il peut provoquer, de le faire vivre, parfois de façon qui surprend même l'auteur (j'ai d'ailleurs généralement observé qu'il en était très heureux.)
Bien sûr, je parle en modeste lecteur que je suis, disons en profane littéraire. Et bien justement, le choix de cette posture de Judith permet à cette émission d'être totalement en dehors de ce que j'exècre : l'entre-soi bourré de complaisance et de coups de coude entendus du style "vous m'avez compris." Judith par son choix est à l'opposé de cela, elle part du même principe que le professeur qui a pour ambition de transmettre : son auditeur n'est pas nécessairement très cultivé mais il est intelligent, quel qu'il soit, il ne peut que s'enrichir. L'auteur interrogé par Judith s'inscrit généralement dans cette idée et participe pleinement à cette transmission, tout ne vient pas seulement de Judith ce qui prouve probablement que cette démarche n'a rien de réducteur, bien au contraire.
Ainsi, je me sens chaleureusement invité avec mes modestes connaissances. Invité à les enrichir, à bousculer mes raisonnements et mes certitudes, à m'interroger plus profondément sur ce que je sais déjà, à découvrir ce que je ne sais pas. Tout cela grâce à la magie de la mise en perspective d'un texte en tant que sujet au sens humain du terme. Le nom de l'émission ne peut être plus explicite.
Cela dit, j'adhère d'autant à ce choix de posture de Judith qu'elle me fait penser à celle du photographe (ma passion) qui, tout en étant à distance du sujet qu'il photographie, le met en perspective à travers toute l'émotion, les interrogations qu'il provoque en lui et qu'il cherche à transmettre. Que ce soit Judith ou un photographe, il y a nécessairement une part de subjectivité dans cette mise en perspective distanciée. C'est cette part indispensable de subjectivité discrète qu'on appelle le style en photographie (à ne pas confondre avec le genre.) On aime ou on n'aime pas le style mais on reconnaît au moins le talent qui donne envie de regarder.
Merci Judith, continuez ! -
Hélène
Judith, je viens de lire votre "réponse aux premières réactions"
je ne suis pas d'accord, je trouve qu'il n'y a rien à faire pour améliorer cette émission ; je la trouve parfaite, je suis captivée du début à la fin.
Continuez le plus longtemps possible SVP !
hélène -
Olivier Beillet Le Béhérec
Bonjour,
Pourquoi ne pas inviter dans votre émission "Dans le texte", Florence de Meredieu qui a publié en mars 2009 "L'affaire Artaud" et bien d'autres ouvrages consacrés à Antonin Artaud ?
Ce serait une émission passionnante comme le sont tous ses écrits.
Il y aurait débat, c'est certain car l'oeuvre d'Artaud fait débat de toute façon.
Bien à vous,
Eva Kefeli-Beillet Le Beherec -
Denis NK
Debray, j'embraye ou je débraye ? (facile :-))
Mystique est-il ?
La Fraternité, la religion.
Un début de XXIième siécle en forme de crise spirituelle et une démocratie déliquescente.
J'ai découvert Mr Debray en lisant un papier dans le Monde sur l'épisode des zozos missionnaires de l'arche de Zoé.
(C'est décousu ... mais je n'ai pas assez dormi et c'est Lundi matin) -
Olivier ANSELM
Que je sois bref et clair : au bout de quatre mois d'éloignement je viens de me réabonner à ASI quasi-uniquement pour accéder à cette nouvelle émission littéraire et, wow, je ne le regrette pas un instant ! Quelle agréable parenthèse d'intelligence et de plaisir autour d'un texte et d'un auteur ! Imparfait peut-être dans la forme mais, au fond, quelle importance quand on sent un si vif et sincère désir de "partage" à la fois subtil et engagé.
Franchement, je viens de découvrir une excellente raison d'être à nouveau fidèle à ASI alors que par ailleurs je n'éprouve plus aucun besoin ni désir qu'on me décortique la médiocrité de médias dont je me suis de toute façon radicalement coupé pour cesser d'en être la dupe (pour être plus franc encore, au bout d'un an d'ASI, j'en avais fini par vouloir à ce site de me faire perdre mon temps en évoquant des gens et des faits dont la bêtise, la mesquinerie ou les faux-semblant m'assommaient littéralement).
Donc, merci Judith, Daniel et toute l'équipe. -
syrreau
j'ai jamais eu l'occasion, alors j'y vais :
_le roi des aulnes , vendredi ou les limbes du pacifique et le reste de Tournier, le vent paraclet aussi (lui qui pense encore que c'est son canard boiteux, j'te jure).Lu lu et relu au moins 5 ou 6 fois chacun.
_Salâmmbo de Flaubert , allez hop , aux barbaresques.
_mémoires d'adrien de Yourcenar _lu 6 fois au moins.
_les aventures d'Huckleburry finn, de mark Twain /samuel Clemens, lu 5 fois , a pisser de rire , j'ai aussi lu le reste et c'est pas très bien écrit, mais huckleburry est un cheffeu d'oeuvre de la littérature américaine, préfigurant le roman moderne.
_zadig de voltaire, le premier paragraphe est une explication a lui tout seul , lu aussi le reste et pareil pas bien écrit (candide par exemple, Brrrrr surement écrit a dos de mulet lors de ses nombreuses fuites en avant.
_la vie devant soi de romain gary /emile ajar lu 4 fois , touchant au possible
_les ritals de Cavanna je le marque a cette place parce que ça me revient a l'instant.
_cent ans de solitude, avec bien sûr l'automne du patriarche, un roman sans ponctuation , on est comme aspiré.
_surveiller et punir de michel foucault, un livre qui met en colère pour le reste de ta vie;
_moby dick de melville, au départ il voulait faire une monographie sur le thème de la chasse a la baleine et ça se sent , c'est un peu casse couille et puis il se met a parler de l'océan et c'est magnifique.
_ mangeclous, solal, les valeureux, belle du seigneur. Comptent pour un seul livre puisqu'ils devaient être publiés assemblés a l'origine et puis bon , au moins 3000 pages, du bonheur ,de la tristesse, drôle , inventif etc etc ....un monument.
_et puis ceux que j'ai oubliés de citer, qu'ils me pardonnent.
c'est a voix basse qu'on enchante
sous la cendre d'hiver
ce coeur, pareil au feu couvert
qui se consume et chante. -
Alain Korkos
J'ai le droit de jouer, moi aussi ? Allez, on dit oui. Alors :
Le Procès de Franz Kafka (et tout ce qu'il a écrit)
La vie mode d'emploi de Geroges Perec (et tout ce qu'il a écrit)
Les vitamines du bonheur de Raymond Carver (et tout ce qu'il a écrit)
Kyoto de Yasunari Kawabata (et tout ce qu'il a écrit)
Le K de Dino Buzzatti (et toutes les nouvelles qu'il a écrites, pas les romans)
Derrière chez Martin de Marcel Aymé (et tout ce qu'il a écrit)
Contes et propos de Raymond Queneau (et tout ce qu'il a écrit)
La Vue de Raymond Roussel
Le fidèle Berger d'Alexandre Vialatte (et tout ce qu'il a écrit)
Tokyo-Montana Express de Richard Brautigan (et tout ce qu'il a écrit)
Zutre, chuis déjà à 10. Pas pu citer Raymond Chandler, Jacques Réda, Junichiro Tanizaki, Sei Shônagon, Michel Butor, Patrick Chamoiseau, et j'en oublie.
Vous noterez que je fais partie du club des dévoreurs d'oeuvres complètes… -
Fan de canard
Remerciements en vrac pour tous les contributeurs ci-dessus pour ce super forum, notamment à Sleepless pour ses références innombrables et Ulysse pour son humour aussi efficace que décapant. Et Alain B. rien pour avoir évoqué les Who :-)
Bon une petite liste d'auteurs qui furent à mon chevet (qui ont chacun écrit du bon et du moins bon, mais je préfère les prendre dans leur globalité). La littérature fantastique prédomine.
M.Z. Bradley
R. Sheckley
T. Pratchett
A.C. Doyle
T. Goodkind
R. Hobb
B. Werber
Homère
J.R.R. Tolkien
B. Lenteric
C. Rochefort
J. Romains
J. Crowley
Il y en a plus de dix, tant pis. Et comme Florence Arié et Sleepless, concernant les auteurs, je ne peux m'empêcher en général de lire leur intégrale quand c'est possible. -
sleepless
Allez, hop, ceux que j'emmènerais sur une île déserte, si...
Et pour faire comme Ulysse, il y a deux pièges.
Au dessous du volcan, Malcom Lowry
Ubik, Philip K. Dick
White Jazz, James Ellroy
Sexus, Henry Miller
Le Monde selon Garp, John Irving
Dans la brume électrique avec les morts confédérés, James Lee Burke
Portnoy et son complexe, Philip Roth
Le Quatuor d'Alexandrie, Lawrence Durrell
La fin des temps, Haruki Murakami
Last Exit To Brooklyn, Hubert Selby Jr
Les miroirs de l'esprit, Norman Spinrad
Correspondance, Groucho Marx -
Ervé
Voici la mienne, de liste, qui a quand même une autre gueule :
1. 1984 George Orwell.
2. Belle du Seigneur L.F.Céline.
3. Voyage au bout de la Nuit A.Cohen
Attention ! Il y a un piège.
4. Si c'est un homme P.Levi.
5. L'insoutenable légèreté de l'être M.Kundera.
6. Des souris et des hommes J.Steinbeck.
7. Les chutes J.C.Oates.
8. Le whisky single malt Helen Arthur.
9. Crime et Châtiment A.Korkos.
Attention ! Second piège.
10. How to shit in the woods K.Meyer. -
Simulink
Felicitations ! et merci pour cette emission. Connait-on deja le prochain auteur ? J'ai cru comprendre que certains voulaient acheter "le" livre avant la prochaine emission :) ben moi aussi :) J'y pensais ce matin, je me disais que l'emission risquait de devenir prescriptrice avant meme l'emission. Ce que je trouve tres fort et preuve que, des la premiere, vous avez apporte un style qui donne envie d'etre intellectuellement avec vous (Si cette facon de parler a un sens).
En outre, Judith ne changez rien a la maniere dont vous intervenez. Je la trouve tres originale et tres agreable.
(pardonnez le manque d'accents, j'ecris sur un qwerty americain :)) -
ANNED
Bravo ! J'avais démarré le visionnage en me disant : "oups ça dure presque 1h... Je ne vais regarder que le début" (je venais de visionner l'émission sur Welcome) et résultat : j'ai été scotchée jusqu'à la fin. Je ne connaissais pas Vinaver et ça m'a donné envie de lire sa pièce. Merci Judith de cette pédagogie et de ces lectures à voix haute. Je ne suis pas particulièrement spectatrice d'émissions littéraires mais celle-ci m'a rappelé "Apostrophes" avec un Bernard Pivot, gourmand des mots.
Bien sûr, il y a des rééquilibrages de parole à faire (mais je vous fais tous confiance pour améliorer ça). Les positions des caméras aussi sont peut-être à revoir (voir l'auteur pratiquement toujours de profil, ce n'est pas très plaisant). Et peut-être aussi "réchauffer" l'ambiance du plateau (c'est un peu froid, les halos de lumière sur le rideau bleu).
Je vais suivre attentivement-curieusement-avec appétit la prochaine émission. -
éloïse
L'émission était très intéressante, et vos interprétations, Madame Bernard, très bienvenues en ce qui me concerne. J'ai trouvé très intéressant la confrontation de votre interprétation et de celle de l'auteur : cela nous rappelle qu'un texte est avant tout décodé par la sensibilité de son lecteur.
Les interventions de Naullau et Ferney étaient bien senties, même si je pense de celles de Naulleau ont plus contribué à la discussion ; Ferney étant peut-être un peu trop dans l'admiration donc dans une tendance à l'éloge.
Mais c'était la première. Je ne doute pas de chacun s'améliorera par la suite.
Bonne continuation ! et ...A très bientôt. -
Francois T
Bonjour
Un peu après-midi, Eric Naulleau, invité sur i-télé (dont le site est tellement mal foutu que je n'ai pas pu retrouver le nom de l'émission) a cité un écrivain français, mort si je me souviens bien dans les années 50, comme étant l'un de ses écrivains préférés, à redécouvrir... Et je ne me souviens pas de son nom...
Quelqu'un aurait-il écouté l'émission et se souviendrait du nom de cet écrivain, SVP ? -
Denis NK
J'ai peur de me laisser dévorer par l'oeuvre ...
Et puis il paraît que j'ai mauvais goût (c'est une mauvaise langue qui le dit).
- Yes he can, i balise -
JYC
Je me permets de poster un nouveau message, car je viens d'en lire un certain nombre qui m'ont déçu et qui sont en contradiction avec ce que j'ai pensé de l'émission.
Les deux chroniqueurs me semblent tout à fait à l'aise avec l'écrivain et la caméra, le "sniper" et le "flatteur", comme je l'ai entendu dans l'émission où ils étaient les invités, et jouent très bien leur rôle de critique : le livre est-il bon ou mauvais ? Quels sont ses points forts ou points faibles ? Est-ce que j'ai aimé ? Est-ce qu'il a trompé mes attentes ?...
Mais ce qui fait la véritable originalité de cette émission, c'est tout autre chose ! Et c'est Mme Bernard qui l'apporte, la "spécialiste", la "technicienne du texte", qui grâce à son expérience de professeur, de comédienne..., rentre dans le texte, circonscrit un extrait, le sent, le hume, et se pose la question fondamentale du comment. Comment fonctionne-t-il ? Sur quoi repose-t-il ? Quelles tensions le sous-tendent ? Quels sont ses effets ? Sans porter finalement de jugement de valeur, mais cherchant un commentaire de la part de l'auteur. Et c'est ce regard neuf, complètement et vraiment déconnecté de la logique promotionnelle, argumenté, qui me semble éminemment précieux.
Dans cette optique, pourquoi ne pas instaurer des rubriques : l'incipit, les images, les clichés et leur détournement... Pourquoi ne pas essayer d'interroger les écrivains, quand cela est conscient de leur part, sur les ingrédients - en employant les termes techniques et en les expliquant au besoin - qui font leur texte ? Observer pour déduire, comme une explication de texte. Car peut-être est-il difficile de dire qui est un bon écrivain, ou qu'un livre est bon. Mais il est plus aisé de se prononcer sur un extrait (qui a bien sûr un rôle au sein de l'économie globale de l'oeuvre).
Je reviens sur la lecture des extraits qui me semble un moment essentiel de l'émision. Elle n'a pas été limpide pour moi. J'aurais aimé un soutien visuel (je l'ai déjà dit) : et en me rappelant cette magnifique incrustation au milieu de l'écran - le titre de l'émission sur la table basse - je me suis dit que ce cadre pourrait être le support du texte lu : imaginez un dispositif à la "24" (je parle de la série américaine) : à gauche, un rectangle avec le visage sublimé de Mme Bernard en train de lire le texte (ou celui d'un autre) ; à droite, un autre rectangle, avec le plateau filmé à la verticale, la table basse au milieu, et l'incrustation du texte lu en plein milieu ! (ça, c'est pour M. Rose)
Enfin, j'aime la littérature contemporaine, mais j'aime aussi la littérature classique. Et si vous choisissiez un auteur décédé ? Vous ne l'inviteriez pas bien sûr, ce ne serait pas possible ! Mais vous pourriez convier un spécialiste, un universitaire, un éditeur, que sais-je ? En choisir des extraits, et vous plonger dans le texte. Pour la première émission de ce type, je vous propose Mme de Lafayette, avec La Princesse de Clèves, et l'extrait du vol du portrait de la princesse de Clèves par le duc de Nemours :
" Il y avait longtemps que monsieur de Nemours souhaitait d'avoir le portrait de madame de Clèves. Lorsqu'il vit celui qui était à monsieur de Clèves, il ne put résister à l'envie de le dérober à un mari qu'il croyait tendrement aimé ; et il pensa que, parmi tant de personnes qui étaient dans ce même lieu, il ne serait pas soupçonné plutôt qu'un autre. Madame la dauphine était assise sur le lit, et parlait bas à madame de Clèves, qui était debout devant elle. Madame de Clèves aperçut, par un des rideaux qui n'était qu'à demi fermé, monsieur de Nemours, le dos contre la table, qui était au pied du lit, et elle vit que, sans tourner la tête, il prenait adroitement quelque chose sur cette table. Elle n'eut pas de peine à deviner que c'était son portrait, et elle en fut si troublée, que madame la dauphine remarqua qu'elle ne l'écoutait pas, et lui demanda tout haut ce qu'elle regardait. Monsieur de Nemours se tourna à ces paroles ; il rencontra les yeux de madame de Clèves, qui étaient encore attachés sur lui, et il pensa qu'il n'était pas impossible qu'elle eût vu ce qu'il venait de faire. Madame de Clèves n'était pas peu embarrassée. La raison voulait qu'elle demandât son portrait ; mais en le demandant publiquement, c'était apprendre à tout le monde les sentiments que ce prince avait pour elle, et en le lui demandant en particulier, c'était quasi l'engager à lui parler de sa passion. Enfin elle jugea qu'il valait mieux le lui laisser, et elle fut bien aise de lui accorder une faveur qu'elle lui pouvait faire, sans qu'il sût même qu'elle la lui faisait. Monsieur de Nemours, qui remarquait son embarras, et qui en devinait quasi la cause s'approcha d'elle, et lui dit tout bas : - Si vous avez vu ce que j'ai osé faire, ayez la bonté, Madame, de me laisser croire que vous l'ignorez, je n'ose vous en demander davantage. Et il se retira après ces paroles, et n'attendit point sa réponse. Madame la dauphine sortit pour s'aller promener, suivie de toutes les dames, et monsieur de Nemours alla se renfermer chez lui, ne pouvant soutenir en public la joie d'avoir un portrait de madame de Clèves. Il sentait tout ce que la passion peut faire sentir de plus agréable ; il aimait la plus aimable personne de la cour, il s'en faisait aimer malgré elle, et il voyait dans toutes ses actions cette sorte de trouble et d'embarras que cause l'amour dans l'innocence de la première jeunesse. Le soir, on chercha ce portrait avec beaucoup de soin ; comme on trouvait la boîte où il devait être, l'on ne soupçonna point qu'il eût été dérobé, et l'on crut qu'il était tombé par hasard. Monsieur de Clèves était affligé de cette perte, et, après qu'on eut encore cherché inutilement, il dit à sa femme, mais d'une manière qui faisait voir qu'il ne le pensait pas, qu'elle avait sans doute quelque amant caché, à qui elle avait donné ce portrait, ou qui l'avait dérobé, et qu'un autre qu'un amant ne se serait pas contenté de la peinture sans la boîte." -
Sogol
C'est mon premier message ici, et j'essaie de m'habituer depuis quelques jours au ton général des asinautes. Mon étonnement quant aux réactions à l'émission "dans le texte" vous paraitra donc peut-être un peu naïf.
Je suis surprise à lire (toutes!) vos réactions car à quelques exceptions près, personne ne semble vouloir poursuivre la discussion de ce qui a été esquissé dans l'émission. Vous ne parlez presque pas de l'oeuvre. Comme je le disais au début, c'est peut-être là un tropisme d'asinaute. Vous décortiquez les images d'une émission qui se veut littéraire. C'est-à-dire que vous la prenez comme un objet d'étude au même titre que ceux qui font l'objet des émissions d'arrêt sur images...
Je suis moi-même une grande dépitée des discussions des oeuvres artistiques, où qu'elles se tiennent. La télévision: superficiel ou complaisant. L'université: spécialiste ou moralisant. La presse: je cherche encore. Bref. Où se tiennent les débats? Où se parlent les oeuvres? Le constat est sans appel: entre la prolifération des oeuvres et la nullité de la critique, je ne vous apprendrai rien en disant que la dimension artistique sent le sapin dans notre société.
Quelqu'un a dit dans le forum que l'émission lui avait donné envie de lire et de voir la pièce. Très bien. Est-ce son but? Pas seulement. Je crois que cela doit ouvrir le débat, libérer la parole, l'imagination de chacun. Et c'est ce que ça a produit pour moi. D'après ce seul critère, je peux dire que c'est une émission réussie.
Pour ne pas faire un message trop long, je vais parler d'un seul exemple. Naulleau demande à Vinaver comment on évite de mettre une intention dans une oeuvre. Je trouve cette question cruciale pour le théâtre et pour la littérature en général. Quelqu'un ici a reparlé de cette notion de procès. (Qui dit procès pense à Kafka. Ce qui est génial chez Kafka, c'est qu'il ne fait pas le procès d'ennemis identifiés, d'un système politique, de personnes, il fait le procès de tout un monde Y COMPRIS le spectateur de ce procès. Il fait le procès de la réalité. Et dans le livre Le procès, il montre sur quelle base fictive la réalité repose. Le tribunal est un tribunal d'opérette. L'être humain part en quête d'un tribunal qui voudra bien le juger pour sa faute.)
Quel est le lien entre une écriture théâtrale et la dimension du procès? Ce qui est central dans le théâtre, en cela je suis d'accord avec Vinaver, c'est la suspension du jugement. Par quel moyen? il l'a dit également: par la polyphonie, la multiplicité des voix. Cette écriture est aussi celle de Dostoievski, celle de Virginia Woolf même si c'étaient des romans. A aucun moment un sens n'est imposé. Ce n'est pas une histoire scénarisée avec un début une fin et une morale à la clé. Ce qui compte, ce sont les images, les voix, les impressions ("les petites touches", dit il). En s'emparant d'un fait divers pour en faire une pièce, Vinaver a semé le désordre dans la narration, a semé le désordre dans l'histoire. Kubrick a procédé de la meme manière pour Eyes Wide Shut. C'est jeter la confusion dans le sens pour qu'émerge autre chose. Autre chose dans l'Ordinaire, c'est par exemple cet étrange rapprochement qui se fait entre l'archaïque, le myhtique cannibalisme et la pointe de la modernité. Manger des enfants. C'est Kronos qui avale ses enfants. Qu'est-ce que la modernité a raté dans la question du temps, de l'histoire, du mythe? Bon. Je jette des choses en vrac.
simplement pour applaudir cette initiative et dans l'espoir que les asinautes continuent leurs analyses d'images mais ne s'arrêtent pas au bord de l'oeuvre. -
ANNE LE POLLES
Merci pour cette excellente émission. J'attends la prochaine avec hâte ! -
alixyz
Je regarde tardivement cette émission et je dois dire que je l'ai regardée après avoir lu les débats qui l'ont suivie.
Je ne comprends pas du tout les débats sur l'omniprésence de Judith, elle a peut être parlé plus que les autres mais je ne l'ai pas remarqué. La parole circule de façon harmonieuse et chacun s'écoute attentivement.
Les interventions de tous sont plus ou moins intéressantes selon que l'on aurait aimé entendre tel ou tel aspect être développé mais cela forme un ensemble équilibré.
La méthode de Judith me semble parfaitement pertinente ; elle propose des analyses dont l'auteur dispose, qu'il complète, affine ou contredit à sa guise...
Enfin je trouve que les éclairages proposés par chaque chroniqueur, selon leur pente naturelle, se complètent parfaitement.
Je ne regrette qu'une chose (c'est un mot un peu fort) c'est que peut-être de texte il manquait... Mais c'est ma pente de prof de français qui m'entraîne à penser que l'émission manque d'analyse au plus près de texte.
Je sais que l'analyse peut sembler prise de tête de loin et ressembler à un truc de spécialistes casse-pied, mais c'est pour moi tout l'intérêt de créer une nouvelle émission littéraire ; qu'elle soit un peu plus pointue que d'autres, n'étant pas soumise à des diktats d'audience...
Pour conclure je dirai que c'est une très bonne émission mais il faudrait faire encore mieux pour qu'elle soit meilleure que toutes les autres, définitivement débarrassée des scories télévisuelles... (je rêve un peu trop de perfection certes...)
A Judith, très amicalement... -
Jean-marc R
Pas du tout fan d'émissions littéraires, ni même de littérature, je suis entré D@ns le texte par pure curiosité, j'y suis resté jusqu'au bout avec intérêt et grand plaisir et j'y reviendrais dès sa prochaine édition.
Merci à Judith Bernard et à toute l'équipe.