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alicesim
Cher Daniel,
Je répondais dimanche à votre chronique en disant que pour une fois, je n'étais pas d'accord.
Je vous invite à lire "EL WATAN" de ce jour .
Vous verrez l'image que cette manif récupérée, a donné de l'autre côté de la Méditérranée. -
PONTEUXIN
La période de Charlie que j'ai préférée est celle où on pouvait lire un édito de Ph. Val suivi qq pages plus loin d'une réfutation en bonne et due forme par Siné ou Cavanna ou d'autres. L'unanimisme de certaines revues est une horreur. On a l'impression d'une armée "je ne veux voir qu'une seule tête!" C'est aussi,comme je l'ai déjà dit un grave défaut des journaux télévisés qui vous disent par avance de quoi vous devez pleurer,rire,vous émouvoir. Il ne manque que les rires préenregistrés!
Passant du coq à l'âne je suis indigné que les journaux agissent comme le terroriste de Vincennes en parlant des "juifs" assassinés. Dans ce supermarché il y a eu 4 PERSONNES assassinées.Peut-être que ces personnes étaient de religion juive mais ce n'est pas sûr. Je doute qu'à l'entrée un cerbère ait exigé un certificat de judéité. Le terroriste,plutôt bas du front pouvait s'imaginer que tout client d'un hypermarché cachère était juif mais quid des faiseurs d'éditos? J'aime manger parfois un bon couscous dans un restau parisien sans pour autant être musulman!
Et j'attends toujours une réponse claire sur ce qu'est un ARABOMUSULMAN. -
Al Ceste
Alors, l'incendie de Charlie-Hebdo?
Ce qui est sûr, c'est que nous sommes tous pour la liberté d'expression, pour le droit de moquer et insulter tous les bigots de toutes les religions. Mais ce qui est sûr aussi, c'est que la rédac de CH a voulu remonter sa trésorerie en rééditant le coup d'il y a six ans : le numéro sur les caricatures de Mahomet s'était vendu à 500 000 exemplaires. Rappelons qu'à la suite de ce scandale clé en main, dans un grand élan, les électeurs du Front national, les intransigeants disciples de Voltaire et les degôche indignés s'étaient mêlés pour assurer d'exceptionnelles rentrées, et Val et sa garde rapprochée s'étaient extrêmement remplis les fouilles à cette occasion, créant un trésor de guerre qui a permis au collègue de Font de partir diriger Radio France avec un joli parachute doré. Le coktail molotov jeté sur Charlie Hebdo tombe à point pour stimuler ce qui était une opération publicitaire assez nauséabonde. L'incendie redonne à Charb et à sa clique une auréole de martyrs, l'assurance paiera, les ventes seront stimulées puisque acheter Charlie Hebdo devient un acte militant en faveur de la liberté d'expression, que du bénef!
Et cette menace islamiste, alors? Ne parlons pas de la Libye, qui est ce que l'intervention occidentale en a fait. En Tunisie, même si les défenseurs de la liberté savent qu'ils doivent être vigilants, les barbus sont encore loin d'avoir le pouvoir d'islamiser la société: il y a trop de points de résistances pour ça, et en particulier les jeunes et les femmes: ça fait du monde. Mes amis de là-bas ne sont pas du tout désespérés, ils sont prêts à la lutte, mais ils n'ont pas besoin que des crétins laïcards excitent les crétins barbus, histoire de rendre tout encore plus confus. Ce genre d'opération publicitaire n'aboutira qu'à exciter les paranoïas et, grâce au relai obligeant des intégristes, à vexer les campagnes profondes, du côté de Sidi Bouzid et de Kasserine, là où la révolution a commencé, en humiliant des jeunes qui se sont, faute de mieux, bricolé une identité musulmanes et des braves gens qui ont la foi du charbonnier mais ne sont pas partisans d'imposer quoi que ce soit à qui que ce soit. Vous me direz, les gens de Charlie ne sont sûrement pas poussés uniquement par l'envie de se faire un max de flouze, ils croient vraiment être à l'avant-garde de la défense de la liberté contre l'intolérance.
Eh oui, il me faudrait le crayon de Charb ou celui de Luz, pour les dessiner tels qu'ils sont: toutes petites têtes et gros estomacs. -
yaniz
Daniel Shneidermann, bonjour, merçi pour votre site et la liberté qu'on y trouve. Je suggère que les médias retirent les bouchons qu'ils ont dans les oreilles. Abd al malik hier soir sur France 2 a osé dire : "les médias sont responsables.ils ne jouent pas leur rôle culturel". En 3 jours, on a vu et entendu à la télé plus de "vrais" musulmans, plus de "vrais" juifs, plus de "vrais" policiers plus de fraternité qu'en 10 ans. Il n'y a pas que Abd Al Malik à le dire. Il a fallu le courage de Valls et de Hollande pour que les choses NON politiquement correctes soient dites et forcent la main aux politiques et aux médias, abasourdis par les évènements. Je reviens sur un point, la formation des journalistes des "main-stream" français, obnubilés par le déclinisme. Ces 3 jours ont permis à des journalistes inconnus, des experts inconnus, des musulmans inconnus de déchirer le rideau des images qu'on nous sert depuis 15 ans, à des français de descendre pour la première fois dans les rues. Et le monde entier nous a suivi, nous a précédé... Si les médias ne donnent pas désormais la parole à la majorité silencieuse, on passera notre temps à "redresser" la France, à coups de mots politiques et d'idéologies dépassées, souvent haineuses. A moins de s'habituer à 17 martyrs de temps en temps. La liberté de la presse c'est bien mais pour en faire quoi...Les seules chaines ce matin qui ont encore le logo Charlie sont des chaines cryptées. Faire famille. Les medias fabriquent une famille, une famille par exemple de consommateurs (égoïstes), par exemple d'électeurs et de consciences (manipulés). Mes enfants m'ont dit hier, la génération d'il y a seulement 4 ans avant nous ne pense qu'au fric et à leur carrière. Vous savez bien que les médias modernes ont un énorme pouvoir de conditionnement de la vraie famille, celle qu'on a entendue et vue ces jours-çi, et aussi qu'ils peuvent s'adapter. Prendre ses responsabilités ! Pour secouer les médias de la famille, il me semble que nos martyrs ont fait le maximum. Musulmans, juifs, chrétiens, forces de l'ordre, peuples du monde, la famille est là. En principe, comme le 11 Septembre ou la chute du mur de Berlin, çà devrait rester un certain temps dans toutes les têtes, ...y compris celles des journalistes. Cordialement à tous. -
sleepless
Avec la famille de Made In Groland, singulièrement oubliée ici (et ailleurs) ? -
ThomasG
J'aime beaucoup le papier mais ce qui me dérange pour notre vision, narcissique et individualiste, que nous avons presque tous c'est que nous n'arrivons pas avec nos grilles de lectures classiques à comprendre ses soldats.
Le marxisme, le libéralisme, le freudo-marxisme et tout ce qui repose sur des déterminants matériels et de plaisir/bien être individuel empêche totalement le sacrifice d'une personne pour une cause qui le dépasse et ne lui apporte pas un gain immédiat.
Si l'on ne cherche pas a comprendre ce modèle qui les a forger cela risque de se reproduire.
J'ai vu une video d'un imam, un des rares à ma connaissance, partagé par une amie qui s’était remis en cause lui et à mis en cause les autres musulmans.
Et nous le peuple français? N'avons nous pas une responsabilité?
Je n'ai vu aucune remise en cause de nos choix militaires de ses dernières décennies qui n'avaient aucun rapport avec les intérêts de la France.
Je me suis rappelé cet après-midi avoir entendu Marie-France Garaud à "ce soir ou jamais" citer Régis Debray qu'" il n'y a pas de société sans transcendance".
Aujourd'hui je pense que c'est sans doute ce qui manque à grand nombre d'entre nous. Cette transcendance à laquelle le peuple va pouvoir se raccrocher pour prendre part à la grande histoire. -
poisson
C'est bizarre, ils sont où mes quarante messages de ces jours-ci. On les a effacé? J'étais pourtant pas time out, je suis sûre, je les ai >envoyés...
Si voyons, mes quarante messages... Où j'expliquais tout tout bien, où mes pensées éparses se rejoignaient, où j'empilais selon une organisation toute militaire, des faits, des raisons, des objections rejetées et sommées de rester derrière la rambarde.
Tout devenaient plus limpide au fur et à mesure des posts. C'est que si on fait un petit effort d'analyse, de décryptage et de synthèse, la situation n'est quand même pas si compliquée. On le voit bien.
Mais si, quelqu'un les a forcément lu, là où je parlais du tube de lait concentré, y'en a encore, y'en a encore, y'en a encore qu'il disait Duduche. Et puis Wolinski il aurait posé sa main sur une feuille et fait le contour, on reconnaissait encore son style entre mille. Dans ce qu'il y avait écrit dans la bulle. Evidemment maintenant j'ai oublié la moitié des trucs que j'avais écrit, et pourtant j'en avais mis des tartines, je kiffe tellement les trucs de religions, les superstitions, les massacres, eh tiens les cathares par exemple on n'en entend plus parler.
Finalement je crois que je ne les ai jamais écrits, ces messages pertinents clairvoyants, 140 signes, 1400 signes, 14 000 signes, des tas et des tas de signes que ça mériterait, des mieux que ce que je lis, que ce que j'écris. Mais ça coince.
Et en même temps que ça coince en moi, ça continue dehors, pas de répit. Ils ont peur qu'on zappe, le story board enchaine les plans, les rebondissements, les flash-backs, on est dans un très mauvais Houellebecq non?, on va vous marcher sur les pieds, arrêt demandé, et on va glisser son livre dans sa poche, "tu me marches sur les pieds et tu lis l'coran" qu'il lui criais en boucle au gars dans le bus. C'est vrai ça à quoi bon faire mine de lire le coran si c'est pour écrabouiller les orteils des bons musulmans assis dans le bus sans s'excuser! -
bysonne
Pas assez de recul, NO COMMENT
Bien contente de ne pas être journaliste (obligé(e) de parler, d'écrire) -
Totorugo
Avec qui ? Mais avec nous ! Nous les Français, les étrangers vivant ou passant en France.
Un homme public (je sais bien qu'il ne trouve jamais grâce à vos yeux, mais bon) a sur ce sujet une formule vraiment extraordinaire sur laquelle on ne s'arrête pas suffisamment : Il faut faire France de tout bois. De nombreuses raisons différentes ont poussé tous ceux qui ont marché, depuis le 7, mais on doit pouvoir les scinder en deux grands pôles très nets : à un pôle, ceux qui veulent faire France de tout bois, à l'autre, ceux qui veulent faire France aux Français, faire France des racines chrétiennes et autres stupidités. À un pôle, ceux qui veulent une France renouvelée de ses différences culturelles, ravie par exemple de ses arabes en raison de la culture richissime qu'ils charrient, à l'autre, ceux qui veulent une France dans laquelle les musulmans ne s'accepteraient qu'à condition qu'ils s'effacent derrière une image mythique, construite et pétrifiée de ce que devrait être un Français. À ces rabougris, qui veulent en quelque sorte refaire famille rance et repliée (celle de la devise pétainiste), s'oppose tous ceux qui rêvent d'être enfin débarassés des injonctions des Finkielkraut, des Zemmour et des Dieudonné, ainsi que de l'injonction que leur fait la mécanique médiatique de prendre parti pour l'un ou pour l'autre, pour celui qui ne voudrait plus de musulmans ou celui qui ne voudrait plus de juifs (ou plus de jeunes, ou plus d'homosexuels...) pour pouvoir faire famille avec n'importe qui - sauf, précisément, avec ceux qui s'opposent à ce qu'on fasse famille avec n'importe qui.
Ceci m'amène à un autre point. Dans les cortèges de Charlie de ces derniers jours comme un peu partout sur le net, on entend sans cesse les mêmes réticences. "Je suis Charlie, mais..."
Première version : je suis Charlie, bien sûr, même si j'étais en désaccord avec son obsession islamophobe, confinant au racisme.
Cette réticence qui fleurit de toutes parts mérite je crois qu'on l'aborde vraiment. Il faudrait vraiment s'interroger sur les raisons qui nous ont parfois conduit à ne plus savoir lire un dessin, d'abord (comment le Mahomet clamant à propos des intégristes "c'est dur d'être aimé par des cons" a-t-il pu ne pas être unanimement défendu, alors que toutes les télés aujourd'hui nous recrutent avec avidité des musulmans qui clament (à raison) la même chose : honte à ceux qui se revendiquent de ce en quoi nous croyons pour faire leurs saloperies ?). Puis s'interroger ensuite sur l'irreligion et le blasphème. Et à cet égard, je pense depuis longtemps que le terme d'islamophobie est un piège dans lequel il n'aurait jamais fallu tomber. L'Islam est une idée, un ensemble d'idées, et on peut moquer une idée comme les symboles qui la représentent, on n'a même si ça nous fait plaisir le droit de la détester. En revanche, discriminer ou persécuter quelqu'un à raison de ses croyances (de ses idées, de son orientation sexuelle...) est détestable, mortifère et interdit. Or nous en sommes là : à devoir rappeler d'aussi banales évidences. Est-ce pourtant si difficile de tenir deux choses à la fois ? De tenir d'une part que les musulmans sont depuis quelques années en France stigmatisés mais même, dans bien des cas persécutés, et que cela est intolérable - et qu'il faudra faire savoir avec plus de virulence que nous ne supportons plus d'entendre des antennes saturées de Rioufol et de Le Pen, ni de lire les torrents de haine de Riposte laïque. De tenir de l'autre qu'une idée n'est qu'une idée, et que ses symboles n'engagent que ceux qui croient à cette idée, que par surcroit ils sont immatériels et qu'on est en droit de leur faire subir les derniers outrages, même dans le plus parfait mauvais goût. Qu'on soit taxé de con, de gros lourd, de pas fin, de pompier, mais pas de raciste, pas d'islamophobe, pas de "cathophobe", etc. (votre vite-dit de ce jour est à cet égard édifiant, puisque le titre évoque des caricatures "anti-cathos" : elles ne portent pas atteintes à des personnes à raison du fait qu'elles sont catholiques, elles s'attaquent à tourner en ridicule les symboles d'un ensemble d'idées qu'on a, au fil de nombreux siècles, constitué en un ensemble baptisé christianisme).
Voici alors le deuxième argumentaire des Charlie-réfractaires, celui de la "responsabilité". Je le trouve, recommandé hier sur le fil Twitter de l'atterré Philippe Marlière (pour une fois atterrant), sur une page de l'Union Juive Française pour la Paix (ujfp). On y lit entre autres ceci : "Peut-on imaginer des caricatures émanant de journaux progressistes critiquant la religion juive pendant les années trente au moment de la montée de l’antisémitisme et de la persécution des juifs ? Et nous ne parlons pas ici de caricatures antisémites de l’époque mais de caricatures critiquant la religion juive". On reconnait donc dans ces lignes la différence entre stigmatisation d'une population à raison de ses croyances et droit au blasphème ou à l'irreligion, simplement on juge son exercice en quelque sorte inopportun. Caricaturer les symboles de l'Islam en période de sale temps pour les musulmans de France, ça aurait été de la part de Charlie Hebdo aussi inopportun que de caricaturer les symbole du Judaïsme dans les années 30. Diable, que l'art du comparatisme est périlleux... Vous ne voyez rien qui cloche, vous ? A-t-on jamais eu vent, en période de lente accession au pouvoir des nazis, de crimes et d'attentats commis régulièrement de par le monde au nom du Judaïsme ? Euh... Ah non. Les caricatures de Charlie et d'ailleurs sur l'Islam ne viennent pas de nulle part. Elles sont un commentaire (qu'on pourra juger pertinent ou raté) d'un phénomène réel : des crimes répétés sont perpétrés à de nombreux points du globe par des organisations ou des individus qui se réclament de l'Islam. Il ne s'ensuit pas (sauf pour les mal-comprenants volontaires) que quiconque se réclamant de la foi musulmane soit criminel ni suspectable de sympathie pour les criminels - ni même qu'il soit tenu de se "désolidariser", demande écœurante en vogue dans la zemmourofolosphère comme dans celle de la pujadosphère. Mais il y a bien des attentats récurrents commis au nom de l'Islam (comme il y en a en d'autres noms, et comme il y en eut des milliers dans le passé à des noms divers). Y eût-il eu des crimes récurrents commis par des assassins se réclamant du Judaïsme, au même moment où montait la persécution des Juifs en Europe dans les années 30, qu'on ne voit pas ce qui se fût opposé à ce qu'on en caricature les symboles - fût-ce, avec peu d'imagination et pas d'humour comme dans les dessins du Jylland-Posten, par des bâtons d'explosifs dans les papillotes. Bref, cette comparaison m'interroge. Car quel peut être son intérêt ? Je vous demande votre aide. Pour ma part, je vois surtout ce qu'elle produit : il va redevenir problématique d'être irreligieux, problématique de critiquer voire de conchier une religion, parce qu'on aura voulu nous persuader qu'en disant du mal de l'idée religieuse et de ses symboles, on portait atteinte à des personnes.
J'en viens donc au troisième registre des "Charlie-mais". Il consiste à dire : oui, je suis Charlie, bien sûr, même si je ne le lisais plus depuis longtemps et que je n'étais pas d'accord avec ses idées. On en a eu une démonstration dans l'émission d'@si, où dominait le crédo : "Ah, le Charlie d'avant Mitterrand, ça oui ! Mais au-delà, rien à garder", et qui d'évoquer Duduche, mon Beauf, Paulette et compagnie. Bien sûr, il y a eu l'insupportable règne de l'odieux Val, et son empreinte effectivement détestable. Mais sauf votre respect, Alain, Daniel, Didier, ce n'est pas tant cela qui est ressorti des pincettes que vous avez prises à l'égard de ce qu'est Charlie Hebdo, que le souvenir douloureusement nostalgique de votre culture de jeunesse. Or il faut parler du fond. Il n'est pas vrai du tout qu'après l'âge d'or unanime d'Hara Kiri et Charlie Mensuel, Charlie Hebdo se serait vidé de toute irrévérence. Il me semble qu'on devrait se poser une question qui pourrait ressembler à cela : comment se fait-il que nous ayons cessé de regarder Charlie Hebdo comme subversif ? Certes, il y a la grosse pilule de la dictature Val, et de ses éditos enthovéniens péremptoires, grandiloquents et creux (à ce propos, il faut lire l'article assassin que consacre Philippe Lançon, dans le Charlie du jour de l'attentat, au marquis d'Enthoven - Val, s'il l'avait lu, aurait peut-être ravalé ses pleurs), dictature dont le point d'orgue fut l'affaire Siné. Mais ça n'est pas suffisant, comme explication, à mon sens. Car à bien y réfléchir, le contenu de Charlie était loin d'être creux. J'ai pour ma part (puisqu'on en est aux souvenirs) été convaincu à la cause palestienne par des "Charb n'aime pas les gens", j'ai connu mes premiers émois anticapitalistes dans les lignes d'Oncle Bernard, acquis un antifrontisme chevillé au corps dans "Les Mégrets gèrent la ville" de Luz, entamé mes premières réflexions métaphysiques (non achevées à ce jour, je le confesse) à l'aune des adresses de Cavanna aux culs-bénits, appris à décrypter une image publicitaire avec Gérard Biard, développé une curiosité inattendue pour la science avec Guillaume Lecointre puis Antonio Fischetti, sans parler des multiples conseils de lectures prodigués par les uns ou les autres. Autant de choses qui ne datent pas de Choron, Droit de réponse et Bal tragique à Colombey, qui ont même été souvent concomitantes avec le désastre Val. Pourtant, Charlie a fini par être plus ou moins ostracisé, ou plutôt ignoré. À @si, puisque c'est votre métier, vous pourriez peut-être aller voir combien de fois, depuis la fin du règne Val, des révélations de Charlie ont été reprises par des confrères (il y en avait, pourtant, notamment dans les enquêtes absolument remarquables de Fabrice Nicolino ou Laurent Léger). Je gage qu'il y en aura peu, tant il me semble que le journal a peu à peu été mis comme en quarantaine. On savait qu'il existait, mais ça n'avait plus vraiment d'existence réelle. Quand il donnait des signaux, à l'occasion de quelques polémiques autour de la religion (l'Islam avec les caricatures, le Catholicisme à l'occasion de Golgotha Picnic, Piss Christ ou la manif pour tous...), on l'ouvrait vaguement, avec une certaine indifférence et le sentiment de ne plus avoir très envie, ou besoin, d'en rire. En somme, tous ces curés qui s'enculaient encore à la queu leu leu il y a peu chez Cabu, on avait fini par se dire qu'il n'étaient plus de saison (has been, inutiles, humour à pépé). Ce Saint-Esprit qui sodomisait gaiement le fils de Dieu pour rire d'un Mgr Vingt-Trois hostile au mariage gay, il ne nous faisait pas nous tenir les côtes. On se disait, comme Judith l'a suggéré dans l'émission, que la religion ne représentait plus la même chose dans notre société que dans celle du général De Gaulle (et à fortiori dans celle de Voltaire), et que c'était un peu un humour d'arrière-garde. Aujourd'hui, ne devrions-nous pas prendre conscience que ces curés, ces Christ, ces prophètes, ces rabbins, tournés trivialement en dérision étaient des garde-fou que nous n'aurions jamais dû perdre de vue. N'avons nous pas baissé la garde, exactement comme nous l'avons baissée pour tant d'acquis sociaux (qui portent si mal leur nom, puisque précisément, ils ne sont jamais acquis - qui eût cru il y a 50 ans qu'au siècle suivant, la plupart des gens auraient intégré le fait qu'il faille travailler plus longtemps ?). Non, la liberté que nos prédécesseurs ont conquise à l'égard du religieux n'a jamais été acquise, il faut l'acquérir chaque jour. Cette liberté, c'est une timeline de compte Twitter : si on ne l'actualise pas sans cesse, elle n'a pas de réalité.
Cette comparaison me pousse à conclure de la sorte. Je dois reconnaitre que moi aussi, je m'étais un peu éloigné de Charlie ces dernières années. Oh, pas pour des raisons de suspicions racistes ou "islamophobes", puisque le mot s'est imposé (voir plus haut). Mais plutôt, je crois, parce que le rythme hebdomadaire m'a bientôt paru ne plus convenir au contenu. Le plus flagrant : les brèves. Nombreuses dans Charlie, elles devenaient moins savoureuses, précédées des milliers d'autres tout aussi bonnes qu'on avait pu lire depuis le mercredi précédent, en particulier sur Twitter, où culmine l'art de ridiculiser la sortie de tel ou tel personnage public. Comment rire le mercredi d'une connerie de Morano prononcée un jeudi précédent, et ridicutwittée et retwittée mille fois dans le jour même ? Autre problème, corollaire, je crois. Charlie n'a pas su ou voulu se transformer suffisamment, et pour ma part, je crois éprouver le besoin, désormais, que "mon" journal soit aussi un peu un réseau social, qu'il soit un peu à moi, à nous, ou du moins qu'il en ait l'air (ce que Mediapart a merveilleusement concrétisé, qu'@si fait assez bien - mais sans équivalent véritable, malgré le présent Forum, au Club de Mediapart - et que Hors-Série est en passe de manquer regrettablement). Je crois avoir besoin d'avoir besoin de mon journal. Besoin de l'ouvrir à toute heure de la journée, dans un creux, un temps mort, une pause pipi, plus ou moins en cachette dans une soirée un peu bof chez des copains, ou méthodiquement sur un sujet précis, avec concentration, besoin de savoir régulièrement ce qu'il s'y dit de neuf ou de vieux, de sentir ce qui s'y passe. Tout cela, d'évidence, fait défaut à Charlie.
Bref, en cette période où nous sommes si nombreux à être Charlie, on rêverait que bientôt, Charlie soit un peu plus nous, et qu'il se réinvente sous une forme plus en phase avec nos attentes contemporaines et numériques. Mais depuis le 7, on sait aussi que nos attentes n'avaient pas toujours raison, et que ce qu'on avait fini par croire périmé était une condition discrète mais indispensable de possibilité à "faire famille" avec n'importe qui (sauf, je le répète, avec ceux qui s'opposent à notre désir de faire famille avec n'importe qui, et avec notre conviction qu'il n'y a d'ailleurs pas d'autre façon valable de "faire famille"), et que, loin de "souffler sur les braises" (selon les termes de la triste doxa actuelle) Charlie désamorçait, si j'ose dire en ces temps bombés d'attentats, la pesanteur de nos conflits intra-familiaux... -
Marc Delhalle
Les gens qui n’ont pas été au rassemblement et le disent bien fièrement en ironisant sur le caractère moutonnier de ceux qui y sont allé préfèrent abandonner des combats justes plutôt que de se retrouver à côté de gens qu’ils ne veulent pas fréquenter. Surtout restez bien chez vous dans votre fauteuil à distribuer les bons et les mauvais points et à nous dire ce qui est bien ou mal. -
Robert·
"A quoi m'engagent ces mots, je n'en ai pas la moindre idée."
Être dégradé en sergent ? -
Tert
Je ne suis pas d'accord avec les conclusions auxquelles conduit fatalement le texte de Daniel. Parce que c'est d'un ''texte'' qu'il s'agit, au sens littéraire de ce terme, et c'est le problème. C'est un problème parce qu'un tel texte écrit manifestement à l'émotion n'est pas une analyse, c'est une œuvre, une création, une expression sensible, ça peut même être beau [et Daniel écrit bien, ce n'est pas la question], mais ce n'est pas une analyse. Bon, il a le droit, Daniel, d'être ému, beaucoup le sont et j'en fais partie, mais la littérature [sauf à être très fort, et c'est rare] entraîne aux excès d'émotion, et l'émotion est mauvaise conseillère et c'est pourquoi je ne suis pas d'accord, mais alors pas du tout, avec les conséquences qui découlent nolens volens de cette chronique publiée ici par Daniel qui sont autant d'arguments pour un Patriot Act à la française.
Pour être précis (parce que le sujet est grave et ça mérite d'être tiré au clair, parce que si @si se met à conforter si peu que ce soit une réponse bushiste [il faudra dire Vallsiste pour la version française], ce sera sans moi les ami.es], voici les points qui font problème :
1. Selon Daniel ces trois gugusses seraient des ''soldats''.
2. Ils ne le sont pas devenu parce qu'ils auraient manqué d'affection (comprendre : parce qu'ils auraient eu une jeunesse difficile dans des conditions dont nous ne voudrions pas pour nos propres enfants) mais parce que... tiens, c'est vrai, Daniel ne nous dit rien de pourquoi et comment ces trois personnes sont devenues les consternants meurtriers qu'on sait.
3. L'État nous a sauvés et même s'il a tendance à abuser de son pouvoir (dixit Daniel et il a bien raison de le rappeler) il faudrait tripler ses moyens de police (comprendre : augmenter ses effectifs de renseignement, ses capacités et ses POUVOIRS de contrôle et d'investigation et de surveillance, et... n'en jetez plus)
Alors procédons méthodiquement : Pour le point 1, non ces trois blaireaux sanguinaires, ces pieds nickelés du Jihad (avec tout le respect dû aux vrais pieds nickelés de René Pellos), ces abrutis qui sont à la théologie et à la spiritualité de l'Islam ce que je suis à l'astrophysique (c'est-à-dire une burne) ne sont pas des moines-soldats mais des paumés. Si vous avez un doute relisez le verbatim partiel des déclarations de Coulibaly enregistrée par la radio RTL - cf. le ''Vite Dit'' publié par la rédaction de @si le 10/01/2015 à 11h38. Ce type est paumé. Or les soldats (au sens vrai du terme) y compris ceux des armées irrégulières, ne sont certes pas des génies, mais leur situation est toute différente (encadrement opérationnel strict, entraînement qui va au-delà de cinquante séries de pompes, etc. C'est-à-dire quelque chose de très éloigné de ces trois malfaisants qui, entre nous, sur un plan strictement tactique, militaire, sont des incapables, et leurs "performances" le montrent amplement, désolé de casser le mythe, et ça restera vrai même s'ils ont fait malheureusement un carton dans la rédaction de Charlie).
Le point 2 met Daniel en contradiction avec ce qu'il dit plus loin dans sa chronique : Daniel dit d'abord que ces sombres gugusses ne sont pas le produit d'une "enfance malheureuse" puis il enchaîne en écrivant que la réponse « c'est l'État. Les profs, les éducateurs, les travailleurs sociaux, qui permettront peut-être d'éviter d'autres destins de Kouachi ou de Coulibaly, et dont il faudrait, pour le coup, quintupler les effectifs ». A ce stade je suis perplexe sur la cohérence du propos. Notez, ce n'est pas le fait d'augmenter les moyens de l'éducation et du secteur social qui me gêne, au contraire, (à condition de muscler simultanément une vraie politique de redistribution des richesses qui seule pourra faire disparaître les zones de relégation d'où sortent ''nos'' apprentis jihadistes français qui ont cette particularité vis-à-vis de leurs homologues européens). Mais bon, je m'interroge sur la solidité du raisonnement de Daniel ici, puisqu'il y a manifestement contradiction entre les prémisses qu'il énonce et la conclusion qu'il en tire.
Quant au point 3, alors là je m'inquiète beaucoup et je me dis que Daniel doit être bouleversé et qu'il a les yeux brouillés de larmes, moyennant quoi sa plume part dans le décor. Ce que je peux comprendre parfaitement, enfin, je crois le comprendre mais on n'est jamais sûr de rien tant qu'on n'a pas été soi-même touché dans sa chair, ou dans ses amis, ce qui revient au même, comme c'est manifestement le cas pour Daniel, ce qui est parfaitement honorable et tout ça, et je ne vais pas lui jeter la pierre. Mais bon, je veux juste dire qu'en écrivant, fût-ce sous le coup de l'émotion, qu'il « faudrait doubler, tripler les effectifs » et donc les capacités des services de renseignements, et l'écrire en ce moment précis où les Valls, les Bauer et les imbéciles du calibre d'un Cazeneuve ou d'un Wauquiez ou même d'un Baroin, appellent plus ou moins explicitement, et pour certains très explicitement, à un « Patriot Act » à la française (comme on pouvait le prévoir sans être grand clerc...), je me dis que Daniel devrait, s'il le peut, se réconforter avec les amis qui lui reste, je lui souhaite d'en avoir encore beaucoup et des bons, puis de se ressaisir rapidement sinon il risque de basculer dans un fossé mal fréquenté par des néocons et des réac plus ou moins faisandés (cf. Onfray dont Daniel parle aussi dans son texte...), où il n'a manifestement pas sa place et dont il lui sera très difficile de sortir. S'il en sort jamais.
Oh et puis merde ! Vous le saviez que cette situation se produirait. Inévitablement. Ne serait-ce que parce qu'on ne ne peut pas indéfiniment « exporter la démocratie » dans des soutes à bombes sans recevoir des éclats.
Nous le savions. Daniel le savait. Les mecs de Charlie le savaient (c'est moins sûr pour les flics et les autres victimes de ce massacre).
Alors, oui, ça fait mal. Oui, se dire « Cabu est mort », « Wolinski est mort » ça tord le cœur. Et la mort des autres aussi fait très mal.
Mais si on est fidèle à ce qui nous les a fait aimer, il faut aujourd'hui, au minimum, ne rien faire pour faciliter si peu que ce soit les projets politiques qu'ils ont toujours combattu.
Et vous le savez aussi bien que moi.
Alors Daniel, tu es gentil, tu prends une cuite avec tes amis, avec tes amours, et après la gueule de bois (bon, celle-là ne passera jamais tout à fait, tu le sais, on le sait, parce que ça s'applique à nous aussi, hein), tu essuies tes larmes, sinon tu vas filer un mauvais coton.
Et ça serait dommage que ces trois paumés, ces blaireaux sanguinaires, ces trois malheureux jeunes gars quand même aussi un peu hein, allongent post-mortem la liste de leurs exploits en t'ajoutant à leur victimes.
Voilà ce que j'avais à vous dire. -
liftt123
je voulais dire un truc pas forcément spécifique à ce forum:
Il y a une petite gueguerre entre d’une part les “antiracistes” et la "gauche de la gauche” (Plenel, Les Indigènes de la république, YaBonAwards, NPA,...) et d'autre part Jeannette Bougrab et un mec qui a écrit un édito dans le monde et j’imagine plein d’autres qu’on peut facilement imaginer (Fourest,...).
Les uns (Plenel, PIR,...) accusent les autres d’être responsables des morts de cette semaine pour cause de climat islamophobe et les autres (Bougrab,…) accusent les uns d’être responsables parce qu’ils (les anti racistes) ont accusé CH d’être islamophobe.
Perso je pense que les 2 points de vue sont assez débiles dans la mesure où je ne pense pas que des gens qui en massacrent d’autres puisent leurs motivations dans les facteurs qui sont évoqués par les 2 camps.
Mais par contre je trouve que le fait de faire cette accusation débile est particulièrement incriminant pour un camp, Plenel & PIR & Co:
Les faits:
1. Ils disent que les islamophobes sont responsables des massacres à cause du climat qu’ils ont créé
2. Avant les massacres ils rangeaient Charlie Hebdo dans le camp des islamophobes
Par conséquent:
===> implicitement mais implacablement ils disent "Charlie Hebdo l’a bien mérité” et ceci tout en se mélant au concert de pleurs....ces clowns ne sont pas plus malins (et même moins cohérents) que les gamins de banlieue qui ne veulent pas respecter la minute de silence... -
Salvador De Bahia
Bravo pour ces lignes fortes et pas nécessairement consensuelles sur ASI.
Merci pour cet effort de déminage des sentiers semés de mines mais qu'il faut bien emprunter malgré tout. -
Daniel Schoen
A propos du mot « ennemi »
« Moi-même, je ne vois évidemment pas bien vers quoi ce mot m'entrainera »
Mais pourquoi se laisser entraîner par un mot écrit sur le coup de l’émotion ? Même un intellectuel professionnel (que je respecte énormément) a le droit de se déjuger et de reconnaître qu’il a écrit une bêtise.
Il serait dommage de se laisser prendre dans la spirale du « oui, j’ai écrit ce mot et je l’assume car » et de construire tout un argumentaire uniquement pour rester cohérent avec un mot.
Par ailleurs, je remercie M. Schneidermann du travail de décrassage intellectuel qu’il accomplit tous les jours. -
PatriceNoDRM
Apparemment, Sahaeddine Mezouar (le chef de la diplomatie marocaine) s’est bien rendu à Paris ce matin mais n’a pas pris part à la marche "républicaine". Hier un communiqué du département des Affaires étrangères, tout en se déclarant solidaire avec le peuple français, précisait qu’ «au cas où des caricatures du Prophète- prière et salut sur Lui- seraient représentées pendant cette marche, le ministre des Affaires étrangères et de la Coopération ou tout autre officiel marocain ne pourraient y participer». (source : http://www.yabiladi.com/articles/details/32510/maroc-mezouar-present-paris-mais.html).
Comme l'a très justement déclaré Luz : «Charb, Tignous, Cabu, Honoré, Wolinski [...] auraient conchié ce genre d'attitude».
Putain, ils vont nous manquer ces cons... Siné, déconne pas, attend un peu pour mourir.
PatriceNoDRM
P.-S. : il n'y a bien entendu plus de Charlie Hebdo en kiosque, mais il reste plein de Siné Mensuel !! N'attendez pas que Siné se fasse buter pour l'acheter ! (le dessin de Berth en hommage à CH) -
Bruanne
mal placé -
liftt123
OMG!!!!
DS est dans mon émission préférée sur les médias pour parler (in english) de Charlie Hebdo: On The Media -
Compunet
pour tous ceux qui militent encore et toujours pour la liberté d'expression, pourquoi ne pas, en ces jours de deuil, soutenir Siné Hebdo, le dernier empêcheur de gouverner en rond !!
Faites un don à Siné Mensuel !... -
David Malka
Depuis mercredi tout bourdonne dans ma tête.
J'écoute la radio, je lis les articles, ceux des pour, ceux des contres, et heureusement, ceux, majoritaires, de ceux qui se sentent impuissants.
Et puis je vois, sous mes fenêtres, la fourmilière, de l'occident, qui se raffole, dans tous les sens, qui marche pendant, que tous ses murs, s'écroulent d'eux-mêmes, silencieusement.
Et dans ma tête, bourdonne toujours, ce grondement, plus qu'obsédant.
Et j'entends comme, une sourde ruche, qui me susurre, presque en riant.
Ne t'en fais plus, ne t'en veux plus, ferme les yeux, chante en fuyant.
Je suis Maya.