-
EdC
Je relève quelques approximations et omissions militantes.
- D'abord, le chiffre de 150 morts et peut-être 200 morts pour la journée du 17 octobre. C'est la deuxième fois que Larrère cite sur ce site ASI ces chiffres trop gonflés. Le vrai chiffre n'excède pas 100 morts pour la journée du 17 octobre. Voir par exemple cette synthèse de rue89 (Pascal Riché).
- Il est vrai qu'avant le 8 mars 1962, les manifestations Algérie françaises étaient peu réprimées, mais le 26 mars 1962, il y a quand même eu le fusillade de la rue d'Isly (80 morts).
-L'"Historienne" Larrère cite à maintes reprises le "collabo" Papon, mais pas une seule fois le chef de l'état, un certain Charles de Gaulle, qui a désavoué Papon lorsque ce dernier proposait d'autoriser la manifestation.
- Alain Dewerpe, fils de Fanny Dewerpe, l'une des victimes de Charonne et historien de profession a confirmé en tous points, en 2006, l'étude de l'historien Jean-Paul Brunet publiée en 2003 (Charonne, Lumières sur une tragédie ).
- Il y a au moins un journal qui n'était pas de gauche et qui critiqua ouvertement la Police, c'est France-Soir, le plus gros tirage des quotidiens français de l'époque.
- Les mots d'ordre des organisateurs étaient pacifiques, mais il y a eu un secteur où des "éléments incontrôlés" ont agressé la police, une heure avant la charge de Charonne. (C'est la raison pour laquelle les journaux de droite insistaient sur Beaumarchais)
Toutes ces rectifications ne contredisent pas le fait que le policier de 1962 tapait de bon cœur sur les communistes -
Raminagrobis
Merci Mathilde excellent comme d habitude. J'en profite pour parler d'un de tes collègues historien Johann Chapoutot qui vient de sortir un livre "Libre d obéir" il met en lien la dictature ( j'ai regardé la définition dans le dictionnaire je vois pas d ) bienveillante de Jupiter avec le management Nazi d'un certain Reinarth Höhn (général SS mort dans son lit à 94 ans). C'est troublant... alors avec Mathilde qui nous rappelle Charonne en 1962. Encore une étincelle...
-
IT
Du coup question, qu'est-ce que "Charonne" aujourd'hui dans ces journaux de droite ? Est-ce qu'il y a aujourd'hui consensus sur les événements et responsabilités, est-ce qu'il y a eu établissement d'une mémoire officielle et acceptée, ou est-ce qu'il y a encore deux mondes et deux récits parallèles - comme par exemple en Grèce avec le révisionnisme de l'extrême-droite (actuellement au pouvoir) vis-à-vis des Colonels et des affrontements de Polytechnique ?
-
rirette guillermard
Je m’attendais à ce que la chronique de Mathilde Larrère amène des souvenirs de participants à Charonne et/ou à l’enterrement des victimes. Je me réjouis de la relative jeunesse des débatteurs d’ASI et que beaucoup marquent leur « découverte » des faits et le grand intérêt pris à l’écoute de la chronique.
Je n’étais pas aux manifestations le jour de Charonne, passant un examen en Fac ce jour-là. Par contre j’ai vécu l’immense émotion de l’enterrement des victimes. Mais surtout je voudrais témoigner de ce dont parle la chronique, les méthodes policières déjà à l’œuvre lors des manifestations précédentes et dont la tuerie de Charonne est malheureusement la suite logique, sinon inévitable. Les étudiants, dans la période précédente, ont multiplié les manifestations (presque toujours interdites) contre la guerre d’Algérie dans le quartier Latin, à l’appel (entre autres) de l’UEC (union des étudiants communistes) et de l’UNEF. Nous nous trouvions en groupes d’à peu près même importance, manifestants et policiers ; je ne me souviens pas de projectiles lancés sur les policiers : en fait on se tenait à distance, prêts à fuir pour échapper à la charge que l’on savait venir. Le dispositif policier (décrit par M. Larrère) était vraiment impressionnant par rapport à notre vécu antérieur : j’avais « fait » en province les manifestations de Mai 58, sans cette espèce d’angoisse de ne pouvoir échapper aux « bidules ». La charge s’élançant c’était le sauve qui peut … je sais que plus d’un ont été frappés, blessés … gazés aussi sans doute mais je ne m’en souviens pas. Pour ma part j’ai toujours trouvé un couloir que des habitants ou des concierges refermaient derrière nous pour nous protéger de la poursuite des policiers. Il faut dire, que jeune femme, je ne me tenais pas dans les premiers rangs de la manif !
J’ai trouvé très intéressant le parallèle entre la situation d’alors et celle d’aujourd’hui. Bien sûr des différences sont évidentes ; mais sur le fond, beaucoup de choses étaient déjà à l’œuvre ; suréquipement, technique de la charge, et, ce qui est peut-être pour moi le plus angoissant, haine insufflée et impunité chez les policiers, sans lesquelles ils ne pourraient pas exécuter ce que le pouvoir en dernier ressort attend d’eux.
Merci à Mathilde Larrère pour cette, combien nécessaire, chronique … et à Yael pour le lien vers la séquence de « Diabolo menthe ».
-
PREVENTION
Je lis ici et là qu'il n'y a pas eu de morts liés à des exactions policières en 68. C'est faux et regrettable qu'on passe par pertes et profit la mort de Gilles Tautin. A noter qu'il était sportif et très bon nageur. Certains témoins ont signalé des coups de crosse des pandores alors qu'il était "tombé dans l'eau. Je ne vous dit pas l'émoi dans ce lycée que je fréquentais à l'époque. Les profs ont su calmer des esprits chauffés à blanc pour éviter le pire : https://fr.wikipedia.org/wiki/Gilles_Tautin
-
magrit
merci pour cette intervention oh combien nécessaire!
-
Kao
J'avais gardé un souvenir très vif de la séquence de Diabolo Menthe où une des élèves raconte les événements... le détail des chaussures est particulièrement glaçant :
-
Asinaute sans pseudo e4846
eugene de l'ardeche
-
Asinaute sans pseudo e4846
eugene de l'ardeche
-
LiuokM
"il(le berger lallement) n'a pas le passé collabo de Papon...il n'est pas responsable de la déportation"
ceci dit il n'est pas à la même époque, je donnerais cher pour savoir comment il se serait comporté à cette époque justement...dans quel camp se serait il reconnu...?
en gros va falloir attendre un nouveau Charonne pour que ça bouge vraiment ?
à quand un Charonne inversé, où ces les flics qui morflent pour une foi...?
leur mettre leur propre matraque dans le cul comme j'ai pu voir sur une vidéo, les frapper au sol si possible à plusieurs contre 1 jusqu'à l'inconscience et l’hospitalisation, les nasser et les gazer pendant des heures avec des gaz qui se métabolisent en cyanure jusqu'à en vomir ou faire des malaises...
bref leur rappeler durement et énergiquement(pour reprendre leurs termes) qui est le peuple souverain dans ce pays...
en attendant ce jour, demain nouvelle journée de massacres et d'exactions policières par des criminels sensés faire respecter la loi qu'ils ne respectent pas eux même en ne portants plus leurs RIO depuis des mois...
-
Jiemo
Comment s'en sortir ? Le jeu démocratique étant moribond (voir la commission retraite et ses coupures de micros) , voire mort , "que faire ?" Lutter , certes , mais par quelles stratégies ? Merci Mathilde.
-
Francois Dubreuil
Énorme, splendide. Merci.
-
JPP
Si vous avez 10 mn a perdre ecouter le soit disant philosophe qui est passé sur france-inter ce matin parlant de la violence anecdotique de la police dans les manifestations même Domorant n'en esperait pas tant.
-
Cultive ton jardin
Parmi les grilles jetées par la police sur les manifestants dans la bouche du métro, ces grilles en fonte qu'on met au pied des arbres pour les protéger du piétinement. On en voit très clairement une (un quart de rond de 1 mètre de rayon) sur la photo. Arracher une telle grille et la jeter sur une foule... j'ai pas les mots.
Et à propos de la fermeture de la station, en effet, ça a été la version officielle qui a bien tenu la route. Je l'ai crue jusqu'à la lecture du livre de Dewerpe, qui en croisant nombre d'archives et de témoignages démontre qu'elle n'était pas fermée. Le mensonge servait à minimiser l'action de la police en laissant entendre que les manifestants s'étaient entre-tués.
Dewerpe m'a aussi fait découvrir cette manière codée de faire passer le message "Allez-y, vous avez quartier libre, on ne vous reprochera rien" dont on peut penser qu'elle fait encore aujourd'hui des ravages.
-
biscotte77
Tellement glaçant. On sait bien en entendu que ces répressions n'ont rien de "normales" ni d' "humaine", mais quand elles sont liées aux moments les plus tristes et dangereux de notre histoire (pas si lointaine pourtant mais les manuels scolaires n'en font pas cas il me semble) cela montre bien et démontre une réelle politique d'asservissement d'un peuple, déjà mis à genou économiquement et socialement, et cette volonté de museler et faire mal, de blesser jusque dans la chair. Ce qui me rassure, c'est qu'en france il y a toujours eu des résistantes et des résistants pour lutter contre ce dévoiement et que ce moment arrive à grand pas contre les pas bottés de brun que ce gouvernement nous envoie.
-
DéLecteurdeVraiThé
Oui, le parallèle est frappant
La seule différence est que la presse (médias) n'arrive plus aussi facilement à contourner la vérité et que dépassée par les réseaux sociaux et la prise de conscience des faits, elle est obligée de les relater.. parfois... longtemps après
-
Philippe Ponel
Mathilde, avez vous oublié Zineb, et Steve pour ne citer qu'eux ?
Zineb est décédée parce que ça devait faire rire des affreux qui s'amusaient à faire du tir au pigeon. Tandis que Steve est mort suite à une charge policière démesurée. Steve est décédé dans des conditions qui sont très comparable à celles des morts de Charonne et c'est un miracle que Steve fut la seule victime.
Ils sont les dernières victimes du maintien de l'ordre que vous décrivez là. Votre analyse nous permet de comprendre qu'il y en aura d'autres, mais l ne faut pas oublier ceux qui sont déjà partis. -
MaxLecolo
Merci Mathilde pour votre chronique, encore une fois fois, très intéressante. J'avoue que je connais bien mal cette période et ces événement (bizarrement à l'école on ne voit pas ça...)
Par contre votre conclusion : "pour l'instant il n'ont pas ôté la vie". Vous voulez dire pas provoqué de massacre ? Parsque sinon je me permet de vous glissé qq prénoms de l'histoire récente dans le cas contraire : Zineb, Steve, Cyril, Adama...
Oui j'ai une mémoire qui fonctionne mieux avec les prénom ;-)
-
Pif
Une chronique puissante.
On le sentait, on le savait : les conditions pour un drame sont déjà toutes en places, sur le terrain, mais surtout dans le discours. -
Pince-mi sophiste de passage
En février 62 j'avais quinze ans. A cette époque et à cet âge, dans mon milieu et dans ma cambrousse on ne pensait pas trop aux luttes politiques.
Et il y a eu ce déclic.