Vie sexuelle DSK : débat Quatremer-Joffrin dans Libé

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Jean Quatremer, un prophète ? Le journaliste de Libération avait, dés l'été 2007, émis de sérieuses réserves sur le comportement de DSK à l'égard des femmes, frein potentiel à son ascension vers la direction du FMI. Après le cataclysme médiatique de "l'affaire DSK", il publie Sexe, mensonge et médias (Plon), un livre où il pointe du doigt le silence des journalistes français et leur refus d'enquêter sur le sujet... Libération consacre aujourd'hui pas moins de cinq pages au livre de son correspondant à Bruxelles. Et fait s'expliquer son directeur de l'époque, Laurent Joffrin.

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Aujourd'hui, tous les médias ont exploré en détail la vie sexuelle de DSK et son comportement envers les femmes. Mais avant son arrestation au Sofitel de New-York en mai, le sujet était tabou en France. Et Jean Quatremer était très seul lorsqu'il a écrit sur son blog le 9 juillet 2007, quand a commencé à être évoquée la candidature de l'homme politique à la tête du FMI : "Le seul vrai problème de Strauss-Kahn est son rapport aux femmes. Trop pressant, il frôle souvent le harcèlement. Un travers connu des médias, mais dont personne ne parle (on est en France)."

Des mots prémonitoires, mais très peu repris. "Les quelques lignes de Quatremer intéressent alors la presse anglo-saxonne, et les internautes. Dans les médias français traditionnels, rien, sauf une interview sur BFMTV. Et une attaque du site de Marianne qui l’accuse d’avoir «franchi la ligne jaune»", rappelle aujourd'hui Libé, qui détaille les coulisses :Débat animé et divisé à la rédaction de Libération, qui pratique chaque matin critiques et autocritiques. L’info sortie sur Libération.fr n’atterrit pas dansLibération papier. Laurent Joffrin, directeur à l’époque, dira plus tard qu’il estimait que cela violait la loi sur la vie privée."

 

Quatremer s'est pourtant montré insistant. Lorsque "le FMI commande une enquête interne pour harcèlement sexuel" contre DSK, dans le cadre de sa relation avec l'économiste Piroska Nagy, employée au FMI, "Quatremer propose de nouveau d’aller à Washington, détaille Libération. Même désintérêt de la direction pour les relations féminines de DSK.

Largement mis en cause, Joffrin, actuel patron du Nouvel Observateur, répond à Quatremer dans une longue tribune, et admet une part de responsabilité : "Suis-je coupable pour avoir refusé qu’on enquête sur la vie privée de Dominique Strauss-Kahn ? Oui, sans doute un peu. (...) mais pas pour les raisons qu'on entend le plus souvent."

En fait, Joffrin ne semble pas avoir réellement changé de point de vue, et ne préconise d'enquêter sur la vie privée des personnalités politiques qu'en cas de sérieux doutes préalables : "Pour entrer dans ce domaine qui tient au plus précieux de l’identité de chacun, il faut de bonnes raisons : le soupçon d’une illégalité sérieuse ou bien la mise au jour d’un élément essentiel pour comprendre tel ou tel événement important", et dresse à cet égard un parallèle avec la presse à scandale d'outre-Manche : "Veut-on vraiment voir se développer en France l’équivalent de la presse Murdoch, qui fait argent du viol systématique de la vie privée et couvre ses pratiques honteuses des oripeaux mités de la liberté de la presse de caniveau ?"

Au passage, Libération indique que Quatremer n'a pas été le premier à s'intéresser à la vie privée de l'ancien patron du FMI. Christophe Deloire et Christophe Dubois l'avaient déjà évoquée dans leur ouvrage Sexus politicus, paru à l'été 2006. Un passage que nous avons déjà relevé.

Sur le sujet du silence des médias français sur le comportement de DSK, nous avions réalisé une émission, à laquelle avait notamment participé la journaliste américaine Elaine Sciolino, elle aussi interrogée par Libé  aujourd'hui, et Vincent Giret, directeur de la rédaction du quotidien.

(Jamel Benhassine)

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