Valls : atterrissage en vue ?
Daniel Schneidermann - - 0 commentairesAffaire classée ? Avec l'annonce inopinée par Manuel Valls
qu'il "assumera la prise en charge du voyage pour ses deux enfants", soit 2500 euros, sur l'excursion berlinoise, l'affaire Aero-Valls est-elle terminée ? Sans doute pas. "Faute avouée, faute à moitié remboursée" a réagi drôlement Xavier Bertrand, tandis que d'autres se demandent déjà comment on peut rembourser un voyage qui "n'a pas coûté un euro à l'Etat".
Mais ce n'est pas tout. Quand on lève le voile sur les conditions de vie matérielle du personnel dirigeant, leur panoplie, leurs prébendes, leur vie hors-sol...
...on n'en finit jamais de faire de nouvelles découvertes. Le Figaro, par exemple, nous apprend que les enfants Valls ont aussi effectué en Falcon le vol Paris-Poitiers (mais apparemment pas le vol de retour Poitiers-Paris). Ce qui pose de nouvelles questions aux mauvais esprits, jamais rassasiés. L'ont-ils effectué avec papa, c'est-à-dire le vendredi, au premier jour du congrès PS ? Dans ce cas, tant qu'à s'infliger quelques heures de punition supplémentaires à Poitiers, pourquoi n'ont-ils pas aussi pris l'avion du retour avec lui le dimanche ? L'ont-ils effectué seuls, le samedi, juste avant le départ pour Berlin ? Mais alors, comment Manuel Valls s'est-il rendu lui-même de Paris à Poitiers ? Par le train ? Dans un vol séparé ?
L'avantage de l'irruption d'un fait-divers dans le récit politique, c'est qu'il offre soudain une vue plongeante sur la psychologie des personnages politiques, privés de leurs éléments de langage habituels, poussés à s'aventurer hors de leurs couloirs (aériens, bien entendu). De même que les grands faits-divers permettent une exploration en carotte dans un milieu social habituellement sous-exposé, le changement de registre forcé des surexposés politiques est bien plus instructif que des heures de langue de bois.
A ce stade (oups, pardon), la palme revient sans conteste à l'ineffable Bartolone(l'homme de la terrasse), président de l'Assemblée, et candidat aux Régionales en Ile-de-France. Pour Bartolone, Valls s'est comporté, en la circonstance, en "père premier ministre". Et d'ajouter, sur RTL, cet argument : "Sur ces grands événements, il y a un toujours un membre du CIO qui traîne. Et plus on démontrera l'appétence des Français, l'envie d'accueillir les Jeux olympiques et mieux ce sera. […] Il devait y aller, c'était son devoir". Diantre. Son devoir ! Rien de moins. Nul doute que s'il n'y était pas allé, Bartolone aurait diligenté une commission d'enquête parlementaire. Ultime avantage de l'affaire : les électeurs sont prévenus. Ceux d'Ile-de-France qui voteront Bartolone, savent qu'il n'hésitera pas à affrêter des Falcon en famille, en "père président de région", pour aller alpaguer "des membres du CIO qui trainent" sur différents théâtres sportifs, et les terrains de chasse à cocotiers les plus improbables. A vos isoloirs !