Une communauté citoyenne pour vérifier les sites d'infaux ? (Blog)
Juliette Gramaglia - - Intox & infaux - Nouveaux medias - 0 commentairesLe modèle collaboratif de Wikipedia, la solution pour contrer les sites d'info les moins fiables ? Le nouvel outil du Monde, lancé le 1er février, indique à l'aide d'un code couleurs la fiabilité des sites d'info. Face à cette iniative, qui a soulevé plusieurs critiques, le collectif SavoirsCom1, fondé par deux bibliothécaires, appelle a créer une "communauté citoyenne vigilante" pour labelliser les site d'info. Et cite en exemple celle de Wikipedia.
Et si, à la place du Decodex du Monde, il fallait développer un "commun" (c'est-à-dire un outil communautaire et collaboratif, auquel tout le monde peut participer sans en être propriétaire, comme vous l'expliquait @si) pour vérifier les sites d'info? C'est ce que propose le collectif SavoirsCom1, fondé par deux bibliothécaires engagés depuis plusieurs années sur les questions des libertés numériques et des "communs". Le 1er février, les Décodeurs du Monde lançaient Decodex un outil dont @si vous donnait les bases ici, et qui doit permettre aux internautes de distinguer sites d'info fiables et ceux qui ne le sont pas. A l’heure où essaiment site d’infaux et fake-news, le Monde a inévitablement fait des mécontents. Et s'est vu notamment reprocher d'être juge et partie dans la labellisation des sites d'info.
Une critique partagée par le collectif SavoirsCom1. Dans un article publié sur leur site le 7 février, le collectif reconnaît le "réel intérêt pédagogique" d'un tel outil. Mais nuance : "L'éducation à l'information ne peut pas être accaparée par un seul journal, aussi légitime soit-il, alors que de nombreux acteurs (bibliothécaires, journalistes, professeurs documentalistes, enseignants, modérateurs, etc.) détiennent des compétences en la matière et pourraient mettre en commun cette culture informationnelle".
SavoirsCom1 pointe également le risque que chaque organe crée son propre outil de vérification des sites d'info : "À l’instar du Monde, on peut aisément imaginer que d’autres proposeront leur propre système d’évaluation – servant leurs propres intérêts –, qu’il s’agisse de plates-formes privées comme Facebook, des conspirationnistes eux-mêmes ou de l’État, qui trouverait là un moyen de restaurer une régulation par en haut de l’Internet."
Mais surtout, le collectif craint de voir une uniformisation de l'évaluation des sites d'info au travers de quelques critères uniquement : "Les indicateurs sont utiles à condition qu’ils puissent être contextualisés, discutés… et contournés, explique SavoirsCom1. Qui ajoute : "Le fait d’établir un critère global de fiabilité au niveau des sites est par ailleurs discutable, car cela peut dépendre des articles et de la qualité de chaque contribution."
Le modèle de la communauté Wikipedia
Pour pallier aux problèmes qu'il soulève dans l'initiative du Monde, le collectif appelle donc à créer une "communauté citoyenne de vigilance" autour de Decodex. SavoirsCom1 donne en exemple la communauté de Wikipedia, un espace de publication qui "résiste mieux aux fausses informations" que d'autres réseaux, assure-t-il. Et ce, notamment, grâce aux règles mises en place par la communauté (parmi elles, l'obligation de la neutralité du point de vue dans les articles, mais aussi les règles - complexes - de résolution des litiges sur ces articles).
Pour qu'émerge cette communauté, SavoirsCom1 appelle entre autres à ce que "les outils de vérification soient toujours eux-mêmes vérifiables" (et qu'il n'y ait donc pas de "boîte noire" des outils de vérification). Mais aussi que les sites labellisés puissent "faire appel de leur évaluation en démontrant leur mode d'élaboration ou de transmission de l'information".
Pour en savoir plus sur les communs, lisez notre article : "Communs, une notion médiévale viendra-t-elle protéger le logiciel libre"
L'occasion de voir notre émission : "Les communs, ce n'est pas le monde des bisounours"