Ukraine : 18 journalistes "choqués" par le documentaire de Canal+

La rédaction - - Fictions - 1 commentaires

Décidément, le documentaire de Paul Moreira,

Ukraine, les masques de la révolution, ne fait pas l'unanimité. Deux jours après sa diffusion (et une première critique venue du Monde), dix-huit journalistes signent une lettre ouverte adressée au réalisateur, publiée sur le site de l'Obs. Ils lui reprochent "une série d’erreurs factuelles, des informations non recoupées, mais aussi des raccourcis et des manipulations de montage."

L'Obs, le 3 février 2016

Les critiques se multiplient contre le documentaire de Canal+ consacré à l'Ukraine. Le 3 février, l'Obsa publié une lettre ouverte signée par dix-huit journalistes (parmi lesquels Marc Crépin de Radio France, Sébastien Gobert de Libération, Olivier Tallès de La Croix ou encore Laurent Geslin de RFI) et adressée à Paul Moreira, à la suite de la diffusion de son film Ukraine, les masques de la révolution, le 1er février sur Canal+."Nous sommes des reporters travaillant régulièrement en Ukraine, précisent les co-signataires en ouverture de leur tribune. Certains sont correspondants permanents à Kiev et dans la région, d’autres sont des envoyés spéciaux très réguliers. Par écrit, radio, télévision et photo, nous avons tous couvert sur le terrain la révolution de Maïdan, l’annexion de la Crimée et la guerre du Donbass". Et les dix-huit journalistes de se déclarer "choqués" par le reportage de Moreira, "non pas par la thèse défendue par le film" (le renforcement de l'extrême-droite en Ukraine depuis la guerre), mais par "l’absence de mise en perspective d’une question complexe", et par une certaine confusion "entretenue par une série d’erreurs factuelles, des informations non recoupées, mais aussi des raccourcis et des manipulations de montage."

Trois critiques principales : manichéisme, surévaluation, et, à l'inverse, minoration de certains événements. On reproche d'abord au documentariste sa vision binaire de l'annexion de la Crimée, mais aussi de la question linguistique en Ukraine. Ainsi, l'opposition établie par Moreira entre ukrainophones et russophones n'aurait pas de sens dans un pays où "l’identité ne se définit certainement pas selon le seul facteur ethno-linguistique". Le journaliste de "Premières Lignes" aurait ensuite surestimé l'impact des formations d'extrême-droite en faisant d'elles "le vecteur principal de la révolution ukrainienne." Enfin, le documentaire minorerait l'importance de la guerre du Donbass ainsi que les actions engagées par le gouvernement ukrainien pour désarmer les milices extrêmistes ou les intégrer à l'armée.

Dans son documentaire, Moreira entendait mettre en lumière un élément selon lui peu connu : le poids grandissant des milices nationalistes ukrainiennes (telles que celles de Secteur Droit, d'Azov ou de Svoboda) à la faveur de la révolution ukrainienne de 2014. Un élément que le gouvernement américain notamment aurait tû afin de ne pas compromettre la révolution.


Comme @si le détaillait ici, le film avait déjà fait l'objet d'une critique sévère d'un journaliste du Monde, Benoît Vitkine, publiée le 31 janvier 2016.

Viktine formulait, pour sa part, trois reproches principaux au documentaire : le réalisateur aurait surestimé la puissance de feu de ces milices, amalgamé le nationalisme, l'extrême droite et le néonazisme, et enfin négligé l'impact de l'agression russe contre l'Ukraine. Moreira avait répondu aux critiques de Viktine sur le site de "Premières lignes".

(Par Tifaine Cicéron)

L'occasion de relire notre article : "Ukraine : à la recherche des tanks du bataillon Azov"

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