Tensions Allemagne-Turquie : Bild s'attaque à Erdogan
Juliette Gramaglia - - 0 commentairesPas de réchauffement en vue entre la Turquie et l'Allemagne. Le tabloïd allemand Bild s'en prend en Une ce mercredi 15 mars au président turc Recep Tayyip Erdogan, le déclarant"indésirable" outre-Rhin. Les tensions médiatiques et diplomatiques persistent entre les deux pays après l'arrestation d'un journaliste turco-allemand en Turquie le mois dernier.
Voilà qui ne va pas calmer les tensions germano-turques. Le tabloïd allemand Bild, quotidien le plus lu outre-Rhin, s'en prend directement au président turc Recep Tayyip Erdogan dans son édition du mercredi 15 mars. "Bild dit la vérité en face à Erdogan. Vous n'êtes pas un démocrate ! Vous faites du tort à votre pays ! On ne veut pas de vous ici !", peut-on lire à la Une. Une attaque qui intervient dans un contexte de fortes tensions entre la Turquie et plusieurs pays européens, dont l'Allemagne, notamment après l'arrestation d'un journaliste turco-allemand en février dernier.
Une de Bild,
15 mars 2017
Bild accompagne sa Une d'un édito de sa rédactrice en chef Tanit Koch, accessible également sur le site de journal. Elle y explique que la Turquie est devenue un "État injuste", et condamne les arrestations arbitraires de journalistes. "Nous ne pouvons pas tolérer qu'Erdogan importe sa crise chez nous. Celui qui parle et agit [comme il le fait], n'a rien à faire en Allemagne. Erdogan est indésirable", assène-t-elle.
Outre le court édito au vitriol, le quotidien allemand publie un portrait d'Erdogan, disponible exceptionnellement en allemand et en anglais sur le site, retraçant la jeunesse du président turc, le "petit homme du Bosphore". Erdogan est décrit comme un homme n'ayant "pas d'ami", qui "ne fait confiance qu'à son clan (famille, conseillers, services secrets)" et qui vit dans "la paranoïa du putsch".
En conclusion du portrait, les deux auteurs l'assurent : "Erdogan n'a plus qu'un seul but : SON empire ottoman. SA super-puissance au Proche-Orient. LUI à sa tête, comme patron protecteur de tous les musulmans. Erdogan dans sa propre Erdo-manie". Un mot qui fait référence à une chanson parodique qui critiquait les répressions du régime turc contre la liberté d'expression et de la presse – et qui inspira le poème injurieux contre le président Erdogan de l'humoriste Jan Böhmermann.
"Un jeune du port maritime, un espoir, un dirigeant. Comment Recep TAyyip Erdogan est devenu ce qu'il est.
Le petit homme du Bosphore", Bild, 15 mars 2017
Tensions Germano-Turques après l'arrestation d'un journaliste
Cette Une et ces articles particulièrement virulents ont été publiés alors que les appels à la libération du journaliste turco-allemand Deniz Yücel, emprisonné à la mi-février en Turquie, se multiplient. Le correspondant du quotidien conservateur Die Welt (qui appartient au même groupe de presse que Bild, Axel Springer), est accusé de "propagande pour une organisation terroriste", et "d'incitation à la révolte populaire". Il était, comme @si le racontait, dans le viseur des autorités turques depuis près d'un an pour avoir critiqué l'emprisonnement de journalistes en Turquie.
Et les tensions ne semblent pas prêtes de s'arrêter. Mercredi matin, de très nombreux comptes Twitter en France, en Allemagne, ou encore au Royaume-Uni ont été piratés au travers de l'application Twitter Counter, qui gère les statistiques d'un compte Twitter. Pendant plusieurs minutes, le drapeau turc a remplacé les photos de profil, et le tweet "Allemagne nazie et Pays-Bas nazie. Une petite gifle ottomane pour vous. On se reverra le 16 avril [date du référendum, ndlr]" est apparu sur les nombreux comptes, assorti d'une croix gammée. Parmi les nombreux comptes touchés, notamment plusieurs médias – dont le quotidien Die Welt, pour lequel travaillait le journaliste emprisonné.
Capture d'écran du tweet publié sur le compte piraté de Die Welt