Squarcini / livre : plaintes croisées
La rédaction - - 0 commentairesÇa chauffe chez les espions. Bernard Squarcini, le patron de la Direction centrale du renseignement intérieur (DCRI) va porter plainte contre les auteurs du livre "L'espion du président" qui l'accusent d'être "instrumentalisé" par l'Elysée. Une autre plainte devrait être déposée selon Patrick Maisonneuve (avocat de Squarcini) contre Mediapart et Edwy Plenel, ce dernier accusant également la DCRI d'avoir espionné des journalistes.
A en croire les compte-rendus publiés cette semaine dans Le Canard enchaîné et Le Point, le livre est explosif. Dans "L'espion du président", les auteurs (Olivia Recasens et Christophe Labbé du Point, Didier Hassoux du Canard) ont travaillé pendant un an au coeur de la DCRI et dressent un portrait au vitriol de Bernard Squarcini, son patron. Les auteurs accusent notamment les services de renseignements d'avoir espionné des journalistes.
Les bonnes feuilles publiées par les deux hebdomadaires dans lesquels travaillent les auteurs reproduisent des témoignages de policiers ayant travaillé à la DCRI. Un membre de la sous-division "R" raconte par exemple que le processus de demandes de fadettes (factures détaillées de téléphone) "n'est ni légal, ni illégal. Il est juste en marge de la loi" en invoquant à chaque demande le risque d'un danger terroriste. "Pendant un an, on a beaucoup menti", confie une femme officier citée par Le Canard. Un autre membre de la DCRI a également expliqué que ses collègues "sont capables d'entrer n'importe où pour aller siphonner un ordinateur ou poser des micros". Il suffit que l'ordinateur soit relié à internet pour qu'un membre de la DCRI puisse y accéder. "Il y a des gens chez nous qui font ça très bien", raconte par exemple un commissaire. Certaines surveillances seraient effectuées à la demande de l'Elysée. "La DCRI, telle qu'elle a été créée, est une agence de renseignement au service de l'Elysée", raconte un membre de la sous-division "T", celle du contre-terrorisme. |
Un officier de l'équipe de Squarcini, citée dans Le Canard et dans le livre, précise : "Demander une enquête à la DCRI fait maintenant partie des signes extérieurs de pouvoir (...) A un niveau jamais atteint à l'époque Chirac ou Mitterrand". Un ancien commissaire confirme : "C'est allé trop loin. Il y a un vrai malaise dans la maison. Squarcini ne sait pas dire non au président". Car des journalistes feraient partie des personnes visées par cette surveillance.
Suite à la publication de ce livre, Squarcini a donc décidé de porter plainte pour diffamation contre les auteurs, sans préciser sur quels éléments du livre porterait cette plainte. Une autre plainte, contre Mediapart et Edwy Plenel, devrait également être déposée.
Dans un édito publié ce jeudi en réaction à la publication de "L'espion du président", le fondateur de Mediapart considère que les auteurs confirment ce qu'il pressentait : Mediapart aurait bien été "espionné sur ordre de l'Elysée". Dès novembre 2010, Mediapart le relatait en expliquant que plusieurs sources leur avaient indiqué que certains de ses journalistes avaient fait l'objet de "surveillances téléphoniques afin d'établir une cartographie de leurs relations et contacts". A l'époque, Mediapart avait également évoqué qu'une fausse rumeur, selon laquelle un des actionnaires de Mediapart serait un évadé fiscal belge, serait partie de l'Elysée. Claude Guéant était soupçonné de coordonner ces attaques. Le ministre de l'intérieur avait d'ailleurs porté plainte contre Mediapart avant de se désister après l'affaire des fadettes des journalistes du Monde. |
Aujourd'hui, le livre sur Squarcini apporterait de nouvelles informations. Mediapart aurait fait l'objet "d'une enquête poussée du renseignement intérieur" notamment à cause de l'affaire Karachi. "Mediapart va évidemment saisir la justice de ces faits nouveaux afin que toute la vérité soit faite sur cet espionnage et que ses auteurs en répondent, ceux qui l’ont ordonné comme ceux qui ont exécuté cet ordre illégal", écrit Edwy Plenel.
L'avocat de Squarcini n'a pas précisé quels étaient les points litigieux de cet article de Mediapart.