SFR/TVA : la presse indépendante en ligne dénonce un "hold-up fiscal"
Robin Andraca - - Financement des medias - 0 commentairesAttention, dévalorisation de la presse ! Dans un communiqué publié ce 12 juillet, le Syndicat de la Presse Indépendante d'Information en ligne (Spiil) critique l'utilisation du taux de TVA réduit pour la presse en ligne par des acteurs économiques (SFR, Bouygues Telecom ou Canal+), dont la presse n'est pas le cœur de métier.
La presse, outil d’optimisation fiscale ? Depuis l'an dernier, et le lancement de "SFR Presse", la question se pose. En mai 2016, SFR lancait son "pack presse" à 19,99€ par mois, qui permettait à la plupart des clients SFR de bénéficier gratuitement et automatiquement d'abonnements numériques illimités pour accéder à tous les médias du groupe de Patrick Drahi (Libération, L'Express, L'Etudiant, etc). Un "pack press" qui permettait aussi (et surtout ?) à SFR de payer moins de TVA, grâce au taux réduit de 2,1% dont bénéficie la presse (@si vous expliquait toute l'affaire ici). Alors que Bouygues Telecom et Canal+ proposent désormais des offres similaires, en partenariat avec la plateforme LeKiosk, le Spiil dénonce une nouvelle tendance qui pourrait, à terme, faire beaucoup de mal à la presse.
Dans son communiqué, intitulé "Offres de presse intégrées aux box Internet : un hold-up fiscal", le Spiil (dont @si est membre fondateur) estime que l'utilisation de la TVA à 2,1% par des acteurs dont la presse n'est pas l'activité principale fait peser des risques majeurs sur ceux, justement, dont l'information est le cœur de métier. Le premier : un risque de délégitimation de la TVA pour la presse. "Ce taux réduit tire sa légitimité du rôle constitutionnellement reconnu de la presse pour permettre aux citoyens d'accéder à l'information nécessaire à la formation de leurs opinions. Le Spiil s'est battu pour qu'il bénéficie à la presse en ligne autant qu'à la presse imprimée. L’utilisation de cet avantage à des fins d'optimisation fiscale porte une atteinte grave à sa légitimité", estime le syndicat. Une atteinte aussi aux caisses de l’État aussi : le Spiil note que SFR Presse pourrait représenter un manque à gagner de 216 à 360 millions par an (en terme de recettes fiscales).
Cette utilisation détournée de la TVA pourrait aussi conduire à une dévalorisation de la presse auprès du public. "La gratuité apparente de ces offres envoie un message regrettable au marché : l’information de presse ne vaut rien", écrit le Spiil. Enfin, le syndicat pointe du doigt des distorsions de concurrences potentielles. "Il est ainsi impossible de savoir si le groupe Altice (SFR) favorise certains médias, soit qui lui appartiennent, soit qu’il juge leur participation indispensable au succès de l’offre", s'interroge le Spiil, qui attend désormais une réponse du gouvernement. "Le Spill appelle à une prise de position claire des pouvoirs publics, en particulier du ministère de la Culture et du ministère du Budget, pour encadrer strictement l’usage fait par les opérateurs de la réduction de TVA, a minima en exigeant que l’avantage fiscal soit applicable à due proportion, uniquement aux abonnés ayant fait une démarche active, et pour des offres qui puissent être résiliées simplement", conclut le communiqué.
L'occasion de relire notre article : "La presse, outil d'optimisation fiscale pour SFR et Drahi ?"