Sarkozy et le chômage : le Figaro, et la loi de l'insolence décroissante

Gilles Klein - - 0 commentaires

Nicolas Sarkozy pris à contre-pied par les chiffres du chômage : l'info fait la Une de Libération, ce vendredi, mais le Figaro a choisi hier de titrer ses informations en fonction d'une "loi de l'insolence décroissante".

 

 




"C’était le 25 janvier sur TF1: «Dans les semaines et les mois qui viennent», avait-il déclaré, catégorique, les Français verront «reculer le chômage». Et il avait ajouté: la situation est «en train de se retourner». (...) Petit miracle de la communication: deux jours plus tard, les chiffres du chômage de décembre, en très légère baisse, semblaient lui donner raison."

"Aujourd’hui, changement de décor. Les résultats de janvier montrent que l’emploi continue de se dégrader rapidement. Du coup, François Fillon prend l’exact contre-pied du chef de l’Etat: le chômage, dit-il, pourrait augmenter «jusqu’à la mi-2010»."

"Du tandem exécutif, les Français préfèrent le Grincheux de Matignon au Joyeux de l’Elysée. Ils ont compris que la crise n’était pas derrière eux." explique l'éditorial de Libération en page 2.

Le lecteur du Figaro, lui, saura-t-il que la correction des chiffres du chômage de décembre contredit la prédiction de Sarkozy ? Cela dépend quel Figaro il lit. Le journal papier, le site, ou le blog du spécialiste Marc Landré.

Dans le journal papier, pas la moindre allusion, ni dans le titre ni dans le chapeau de l'article, à Sarkozy pris à contrepied.



"Il s’agit d’une opération effectuée tous les ans, une « révision des séries corrigées des variations saisonnières et des effets des jours ouvrables des demandeurs d’emploi inscrits », argumentent les services du ministère du Travail. Il n’empêche. En décembre, la baisse de 18 700 chômeurs dans la catégorie A s’est transformée en hausse de 500 personnes. Le reflux initialement annoncé avait été d’autant plus remarqué qu’il allait à l’encontre de la tendance observée depuis mi-2008. Et que le président de la République l’avait pronostiqué quelques jours avant la publication officielle des chiffres. Le 25 janvier, sur TF1, le chef de l’État avait en effet affirmé que les Français verraient « le chômage reculer dans les semaines et les mois qui viennent »" .


picto Le Figaro jeudi 25 février 2010





Sur le Figaro.fr l'articlede Marc Landrécommence
par mentionner la mauvaise nouvelle que cela représente pour le président.


 "Nicolas Sarkozy se serait bien passé d'une telle annonce à un peu plus de deux semaines des élections régionales et en plein mouvement social chez Total. Non seulement le nombre de demandeurs d'emploi qui se sont inscrits en janvier au Pôle emploi a bondi entre +15.900 et +19.500 (selon les catégories considérées), mais la baisse de 18.700 personnes annoncée en catégorie A pour décembre le mois dernier a été sérieusement corrigée et s'est transformée finalement… en forte hausse. Une «quasi-stagnation», minimise ce soir le ministère de l'Emploi. Il n'empêche. Fin 2009, le nombre de demandeurs d'emploi atteignait au total 2,65 millions de personnes en catégorie A, contre 2,61 millions annoncé il y a un mois. Soit une différence, sur l'ensemble de l'année, de 34 .400 chômeurs enregistrés. En plus. Cette double mauvaise nouvelle pour l'exécutif remet en cause les déclarations du président de la République, le 25 janvier dernier lors de son émission de télévision sur TF1."

Le Figaro.fr jeudi 25 février 2010picto

Troisième version nettement plus directe, sur le blog du même Marc Landré qui, lui, titre "Sarkozy deux fois contredit".

Nicolas Sarkozy a du avoir eu légitimement le sang qui lui est monté au cerveau ce mercredi quand il a pris connaissance des chiffres du chômage du mois de janvier. Non seulement Pôle emploi enregistre une forte hausse du nombre de chômeurs pour le premier mois de l'année (...) mais l'ensemble des séries de 2009 a été révisé... à la hausse : 34 400 demandeurs d'emplois de plus que prévu initialement. Or c'est sur la base de la série du mois de décembre 2009 (...) que le président avait assuré le 25 janvier sur TF1 que les Français verraient "le chômage reculer dans les semaines et les mois qui viennent". Le chef de l'État, qui a voulu doper la confiance des Français à l'approche des élections régionales, n'aura finalement eu raison qu'un seul petit mois. Avant d'être doublement contredit."


 

"Les services statistiques du ministère de l'Emploi justifient la correction des données de 2009 comme une révision annuelle (...) J'ai repris les séries publiées en janvier 2009 pour voir si la révision annuelle avait bien eu lieu l'année dernière. Et, ô surprise, je n'en ai pas retrouvé trace. Probablement ai-je dû mal regarder car je ne vois pas, vu le résultat,  quel intérêt aurait eu l'exécutif à donner l'impression de trafiquer les données. C'est juste un concours de circonstance malheureux. Rien de plus."

"En tout cas, je sais déjà ce que les gens vont se dire : le gouvernement a bidouillé les chiffres avant les élections. Et ils auront tort de le penser." conclut Marc Landré.

Lire sur arretsurimages.net.