Retraites à 60 ans : Fabius et Aubry, flous mais opposés ?
Sébastien Rochat - - 0 commentairesA question simple, réponses très longues et alambiquées. S'il est élu, François Hollande reviendra-t-il à la retraite à 60 ans pour tous, avec une décote pour ceux qui n'auront pas toutes leurs années de cotisation ? Invités de RTL et de France inter ce matin, Laurent Fabius et Martine Aubry ont tourné autour du pot de longues minutes avant de finir par craquer et de livrer une réponse... floue et, semble-t-il, contradictoire. Tous deux promettent des négociations avec les syndicats. Mais alors qu'Aubry indique que "les Français auront la liberté de choisir" un départ à 60, 61 ou 62 ans, Fabius prévient : "On ne peut pas raser gratis." Sans vouloir en dire plus.
L'argumentaire est (presque) bien calé. Questionnés sur le retour à la retraite à 60 ans, Laurent Fabius et Martine Aubry sont officiellement sur la même ligne que François Hollande. Ils insistent d'abord sur l'engagement ferme qu'a pris leur candidat lundi dernier : le départ à 60 ans (contre 62 ans actuellement) pour tous ceux qui ont travaillé dès l'âge de 18 ans et qui ont toutes leurs annuités de cotisation. Oui, mais les autres ? Tous les salariés pourront-ils partir à 60 ans avec une décote ? C'est là que ça se complique : comme Hollande en début de semaine, Fabius et Aubry ont renvoyé ce point épineux à la négociation avec les partenaires sociaux. Dans le projet PS, ce retour paraissait pourtant acquis. A la page 34 (document PDF), on peut lire ceci : "Nous rétablirons l'âge légal de départ à 60 ans (qui permettra à ceux qui ont commencé à travailler tôt ou exercé des métiers pénibles de pouvoir partir au même âge) et l'âge de départ sans décote à 65 ans".
Le candidat Hollande est plus prudent, Aubry et Fabius l’ont bien compris. Mais le PS maîtrise encore mal les éléments de langage. Car poussés par Aphatie et Cohen, les deux socialistes ont fini par craquer, en donnant une réponse différente sur l'issue possible de ces négociations, qui traduit sans doute leur positionnement respectif sur la question.
Premier à passer sur le gril : Laurent Fabius, à 7h50 sur RTL. La question d'Aphatie est directe mais il faut attendre 1min25 et deux relances pour comprendre que dans son esprit, le retour à la retraite à 60 ans ferait bien partie des négociations, mais que cette règle a peu de chances d'être appliquée à tous les salariés : "Ne nous faisons pas non plus d'illusions monsieur Aphatie, la situation financière des régimes de retraite fait qu'on ne peut pas raser gratis, mais il faudra prendre cas par cas", finit-il par lâcher Fabius craque et ne se fait plus d'illusions au bout de 1min25 |
Fabius a donc mis du temps à dire les choses clairement, mais son éloge de la lenteur a été surpassé par celui de Martine Aubry, invitée de France inter à 8h20.
Interrogée sur la position de François Hollande, Aubry a déroulé le même argumentaire que Fabius, au début : carrières longues, pénibilité, négociations... avant de glisser, sur l'insistance de Cohen, qu'il "y aura des décotes à 60 ans, à 61 ans, à 62 ans et les Français auront la liberté de choisir". Traduction : pour Aubry, il y aurait bien un départ à la retraite possible à 60 ans, avec décote. Aubry se fait-elle des illusions ? Elle se garde bien en tout cas de faire une annonce officielle ou d'indiquer exactement qui pourra choisir... |
Avec la vidéo dénichée par Libé, où Hollande semblait s'engager sur un retour à la retraite à 60 ans avec décote pendant les primaires, l'UMP a désormais de quoi faire pour mettre en ligne un beau montage des contradictions du PS. Et Lefigaro.fr leur a déjà mâché le travail. Chouette !
Un nouvel élément pour notre dossier : "Retraites, derrière les propagandes".