Reliance : l'industriel de l'armement indien qui finance les médias de Pigasse...
Manuel Vicuña - - Financement des medias - 15 commentaires... et le dernier film de Julie Gayet
Quel est le point commun entre le banquier d’affaires et patron de presse Matthieu Pigasse, la compagne du chef de l’Etat et productrice de films Julie Gayet, et le groupe Dassault Aviation ? Un même allié économique : le conglomérat indien Reliance qui, lorsqu'il ne construit pas des avions de chasse, investit désormais dans la presse alternative et le cinéma français.
Un industriel de l’armement au capital du nouveau groupe de presse de Matthieu Pigasse ? L’information était jusqu’ici passée inaperçue. Pourtant, le grand projet capitalistique de Pigasse (co-actionnaire du Groupe Le Monde) semble passionner nos médias. Ce jeudi encore, le site Les Jours croit savoir que Pigasse veut voler au secours d’iTELE (groupe Canal), en rachetant la chaîne d'information continue en grève depuis plus d’une semaine. Il y a quelques jours encore, c'estLibération qui consacrait un article au banquier d'affaires et à sa soif d'investir dans la presse. Après s'être rendu propriétaire des Inrocks et de Radio Nova, le banquier qui a investi dans Vice France et détient, avec Xavier Niel et Pierre Bergé, 64% du groupe Le Monde (Le Monde, L'Obs, Télérama, Courrier international) ne cachait pas son ambition : "Devenir leader en Europe des contenus alternatifs".
C'est là tout l'objectif de sa holding "Les nouvelles éditions indépendantes" (LNEI) qui regroupe l'ensemble des parts de Pigasse dans la presse, et avec laquelle il entend bien multiplier les acquisitions. "Notre ambition est grande, voire très grande", proclamait Pigasse dans Libé. Et le quotidien d'expliquer que le banquier auto-estampillé de gauche peut désormais compter "sur deux géants du capitalisme mondial", venus injecter des gros sous à son projet d'empire médiatique européen :"Le Britannique WPP, leader de la publicité, et le conglomérat indien Reliance." Selon Libé : "Pigasse refuse de donner un chiffre mais assure que cela lui apporte une capacité d’investissement de plusieurs centaines de millions d’euros par effet de levier." WPP, numéro 1 mondial de la com' qui s'allie à Pigasse ? Des Echos à Capital.fr en passant par Le Figaro, l'info a été reprise en boucle.
Mais qu'en est-il de Reliance, cet autre "géant du capitalisme mondial"? "Le conglomérat indien Reliance [est] présent dans les télécoms, la construction ou le divertissement", résume Le Figaro. Ce que n'expliquent pas en revanche les médias français, c'est que le nouveau partenaire indien de Pigasse est aussi spécialisé dans la conception et la production de technologies militaires, comme le rappelle ce jeudi la lettre des professionnels du renseignement, Intelligence Online.
Reliance construit les Rafale de Dassault
Tenu par les frères milliardaires indiens Anil et Mukesh Ambani, Reliance est entré de plain-pied dans le secteur de l'équipement militaire en 2015. Depuis, il a multiplié les partenariats de défense avec l'Ukraine (avions), avec Israël (missiles air-air), avec Singapour (engins volants) et avec la France. En effet, Reliance est devenu en moins d'un an le partenaire indien privilégié de la Défense française, explique Intelligence Online qui rappelle que le conglomérat indien est désormais "courtisé de toutes parts par le business français". Et pas n'importe quelles entreprises : Thalès tout d'abord, qui confie à Reliance ses technologies en matière de sous-marin, sans compter le groupe naval DCNS pour lequel l'industriel indien produit des navires de guerre… Enfin, c'est désormais le groupe Dassault (propriétaire du Figaro) qui fait appel à Reliance. Suite à l’achat record de 36 avions de chasse Rafale par l’Inde, l’avionneur français et le conglomérat indien ont en effet annoncé la création d’une co-entreprise baptisée Dassault Reliance Aerospatial (DRA).
L'objectif ? Fabriquer en Inde plusieurs parties des Rafale. Un deal à plus de 8 milliards d’euros, expliquait Le Monde il y a quelques jours. Et Pigasse dans tout ça ? Pas un mot dans le quotidien sur le deal passé entre Reliance et le patron de presse. Pourtant, à en croire un spécialiste de l’intelligence économique contacté par @si, "qu’un groupe indien de cette ampleur, qui signe à la pelle de gros contrats de Défense, soit allé chercher à investir dans Les nouvelles éditions indépendantes de Pigasse, c’est pour le moins inattendu."
L'industriel indien, partenaire de choc pour Julie Gayet
Visiblement, l'exception culturelle française captive le multimilliardaire indien. Comme l'a découvert @si, hormis Pigasse, Reliance a trouvé en début d’année un partenaire privilégié en la personne de... Julie Gayet. Le 24 janvier dernier, le groupe Reliance annonçait, dans un communiqué repris par la presse indienne, la conclusion d'un partenariat avec Rouge international, la société de production de la compagne du chef de l’Etat.
Jusqu'ici, lorsque Reliance s’était aventuré, via sa filiale entertainement, sur le terrain du divertissement, c'était pour injecter de gros sous dans des blockbusters indiens et plus rarement internationaux (Le Bon gros géant de Steven Spielberg, sorti en 2016, par exemple). Et voilà que le PDG du groupe indien annonce le 24 janvier dernier qu'il va coproduire avec Gayet le premier long métrage français de Serge Hazanavicius (en salle en mars prochain), avec en tête d’affiche Kev Adams. Mais ici, c’est surtout le timing qui interpelle.
Le PDG du Groupe Reliance, Anil Ambani, notoirement proche du président indien, a choisi de faire cette annonce le jour même où François Hollande était en visite officielle en Inde pour tenter de conclure la vente des Rafale. "L’annonce [de Reliance] est intervenue le jour où le président français François Hollande arrive à Chandigarh pour entamer une visite officielle de trois jours", notait à l’époque la presse indienne. Le film de la compagne du chef de l'Etat produit par le partenaire indien de la défense française ? Un scénario en or pour un futur film de Julie Gayet...
Contactées par @si, la société de production de Julie Gayet Rouge international et Les nouvelles éditions indépendantes n'ont pas donné suite à nos sollicitations.