Pour google, la presse ne pèse pas si lourd
Aurore Gorius - - 0 commentaires
La presse peut-elle faire flancher Google ? Du côté du quotidien économique Les Echos, on en doute. Dans un article publié sur son blog Monday Note, Frédéric Filloux, le directeur général des activités numériques du groupe Les Echos, explique pourquoi les sites d'information ne sont pas un enjeu si important pour l'économie du moteur de recherche.
Les contenus des sites de presse ne représentent qu'une "petite fraction" des 40 milliards de pages indexées par Google. En moyenne, un quotidien en ligne ajoute entre 20 000 et 100 000 nouvelles pages par an, explique Filloux, soit quelques gouttes d'eau dans un océan. D'ailleurs, après recherche, "peu de résultats renvoient à des contenus appartenant à de grands médias", constate-t-il. Même constat parmi les recherches les plus fréquentes dans le moteur de recherche : les sites d'information sont absents. Arrivent en tête : Facebook, Le bon coin, youtube, Orange, météo, TV... Les mots les plus recherchés en France |
Autre constat, les contenus des sites de presse ne rapportent pas d'argent au moteur de recherche. Parmi les mots les plus recherchés, ceux qui rapportent le plus d'argent à Google sont "assurance", "prêt", "crédits" ou encore "avocat" ou "software" car des publicités peuvent être ajoutées à côté des résultats. Ces termes ne sont pas les plus utilisés par la presse traditionnelle. Et les mots-clefs les plus recherchés de l'actualité tel que "ouragan Sandy" ne se prêtent pas à l'ajout de publicités en rapport avec la recherche.
La stratégie de développement de Google, insiste Filloux, ne repose pas sur le contenu des sites d'information, mais plutôt sur les comparateurs de prix. Le moteur de recherche veut couvrir le plus large espace possible sur le web. Ainsi, pour agréger les recherches les plus fréquentes et rentables (voyages en avion, assurances), Google lance ses propres comparateurs qui étouffent ses concurrents. S'il ne les a a pas lui-même achetés. En juillet 2010, le rachat du plus gros moteur de recherche aérien en ligne, ITA software, lui a permis de lancer son propre outil, Google Flight Search.
Des contenus moins bien répertoriés
Google veut aussi devenir un outil de la connaissance à part entière. Un sorte de grand aspirateur à informations, mais qui, encore une fois, ne s'appuie pas sur les sites d'information. En juin 2010, il a ainsi acquis l'outil "Metaweb" qui agrège des informations issues de 230 sources allant de la Fédération internationale de football (FIFA) à Eurostat. La seule source hexagonale ? Allocine.fr. On trouve parmi elles une dizaine de médias seulement. Car les banques de données de ces sources sont mieux répertoriées et structurées que celles des sites d'information.
Vers un accord secret ?
Dans le bras de fer engagé par les éditeurs contre Google, les sites d'information ne sont pas en position de force. Il sera difficile de faire plier Google avec un projet de loi. Pourquoi Google devrait-il payer pour une source d'information "secondaire"? Et, comme nous l'expliquions précédemment, le projet de loi n'explique pas sur quels critères faire payer Google. Est-ce pour cette raison que la négociation semble la voie privilégiée ? C'est en tout cas ce que la ministre déléguée à l'Economie numérique, Fleur Pellerin, a proné à la sortie de la réunion avec le PDG de Google, Eric Schmidt, la semaine dernière à l'Elysée. Ce dernier a confimé cette piste aujourd'hui : « nous avons eu de bonnes discussions et je m'attends à ce que nous parvenions à une sorte d'accord d'ici la fin de l'année », a-t-il déclaré au New York Times.
Dans un article mis en ligne au lendemain de la venue d'Eric Schmidt à Paris, le rédacteur en chef de numerama.fr, Guillaume Champeau, explique que les deux parties pourraient avoir intérêt à "un petit arrangement entre amis". "Google (...)pourrait accepter de rémunérer quelques uns d'entre eux, pour éviter une loi qui aurait pour effet de tous les rémunérer", explique Champeau. Une solution qui arrangerait bien aussi les éditeurs de presse. Ceux qui ont mené la fronde réussiraient ainsi à obtenir de l'argent, au détriment du plus grand nombre. "Si l'on considère que l'indexation des contenus doit donner lieu à rémunération (...) ce sont alors tous les contenus qui devraient être rémunérés pour leur indexation, et pas uniquement ceux d'organes de presse constitués en sociétés de presse. Or l'accord privé sera par définition privé, et donc très probablement secret", note Champeau. Impossible alors de connaître le prix que Google est enclin à payer pour référencer certains sites de presse français qui ne constituent pas le noyau dur de ses sources d'information.