Plan B : plaintes contre Varoufakis

Anne-Sophie Jacques - - 0 commentaires

Varoufakis ministre, économiste, hacker, et maintenant traitre ? Les révélations sur le "plan B" fomenté par l’ancien ministre de l’économie grec en cas d’échec des négociations avec les créanciers se traduisent aujourd’hui par deux plaintes déposées auprès de la Cour suprême, l’une par le chef de file du parti Teleia, l’autre par un avocat qui accuse Varoufakis de trahison. L’ancien ministre, qui se défend d’avoir voulu mettre en action son plan, est soutenu par certains économistes dont James K. Galbraith et Jacques Sapir.

Après avoir révélé les contours du plan B imaginé par Yanis Varoufakis – la mise en place d’un système bancaire parallèle basé sur une monnaie provisoire comme nous le racontions ici – le journal conservateur Kathimerini est revenu sur le sujet hier en assurant que la Cour suprême grecque a transmis au Parlement deux plaintes déposées contre l’ancien ministre des finances. Selon Le Monde qui reprend l’information, la première est signée du chef de file du parti Teleia et accuse Varoufakis d’avoir exposé la Grèce à des représailles ; quant à la seconde, déposée par un avocat, elle l’accuse carrément de trahison.

Le quotidien ajoute qu’une "troisième plainte pourrait être déposée par un groupe de cinq avocats s’il s’avère que des personnalités non politiques ont participé au projet. Elles seraient alors poursuivies pour violation de données privées, manquement à une obligation, appartenance à une organisation criminelle et violation des lois". En effet, dans l'échange de Varoufakis avec des membres d'un fonds d'investissement révélé par Kathimerini, l'ancien ministre raconte avoir sollicité un ami d’enfance pour l’aider à pirater les installations de l’administration fiscale. Cet ami – "personnalité non politique" visée par cette menace de plainte – est spécialiste en sécurité informatique à l’université de Columbia. Si on ne connaît pas son identité, on suppute, selon Le Monde, qu’il s’agit de "Michalis Hatzitheodorou, secrétaire général des systèmes informatiques. Ce dernier a formellement démenti ces accusations mardi dans un communiqué".

Varoufakis a répliqué  sur son blog à l’accusation de trahison, "bizarres allégations" qui reflètent selon lui la volonté de discréditer cinq mois de négociations avec la Troïka. Pourtant, ajoute-t-il, "il est évident que le gouvernement grec a le devoir de récupérer la souveraineté nationale et démocratique sur tous les départements de l’État, et en particulier ceux du ministère des Finances. S’il ne le fait pas, il continuera à confisquer les instruments de l'élaboration des politiques que les électeurs attendent à utiliser dans la poursuite du mandat qu'ils lui sont dévolues".

C’est sur son blog aussi que James K. Galbraith donne sa version de l’affaire du plan B comme le note le site de L’Obs. L’économiste raconte sa collaboration avec Varoufakis et un groupe de travail afin d’étudier "les questions opérationnelles qui se poseraient si la Grèce était contrainte d'émettre une monnaie parallèle voire de quitter l'euro". En aucun cas, précise-t-il, ces travaux n’avaient pour but de précipiter la sortie de la Grèce de l’euro, mais bien de se préparer à cette éventualité. De même, ce plan B n’avait pas pour objectif de jouer un rôle dans les négociations entre la Grèce et les créanciers. L’économiste assure avoir achevé cette collaboration en mai et que le groupe de travail a rendu un long mémorandum exposant les différents scénarios. Il tient également à préciser que ce travail n'était ni officiel, ni rémunéré.

Un long mémorandum dans lequel, croit savoir Jacques Sapir, le système de paiements parallèle n’était que l’un des éléments du plan B. Sur son blog, l’économiste assure que "la réquisition des banques et de la Banque Centrale, dans le cadre des pouvoirs d’urgence qu’auraient dû réclamer Tsipras, en faisait partie. Dans les conversations que j’ai eues avec des membres du cabinet, j’ai expliqué qu’il fallait être conscient que ces mesures de réquisitions constituaient une rupture des traités, et qu’il fallait les présenter comme une réponse aux actions illégales de la BCE envers la Grèce". Une explication qu’il avait déjà formulée face à Jean-Luc Mélenchon lors de notre émission consacrée à l’hypothèse d’une sortie de l’euro.

Autre émission à voir ou à revoir : Grexit: "en théorie, je suis pour. Mais j'ai peur de ce chaos-là"

Lire sur arretsurimages.net.