Plagiat Laborde : Fayard condamné (Acrimed)

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Cinq passages contrefaits. Dans son jugement rendu le 7 juin, relayé par Acrimed, le Tribunal de Grande instance de Paris a condamné les éditions Fayard à 35 000 euros d'amende pour contrefaçon. En cause : un plagiat de Françoise Laborde, membre du Conseil Supérieur de l'Audiovisuel, pour son livre, Ne vous taisez plus !, co-écrit avec Denise Bombardier et publié en 2011.



Elles avaient bien pioché dans un article de Slate.fr. En pleine affaire DSK, Françoise Laborde (ex-journaliste à France 2, et membre du CSA) et Denise Bombardier avaient publié un essai pour dénoncer le machisme ambiant. Le tribunal de grande instance de Paris a estimé que cinq passages de leur livre ont repris, sans le citer, des extraits d'un article de Claire Levenson, journaliste new-yorkaise, publié sur Slate.fr. Parmi les cinq passages contrefaits, cités dans le jugement, il y a ceux-ci :

Extrait de l'article original de Slate.fr (juin 2011)

Extrait du livre de Laborde/Bombardier (oct. 2011)

"L’attitude française, elle, est en partie liée à une tradition intellectuelle qu’a examinée l’historienne de Princeton Joan Scott. Celle-ci soulignait récemment dans le New York Times que pour certains historiens et sociologues français, l’«alternative à l’égalité entre les sexes est l’acceptation d’un jeu des différences érotisé»".

"L’attitude française serait liée à une tradition intellectuelle qu’a soulignée récemment dans le New York Times l’historienne Joan Scott. Celle-ci indique que, pour les Français, l’«alternative à l’égalité entre les sexes est l’acceptation d’un jeu érotisé des différences»".

"L'idée est que la femme acquiert du pouvoir en étant désirée par les hommes, et que grâce à cela elle parvient à rééquilibrer le rapport de force. Scott ajoute que pour ces intellectuels (elle cite Claude Habib, Mona Ozouf et Philippe Raynaud), le féminisme est vu comme un « apport étranger », en décalage avec les moeurs françaises".

"Ainsi, la femme acquerrait du pouvoir en étant désirée par les hommes et pourrait de la sorte rééquilibrer le rapport de force. Le féminisme serait, de ce point de vue, un « apport étranger », en décalage avec les moeurs françaises".

"Le modèle défendu est celui d'une « galanterie française » à distinguer du combat égalitaire des féministes américaines, accusées de forcer les femmes à nier leur féminité. Pour ce courant, il s'agit d'opposer le « commerce heureux entre les sexes » (Mona Ozouf) à la judiciarisation excessive des rapports aux États-Unis. Ce discours a d'ailleurs été « construit en réaction contre la politisation des questions sexuelles aux États-Unis à partir de la fin des années 1980 », souligne le sociologue Éric Fassin".

"Le modèle – celui d'une « galanterie française » est à distinguer du combat égalitaire des féministes américaines, accusées de forcer les femmes à nier leur féminité. Pour ce courant, il s'agit d'opposer le « commerce heureux entre les sexes » à la judiciarisation excessive des rapports aux États-Unis. Ce discours de l'exception française a d'ailleurs été construit en réaction à la politisation des questions sexuelles en Amérique à la fin des années 1980".

Pour ce plagiat, les éditions Fayard sont condamnés à verser 20 000 euros à Claire Levenson pour atteinte "à son droit moral d'auteur" et 15 000 euros aux Editions Syllepse (l'article de Slate.fr ayant été reproduit dans un ouvrage collectif).

"Si les auteures de ce plagiat (attribuables en fait à la seule Françoise Laborde selon les déclarations réitérées et insistantes de son co-auteur) ne sont pas elles-mêmes condamnées, c’est parce Fayard n’a pas voulu appeler en garantie les auteures du livre Ne vous taisez plus ! alors que la loi et le contrat d’édition prévoient un tel mécanisme", précise Acrimed.

Un nouvel élément pour notre copieux dossier : "Edition, media, critiques : le pacte infernal".

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