Piscine réservée aux femmes à Lille : Libé se contredit

Laure Daussy - - 0 commentaires

A chaque campagne électorale, la polémique revient. La droite accuse Martine Aubry d’avoir réservé des horaires de piscine à Lille pour des femmes musulmanes. Ces dernières semaines le sujet est revenu immanquablement sur la table, et notamment dans la bouche de Nicolas Sarkozy.

Selon le sous-titre d'un article publié aujourd'hui dans Libération, ces accusations sont infondées. Pourtant, le contenu de l'article est bien moins tranché.

Les horaires de piscine à Lille resurgissent. En meeting dans le Loiret fin mars, Nicolas Sarkozy a mis en cause la maire de Lille: "Sur le territoire de la République, nous voulons dans nos piscines municipales, désolé madame Aubry, les mêmes horaires pour les hommes et les femmes." Des critiques réitérées lors d'un déplacement à Nîmes. Libé a enquêté sur le sujet, et assure, en sous-titre de son article : "Le chef d’Etat a accusé à tort la maire de Lille d’avoir réservé des horaires pour les musulmanes. La réalité: une affaire de surpoids et de pudeur".

Mais le corps de l'article ne dit pas tout à fait ça...

Qu'en est-il réellement ? Au départ, il s'agit de cours d'aquagym, réservés à des femmes atteintes d'obésité. L’histoire commence à la fin des années 90, sous Pierre Mauroy, le prédécesseur de Martine Aubry à la mairie. Denise Cacheux, ancienne députée socialiste et présidente d'un centre social lui demande de réserver un créneau spécifique pour un programe pour des obèses. "Elles n’avaient pas de sous. J’ai négocié avec Pierre Mauroy un créneau d’une heure d’aquagym pour ces femmes obèses qui n’avaient pas envie qu’on voie leurs débordements de maillots", explique Cacheux à Libé. Puis, des habitantes du quartier d'origine maghrébine sont venues s'y inscrire, une cinquantaine au total. "Des femmes du cours d’alphabétisation portant le foulard", précise la députée à Libé. Elles ont demandé à occulter les hublots, "parce que des gamins du quartier venaient ricaner". Elles ont aussi obtenu qu'il n'y ait que des femmes maîtresses-nageuses, explique le journal.

En juillet 2003, lorsque Aubry arrive à la mairie, elle poursuit ce programme. L'opposition municipale l’accuse de réserver des créneaux aux "musulmanes". Si Aubry nie aujourd'hui toute entorse à la laïcité, à l'époque, elle répond: "Faisons un petit détour [de nos principes républicains] pour que ces femmes gagnent et acquièrent leur émancipation", cite Libé. Un élément qui permet de nuancer, donc, ce qu'affirme le journal dans son sous-titre.


"Qui veut la fin, met les moyens"



L'Express
, qui a enquêté aussi sur le sujet, donne d'autres précisions : les femmes d'origine maghrébine qui participaient au cours ont aussi demandé "un créneau à part pour être entre elles". Mais cette demande a été rejetée par le centre social. "En revanche, une autre revendication sera prise en compte: que les cours d'aquagym soient impérativement assurés par une femme". "C'était pour que les maris acceptent qu'elles puissent venir, sinon elles seraient restées chez elles", confesse aujourd'hui Denise Cacheux qui refuse cependant de voir là une entorse à la laïcité. "Qui veut la fin, met les moyens", se justifie-t-elle", écrit L'Express.

Sur France inter, fin mars, Martine Aubry est revenu sur le sujet, expliquant que le créneau était réservé à des femmes atteintes d'obésité, au sein desquelles "il y a une partie de femmes d'origine maghrébine". Le "petit détour" aura duré de 2000 à 2008, précise Libé. Désormais, "dans 80 % des cas, il y a au moins un homme parmi les deux surveillants", indique un salarié municipal. Un tiers des femmes ont quitté l’aquagym, pour cause de hublots ouverts et de maîtres nageurs masculins.

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