Pas vu dans Le Figaro : proche de Dassault condamné à 15 ans de prison
Robin Andraca - - Silences & censures - Financement des medias - 0 commentairesUn proche de Serge Dassault a été condamné, mercredi 18 mai, à quinze ans de prison pour tentative d'assassinat (alors que l'avocat général avait requis une peine de douze ans). Comme l'a noté Le Petit Journal, toute la presse nationale a repris l'info sauf... Le Figaro, propriété de l'avionneur. Dassault épargné par son propre journal ? Juste une vieille habitude.
Difficile de passer à côté de l'info cette semaine. Le Monde, Libération, L'Obs, Le Parisien, Le Point, L'Express, Francetv info, Mediapart, 20 Minutes, BFMTV, Marianne : toute la presse nationale s'est penchée cette semaine sur le cas de Younès Bounouara, proche de Serge Dassault, condamné à quinze ans de réclusion pour tentative d'assassinat. Le 19 février 2013, Bounouara a tiré sur Fatah Fou, qui circulait en voiture dans le centre de Corbeil-Essonnes, en région parisienne. "M.Bounouara était devenu l’un des«préférés»de M. Dassault quand ce dernier a ravi la ville aux communistes en1995. L’industriel l’a notamment utilisé comme relais dans le quartier des Tarterêts pour désamorcer les émeutes", précise Le Monde.
Le Monde, 18/05/2016
En toile de fond dans cette affaire, les soupçons d'achat de votes aux élections municipales de Corbeil-Essonnes qui valent à Serge Dassault, maire de la ville de 1995 à 2009, une mise en examen dans un dossier distinct. En 2009, la victime avait en effet dénoncé au Conseil d'Etat des achats de votes, contribuant à l'annulation des élections et la condamnation de Dassault à un an d'inéligibilité.
A-t-il été question de cette condamnation, ou même de ses prolongements, dans Le Figaro, propriété de l'avionneur ? Absolument pas, pas une ligne, que ce soit dans les pages du journal ou sur son site internet.
Il a pourtant déjà été fait mention de Bounouara sur le site du Figaro. Le 6 novembre 2013, dans une petite brève, on apprenait ainsi que Bounouara, "suspecté d'être l'auteur d'une tentative d'assassinat en février à Corbeil-Essonnes (Essonne)", s'était rendu à la justice. "En fuite depuis le 19 février, il a été appréhendé par la police à sa descente de l'avion et devait être présenté dans l'après-midi aux juges du tribunal d'Evry en charge du dossier, en vue d'une probable mise en examen. Le sénateur (UMP) Serge Dassault (propriétaire duFigaro) a été entendu le 14 octobre comme témoin assisté dans ce dossier", précisait LeFigaro.fr.
Même chose en octobre 2013 après l'audition en tant que témoin assisté de Dassault, entendu pendant quatre heures par trois juges d'instruction d'Evry qui enquêtaient alors sur cette tentative d'assassinat. "Ce dernier, qui réfute pied à pied toutes les accusations portées contre lui dans les deux dossiers, s'est expliqué sur ses liens avec le fuyard. Il admet que M.Bounouara l'a longtemps aidé à mieux connaître les quartiers populaires de Corbeil et les problèmes de leurs habitants. Lorsque M.Dassault a quitté la mairie, il a considéré que cette collaboration n'avait plus lieu d'être. Pour autant, il a souhaité aider financièrement l'homme, avec lequel il avait tissé « une relation importante, affective et ancienne », pour un projet industriel en Algérie - d'où une remise de fonds à l'été 2011", écrivait alors le chroniqueur judiciaire du journal, Stéphane Durand-Souffland.
Et ce n'est pas la première fois que Le Figaro épargne son patron. Le bureau du Sénat qui refuse de nouveau la levée d'immunité de Serge Dassault en janvier 2014 ? Pas vu dans Le Figaro. Le comptable suisse de l'avionneur qui aurait remis près de 53 millions d'euros en liquide à Dassault entre 1995 et 2012 ? Service minimum. Enfin, les violences dans la ville de Dassault ? Pas un mot, non plus, dans Le Figaro.