Paparazzi : la plainte "déséquilibrée" de Macron

Juliette Gramaglia - - 0 commentaires


Doit-on vraiment porter plainte contre un photographe lorsqu'on est président, et donc protégé ?

Après la plainte pour "harcèlement et tentative d'atteinte à la vie privée" déposée par Emmanuel Macron contre le photographe Thibaut Daliphard, la question se pose à nouveau. Car le président de la République dispose de l'immunité présidentielle qui le rend "intouchable" : nul ne peut porter plainte contre lui, même en étant poursuivi par lui. Une situation unique.

Et pour Mediapart, qui revient ce 16 août sur le "déséquilibre" entre les deux parties dans cette histoire, cela ne fait aucun doute : que Macron attaque un photographe dans ces conditions "risque de faire pencher la balance de la justice de son côté". Le site d'information rappelle ainsi à titre de contre-exemple qu'en 2014, lorsqu'était parue dans Closer la photo de François Hollande en scooter allant retrouver Julie Gayet, le président avait décidé de ne pas porter plainte, mettant en avant une "question de principe" et expliquant qu'il refusait le "deux poids deux mesures".

Mediapart, 16 août 2017

Pour rappel, Daliphard, qui s'était illustré dans cette spécialité en 2014 avec une photo à la Une de Voici montrant François Hollande à la plage, le front enduit de crème solaire, a été placé en garde à vue le week-end dernier alors qu'il essayait de prendre en photo le couple présidentiel, en vacances à Marseille.

Une de Voici avec la photo prise par Daliphard

L’Élysée assure que Daliphard, qui a couvert la campagne de Macron pour l'agence E-Presse, qu'il dirige, s'est introduit dans la demeure où logent Emmanuel et Brigitte Macron, mais ce dernier a démenti. "Cas d’école, pointe Mediapart : voudrait-il déposer plainte contre Emmanuel Macron pour diffamation qu’il ne le pourrait pas. Le président peut raconter ce qu’il veut sur ce photographe, sans se soucier d’être poursuivi". 

Toujours est-il que pour plusieurs photographes d'agence de presse contactés par le site, la démarche de Macron ne manque pas d'hypocrisie, quand on sait comment il s'est mis en scène pendant sa campagne. Reçu sur notre plateau en mars dernier, en pleine campagne présidentielle, le rédacteur en chef de Paris Match Bruno Jeudy racontait par exemple les "fausses paparazzades" du couple Macron : "les personnalités politiques ne posent pas, elles ne savent même pas où est le photographe", expliquait Jeudy. Mais elles savent que ce jour-là, à cette heure-là, des photographes seront présents.

Autre preuve, s'il en fallait, que Macron n'a pas toujours dédaigné la présence de photographes pendant ses déplacements personnels : un contrechamp éloquent du couple Macron se promenant dans les dunes du Touquet, sous les yeux attentifs des photographes fascinés de la presse étrangère.

Photo en contrechamp du couple Macron en balade dans les dunes du Touquet

"Avec cette plainte, il ne s'agit sûrement pas de « protection de la vie privée » mais avant tout du contrôle total de l'image et de protéger l'accord qui lie les Macron à «Mimi» [Michèle Marchand, directrice de l'agence Bestimage, qui gère les "paparazzades" des Macron, ndlr]", estime ainsi un photographe à Mediapart. Et ce photographe, qui reste anonyme, de rappeler que le photographe "attitré" de l'agence Bestimage qui suit Macron et son épouse depuis la campagne pour des photos "volées" n'est autre que Sébastien Valiela... celui-là même qui photographiait Hollande en scooter en 2014.

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