OGM : Séralini réfuté officiellement
Laure Daussy - - 0 commentairesLes tumeurs qui tournaient en boucle dans les médias ne seraient dues qu’au hasard et pas à la toxicité du maïs transgénique.
Coup sur coup, l’étude du professeur Gilles-Eric Séralini sur la toxicité du mais transgénique – à laquelle nous avions consacré une émission - a été réfutée aujourd’hui par le Haut conseil des biotechnologies (HCB) et l'Agence de sécurité sanitaire. Les deux institutions ont pointé les insuffisances des travaux du professeur et recommandent des études supplémentaires, comme le précise l’AFP (dépêche reprise ici par le Nouvel obs). |
Premier à se prononcer, le Haut conseil des biotechnologies (HCB) qui statue sur les risques sanitaires et environnementaux des plantes génétiquement modifiées, estime que "les conclusions d'effets délétères de la consommation de maïs NK603 ne sont pas soutenues par l'analyse des résultats présentés dans l'article", publié par Séralini. Le HCB estime donc que "cet article ne remet pas en cause les conclusions des évaluations précédentes sur cet OGM", qui avaient conclu à l'innocuité du produit. Un autre organisme public, l'Anses (agence sanitaire), saisie par le gouvernement, a également réfuté l'étude, tout en soulignant "le nombre limité de publications traitant des effets potentiels à long terme d'une consommation d'OGM associés à des pesticides". Ces avis sont ainsi dans la droite ligne de celui produit par l'agence européenne de sécurité sanitaire (Efsa) début octobre.
Pourquoi cette décision? Séralini a effectué une étude sur deux ans, et assurait que les rats nourris avec du maïs transgénique montraient un risque accru de tumeurs mammaires et d'atteintes hépato-rénales. Le Pr Jean-Christophe Pagès, qui préside le comité scientifique du HCB, cité par Le Figaro, explique : "certains groupes de rats mâles traités ont une survie un peu meilleure que le groupe témoin et les différences observées sur les femelles sont dues au hasard". Même constat pour les pathologies du foie ou des reins constatées sur les rats: ou bien les données fournies par Séralini ne permettent pas de conclure à un risque toxique, ou bien elles sont contradictoires, selon le HCB. "Nous avons été interpellés par le fait que les données publiées avaient été choisies par les auteurs qui ont refusé à deux reprises de nous transmettre leurs données brutes", poursuit le Pr Pagès. Sur notre plateau, Séralini s'était longuement expliqué sur ce refus de communication des données brutes.
En question aussi, le nombre de rats utilisés. "Dix rats sont suffisants pour mener une étude à court terme sur trois mois, mais pour mesurer un effet à long terme il faut des lots de 50 animaux" explique Pagès. Seralini s'était défendu en expliquant que son étude avait "des limites statistiques comme toutes les études faites avec dix rats" par groupe étudié. "Mais l'Efsa (l'agence européenne de sécurité des aliments, ndlr) a autorisé des maïs transgéniques sur la foi d'études avec 5 ou 6 rats, des travaux produits par l'industriel lui-même qui ne communique pas les données brutes de l'étude", déplorait le biologiste. Interrogé par LCI, à la mi-journée, Séralini a jugé "intolérables" les conclusions du HCB. Interviewé sur notre plateau, Seralini soulignait les "conflits d'intérêt' du HCB, qui, habituellement, "n'analyse que les données des industriels".
Le HCB a toutefois recommandé qu'une étude de long terme soit effectuée pour "lever le doute qui s'est installé dans l'opinion après les scandales sanitaires de ces dernières années", selon la présidente du Conseil économique éthique et social du HCB , le Pr Christine Noiville. L'Anses note de son côté "l'originalité" de l'étude de Séralini "qui aborde un sujet jusqu'ici peu étudié: celui des effets à long terme des OGM associés aux préparations phytopharmaceutiques", et "recommande" donc d'engager des travaux sur ces questions.
Enfin, pour la première fois de leur histoire, six Académies (Agriculture, Médecine, Pharmacie, Sciences, Technologies et Vétérinaire) ont publié vendredi dernier un texte commun dans lequel elles qualifient l'étude de "non-événement scientifique" dont "les nombreuses insuffisances" ne permettent "aucune conclusion fiable".
Retrouvez notre émission sur le sujet.