-
kawouede
Voici un article du Monde qui mérite lui aussi un "droit de suite"
http://www.lemonde.fr/culture/article/2008/04/24/comment-a-echoue-une-exposition-critique-des-photos-de-paris-occupe_1038025_3246.html#ens_id=1033629
Je copie-colle pour qu'il reste connu des @sinautes
La polémique autour de l'exposition du photographe André Zucca (1897-1973), présentée à la Bibliothèque historique de la Ville de Paris (BHVP) jusqu'au 1er juillet sous le titre "Les Parisiens sous l'Occupation", ne cesse de rebondir.
Depuis quinze jours, plusieurs voix dénoncent un accrochage qui ne révèle que de jolies bluettes en couleurs et masque à la fois la réalité dramatique de l'époque et le fait qu'il s'agit de photos de propagande réalisées par un auteur au service du bimensuel allemand et nazi Signal.
La municipalité vient de supprimer des rues les affiches sur une exposition que Christophe Girard, adjoint (PS) au maire de Paris chargé de la culture, qualifie d'"indécente" et apparente à du "révisionnisme mondain".
Pourtant, Le Monde peut aujourd'hui révéler qu'une exposition André Zucca d'une tout autre ambition, conçue au début des années 2000 au sein même de la BHVP, fruit d'un long travail sur les archives, et qui visait à montrer toutes les facettes du personnage, a été préparée avant d'être abandonnée.
En 1986, le fonds Zucca - 22 000 négatifs dont 6 000 sur la période d'Occupation (1 058 en couleur) - est acheté 500 000 francs par la BHVP. Pendant trois ans, Liza Daum, de la BHVP, réalise l'inventaire de l'oeuvre, qui court des années 1930 à 1970. Cette dernière s'associe ensuite à Evelyne Desbois, chercheuse au CNRS, pour travailler, pendant trois ans, à une exposition et à un livre sur Zucca à la demande de Nicole Zucca, fille du photographe.
Mais au moment de finaliser, c'est le clash. "Nicole Zucca voulait minimiser la période de collaboration de son père", dénonce Evelyne Desbois. Cette accusation est reprise par Sylvie Quesemand-Zucca, veuve du photographe et cinéaste Pierre Zucca (1943-1995), fils d'André. Liza Daum, pour sa part, a refusé de répondre à nos questions, par devoir de réserve.
Nicole Zucca réfute l'accusation. Elle affirme que ce sont Liza Daum et Evelyne Desbois qui ont renoncé au livre et donc au projet. Elle dit même regretter le "minimalisme" de l'accrochage actuel et la "faiblesse" des légendes. Pourtant Nicole Zucca signe, dans le catalogue de l'exposition de la BHVP, une courte biographie de son père pour le moins complaisante. Jean Dérens, directeur de la BHVP - il part à la retraite le 27 avril -, dit que "Daum et Desbois ont arrêté le projet à la suite d'une mésentente familiale".
Le regard que porte Nicole Zucca sur son père semble loin de celui de son frère Pierre, si l'on en croit les films que ce dernier a réalisés, notamment Vincent mit l'âne dans un pré (1975), dédié "à tous les menteurs". Son père est visé en priorité. "Pierre se posait beaucoup de questions, raconte Sylvie Zucca. Il disait que son père était mythomane et antisémite." Elle ajoute qu'elle n'a été associée en rien à l'exposition. "Quand j'ai vu ces photos de propagande transformées en documentation de quartier, j'étais en colère."
Si l'exposition actuelle a provoqué une telle indignation, c'est qu'avant que ne soit ajoutée, récemment, une feuille d'explication à l'entrée, le contexte de propagande était minimisé : il n'était pas indiqué que Signal était un bimensuel allemand et nazi, pas un numéro de Signal ne figure dans l'exposition, et les légendes sont justes topographiques.
"C'est la fascination de découvrir un Paris inédit et en couleurs qui est mise en avant", expliquent Evelyne Desbois, Sylvie Zucca, mais aussi l'historienne Françoise Denoyelle, auteur de La Photographie d'actualité et de propagande sous le régime de Vichy (CNRS éditions, 2003). "L'exposition transforme Zucca en Doisneau de l'Occupation", s'indigne cette dernière.
Jean Dérens se justifie en expliquant que ces photos en couleurs n'ont pas été publiées dans Signal et suggère que Zucca a pu voler les pellicules couleur aux Allemands. Cette position indigne Sylvie Zucca, qui a appelé Jean Dérens au téléphone. "Il m'a raccroché au nez." Françoise Denoyelle est également choquée : "On laisse entendre que Zucca pouvait se promener et photographier à sa guise. C'est une plaisanterie." Elle ajoute : "Ce qu'ont fait les photographes français pendant l'Occupation reste tabou."
Cette exposition est réalisée par Jean Baronnet, un cinéaste qui n'est pas un spécialiste de la photo ni de la période de l'Occupation. "Baronnet a un œil", justifie Jean Dérens, qui ne "regrette rien". Mais M. Baronnet, qui n'a consulté, pour son projet, ni Françoise Denoyelle ni les auteurs du premier projet Zucca, affirme que "surinformer les visiteurs, c'est les prendre pour des imbéciles".
L'historien Jean-Pierre Azéma, auteur d'une préface dans le livre, dit, très énervé, qu'il n'est "pour rien" dans cette exposition, et reproche trois choses à l'accrochage : trop de photos, des légendes "indigentes", et un titre "qui aurait dû être "Des" Parisiens sous l'Occupation et non "Les" Parisiens".
Michel Guerrin
Article paru dans l'édition du 25.04.08 -
kawouede
Extrait de la chronique de Pierre Marcelle du 10 avril:
Historiquement correct
A la Mairie de Paris, le politiquement correct se découvre furieusement tendance, quoi qu’un petit peu à géométrie variable. On parle ici de l’exposition, à la Bibliothèque historique de la Ville de Paris, des photos d’André Zucca, intitulée «Les Parisiens sous l’Occupation» (voir Libération du 8 avril). Le Journal du Dimanche du 30 mars en rendit compte en termes fantaisistes, mais sur un ton de procureur qui suffit, semble-t-il, à déclencher une de ces polémiques dont l’histoire de la collaboration est gourmande.
En découvrant les quelque 250 clichés du reporter que ne publia pas le magazine de propagande nazie Signal, qui pourtant employa Zucca, on n’avait en tête d’autre question que celle que posait le 25 mars dans ces pages Patti Smith à propos du court métrage de propagande anti-islamiste du chef de la droite populiste néerlandaise Geert Wilders : «Est-ce que c’est un bon ou un mauvais film ?» En en sortant, la question ne se posait plus, tant la réponse était évidente. De ce Zucca en liberté, si l’on ose dire, l’œil baladeur, les cadrages sûrs et les compositions éclatantes révèlent un autre piéton d’un autre Paris, l’un et l’autre identifiés, tant sur les panneaux de présentation qu’au catalogue de l’expo, l’homme comme «collabo», la ville comme occupée.
Ces vérités d’évidence devaient ne l’être pas assez pour l’adjoint à la Culture de la mairie de Paris, Christophe Girard, qui s’en émut. Est-ce le retour de la doxa gaullo-mitterrandienne d’une France quasi unanimement résistante (1), à laquelle le discours du Vel’d’Hiv’de Jacques Chirac, en 1995, avait mis, crut-on, un terme salubre, qui pointe à travers l’indignation de l’édile ? Malaise pour malaise, c’en fut un autre que de découvrir, distribué depuis dimanche dernier à l’entrée de l’exposition, cet «avertissement» louvoyant qui, tout en rendant hommage à «un témoignage précieux», jette un doute bien peu historique sur le caractère inédit des images exposées (2) et un implicite opprobre sur l’exposition, son commissaire Jean Baronnet, et le conservateur de la BHVP Jean Dérens. Songez ! «Dans ces images, nulle trace de la Résistance, pourtant présente à Paris dès 1940», proclame, avec ses lunettes roses, l’avis au visiteur…
On peut certes déplorer, c’est affaire de point de vue, que mille photos «résistantes» n’aient été simultanément accrochées en regard de celles de Zucca, ou que le Nuit et Brouillard de Resnais ne soit projeté en boucle dans ces lieux. Reste que ce vertueux et municipal souci de «pédagogie» ne nous était pas apparu l’hiver dernier à l’Hôtel de Ville de Paris, où l’exposition «Paris en couleurs» présentait, sans aucun complément d’information, un diaporama de 45 photos de la même série du même André Zucca.
Last, but not least, afin que son propos aille au bout de sa fonction d’éducation civique, ou «citoyenne», on eût apprécié que cet «avertissement», non signé, ne restât pas anonyme comme une lettre de dénonciation.
(1) Conception de l’histoire que la chaîne publique F2 exposa complaisamment, les 18 et 19 février derniers, en diffusant ses deux documentaires-fiction intitulés Vivre libre ou mourir et Quand il fallait sauver les Juifs.
(2) « Il semble que ces photographies n’aient jamais été publiées.» (C’est nous qui soulignons, ndlr) -
delphes
peut-être qu'un vite dit et gratuit aurait suffit non ? -
SylvN
Pour les @si de dans 60 ans...
Les Parisiens pendant l'occupation (de l'Élysée par l'UMP)...
Version "Zucca":
Dans le Marais
Ménilmontant
Paris Plage
Version "Doisneau":
rue de la banque
Divers
Qui suis-je? -
Compte supprimé à la demande de l'utilisateur
Ce message a été supprimé suite à la suppression du compte de son auteur
-
Fandasi pour clavier
"Un pas en avant , un pas en arrière" dite-vous ? Pour une valse, même hésitante , il faut un troisième pas.
Si @si est en vacances en ce moment , il vaudrait mieux le dire . Car en ce moment c'est plutôt du remplissage de vide qu'autre chose. -
Madeleine SCHOTT
Tout est bien qui fini bien : "expo réussie 10 000 entrées". Et combien de livres, ah non de "facicules" vendu à 38€.
LE PEN doit bien rigolé !
Madeleine -
kawouede
A la réflexion et à la lecture de tout ce buzz : je crois qu'on a franchi un pas de plus dans l'américanisation de nos modes de pensée et de réaction, vers ce qu'on appelle couramment, au point d'en oublier le sens, le "politiquement correct". Il est désormais impossible de montrer une expo sans grosses ficelles "grand public" pour bien montrer qu'on sait que "les méchants c'est eux" ; comme disait quelqu'un ailleurs (Pierre Marcelle ou un autre) c'est prendre les gens pour des c...
Au nouveau musée juif à Berlin, on commence par faire écrire aux visiteurs, sur un ordi, "votre prénom en hébreu". Voilà où mène l'excessive contextualisation - essentialisation du passé.
Pauvre Walter Benjamin ! "Surmonter la notion de ‘progrès’ et surmonter la notion de ‘période de décadence’ ne sont que deux aspect d’une seule et même chose." -
kawouede
ça mérite une enquête ça ?
si vous vous arrêtez sur toutes les valses-hésitations de l'exécutif parisien, parce que c'est en rapport avec la dernière chronique du chef... pardon mais @si devient un peu monomaniaque des fois