Notre Dame des Landes : c'était un projet décroissant !
Daniel Schneidermann - - 0 commentairesOn ne le savait pas, et la chose a failli passer inaperçue, mais la décroissance compte aujourd'hui en France
des militants clandestins. D'autant plus clandestins qu'ils étaient insoupçonnables. Qui aurait soupçonné Vinci, la mairie de Nantes, la préfecture de Loire-Atlantique, bref tous les partisans du projet d'aéroport de Notre Dame des Landes, d'être des djihadistes de la décroissance, tapis dans l'ombre ? C'est pourtant ce qui résulte d'un scoop du Canard enchaîné, le mois dernier. S'étant procuré la demande de permis de construire de l'aéroport, l'hebdo révélait que le nouvel équipement serait...plus petit que l'actuel. 28 comptoirs d'enregistrement contre 34, des salles d'attente plus exiguës, 20 places de parkings pour les avions contre 23, etc. Le sous-dimensionnement allégué de l'actuel aéroport n'était donc qu'un leurre. Il s'agissait en fait de réduire le trafic aérien par la dissuasion !
Si l'on avait sû ! Bien embarrassé d'être ainsi démasqué, un porte-parole de Vinci a expliqué au Canard que "la modernisation et le digital" permettent en fait aux clients "de faire plus de choses eux-mêmes" et que "des espaces sont plus multifonctionnels." Et d'ajouter à France 3 Pays de Loire que le nouvel aéroport serait "extensible", et pourrait s'agrandir à partir de 2030. On comprend mieux, du coup, la lettre que Valls vient d'envoyer aux partisans de l'aéroport, leur expliquant que "la détermination du gouvernement était intacte". Ne montez pas sur vos grands chevaux, chers amis de Reporterre ! Le Premier ministre rejoint votre combat. Allez donc, zadistes, chevelus, black blocs : tous pour l'aéroport ! Refaites vos banderoles ! Evidemment, selon les mêmes plans que s'est procuré Le Canard, un poste explose dans le futur aéroport : les surfaces commerciales, qui devaient passer à 2500 m2, soit deux fois plus qu'aujourd'hui. Mais personne ne peut être dupe : un leurre de plus !
Que s'est-il passé ? Dans le reportage de France 3, on croit comprendre (attention, pure déduction) que Vinci et sa bande ont modifié en douce leur projet en 2013, en lui faisant subir une cure d'amaigrissement (à l'exception des boutiques) dans l'espoir fou de le rendre plus acceptable. C'est un trait de génie, mais encore faut-il l'assumer, et l'expliquer. Quoique datant du 8 octobre, le scoop du Canard semble être tombé dans un trou noir dans les medias nationaux (même si on l'avait discrètement relevé ici). On attend la suite avec impatience.