Marges d'erreur : Duhamel ne veut pas "dévaloriser" l'info
La rédaction - - 0 commentairesLes médias usent et abusent des sondages. Mais lorsqu'ils les utilisent, ils ne relaient que très rarement cette précision, pourtant fondamentale : les chiffres doivent être manipulés avec précaution, la marge d'erreur pouvant les faire varier de plus de 2 points, à la hausse comme à la baisse. Pourquoi les journalistes négligent-ils cette précaution élémentaire ? Hier sur RTL, Alain Duhamel a vendu la mèche, assumant tranquillement de ne pas vouloir "dévaloriser" le feuilleton médiatique construit chaque jour sur les sondages.
Chaque semaine, Jean-Michel Aphatie et Alain Duhamel discutent avec les auditeurs de la matinale sur RTL. Le thème de ce jeudi: "Les sondages perturbent-ils la campagne présidentielle?" Pendant le débat, une enseignante en mathématiques, regrette que les médias ne soient pas obligés de publier les marges d'erreur. Comme nous l'a signalé un @sinaute, Duhamel s'explique alors sur les raisons qui poussent les journalistes à ne pas les publier. Avec une franchise rafraichissante "Autant ne pas en parler, on ne va pas dévaloriser chaque nouvelle qu'on donne", déclare-t-il. Autrement dit, mieux vaut ne pas s'embarrasser avec les marges d'erreurs. C'est plus facile pour faire passer l'info et mieux la vendre... |
Pour pallier ce manque, Duhamel donne un conseil: "Il faudrait le dire une bonne fois pour toute (…) mettez vous dans la tête qu'il y a une marge d'approximation". Espérons alors que les auditeurs n'aient pas manqué cet instant fugace...
En fait, l'éditorialiste ne répond pas vraiment à l'auditrice. Elle mentionnait surtout la proposition de loi des sénateurs Hugues Portelli (UMP) et Jean-Pierre Sueur (PS), qui rendait obligatoire la publication des marges d'erreurs.Cette mesure faisait partie d'un texte de loi visant à rendre les sondages politiques "plus sincères et plus transparents". Adoptée à l'unanimité au Sénat le 14 février 2011, cette proposition n'a pas été "retoquée à l'Assemblée" comme le dit l'auditrice. Le gouvernement n'a jamais caché son hostilité à ce texte, issu du rapport d'information des sénateurs, lancé dans la foulée de la polémique sur les sondages payés en partie par l'Elysée et publiés dans la presse, initiée en juillet 2009 par la Cour des comptes. Quelques jours après le vote au Sénat, le président de l'Assemblée nationale déclarait que la proposition "n'étant pas prioritaire" pour le gouvernement, elle risquait de ne pas être examinée par l'Assemblée. Un an plus tard, elle n'a toujours pas été discutée en séance.
Les sénateurs à l'origine du texte de loi avaient expliqué leurs motivations sur notre plateau. Et pour tout savoir sur les sondages dans les médias, vous pouvez consulter notre dossier.
(Luc Nakache)