Mali : un des deux otages tué par l'armée française ? (Libé)

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L'armée a-t-elle tuée accidentellement un des deux otages français enlevés au Niger il y a un an, le 7 janvier, et tués le lendemain au Mali lors de l'opération censée les secourir ? Libération cite aujourd'hui le PV d'audition d'un des terroristes membre du groupe Aqmi, qui "pense" que l'un des otages est mort après que l'armée a tiré sur le véhicule où il se trouvait. La vidéo filmée par l'armée au moment de l'assaut ne permet pas de confirmer cette version. Mais quelques secondes sont restées classées secret défense...

Libérationcite le témoignage (indirect, puisque l'homme n'a pas participé à l'action) de "Mouawiya", 22 ans, entendu à Nouakchott (Mauritanie) le 30 novembre par le juge d’instruction du pôle antiterroriste de Paris Yves Jannier:

Il donne sa version de l'assaut des forces françaises sur le convoi des ravisseurs, qui avaient enlevé les deux Français à Niamey au Niger, il y a un an. Il raconte qu'un des preneurs d'otages a abattu le premier Français, Antoine de Léocour, car il "n’avait plus la force de suivre" la fuite des membres d'Aqmi. Voici ce que dit le terroriste à propos de Vincent Delory, le deuxième otage : "Aucun parmi les éléments de la katiba (brigade d'Aqmi, ndlr) n’avait retiré le deuxième otage, qui avait brûlé dans le véhicule à bord duquel il se trouvait. Pour ma part, je pense que le véhicule a pris feu suite aux tirs d’une part, et d’autre part en raison de l’existence d’essence à son bord."

L'homme ne dit pas explicitement que les coups de feu sur le véhicule ont été tirés par les militaires français. Mais Frank Berton, l’avocat de la famille Delory, interprète cette déclaration dans ce sens, puisqu'elle contredit la version d'abord évoquée, selon laquelle Aqmi aurait incendié le véhicule : "Nous savons désormais, grâce à la déposition de cet homme, que ce n’est pas Al-Qaeda qui a mis le feu au 4x4 mais l’armée française. Cette opération baptisée "Archange foudroyant" porte bien son nom. C’est un véritable désastre. Nous voulons maintenant savoir qui exactement a donné l’ordre de tirer. Et si le but de l’opération était véritablement de sauver les otages." 

Une semaine après le rapt, Aqmi avait déjà affirmé dans un communiqué que l'otage avait été tué par les "bombardements français".

Libé, dans un second article, revient sur la mystérieuse minute manquante de la vidéo des événements, filmée par un avion militaire : "Sur les images de l’opération tournées depuis un ATL-2 et diffusées en septembre par TF1, il manque une minute : celle où le 4x4 blanc prend feu. Malgré la requête de la justice, le ministère de la Défense a décidé de ne pas transmettre cette séquence afin, précisait le ministre Gérard Longuet le 9 décembre dans une lettre au juge, «de ne pas révéler […] certains moyens opérationnels confidentiels»."

Cette minute manquante avait déjà fait l'objet d'un long article dans le quotidien, le 9 novembre : "La vidéo en possession de la justice, et dont des extraits ont été rendus public pour la première fois par TF1 en septembre, retrace l’intervention du Commandement des opérations spéciales (COS) après l’enlèvement dans le centre de Niamey des deux amis d’enfance originaires de Linselles (Nord). On y voit les trois 4x4 conduits par des terroristes dans le désert. Puis l’ordre est donné aux militaires français d’intervenir alors que le convoi franchit la frontière et se dirige vers le nord-est du Mali et le massif de l’Adrar des Ifoghas, où Aqmi possède des bases. Sur le plan suivant, un 4x4 est en feu et des petits points noirs - des ravisseurs - s’enfuient. (...) Les juges ne peuvent déterminer si ce sont les tirs des militaires qui ont provoqué l’incendie du véhicule dans lequel Vincent Delory a péri."

Voici des extraits de la vidéo, diffusée en septembre dans Sept à huit, sur TF1. On y entend un pilote d'hélicoptère dire : "Détruit trois pick up."

Mais on ne voit pas le moment-clépicto

L'armée a-t-elle censuré le passage où un hélicoptère tirerait sur le véhicule ? Les militaires démentent. Jean-Dominique Merchet, le spécialiste Défense de Marianne détaillait leur version en novembre : "Selon nos informations, le refus de déclassification de cette partie de la vidéo n'est pas lié à ce qu'elle contient, mais au souhait de ne pas rendre publiques les capacités maximales de la caméra utilisée ce jour-là. Le zoom est alors a son maximum et cela permet donc de connaitre jusqu'à quel niveau de précision des observations peuvent avoir lieu."

 

Le ministère de la Défense affirmait à l'époque ne pas détenir "d’images quand le 4x4 blanc explose, la caméra était alors focalisée sur un autre véhicule en feu".

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