L'Ukraine vue par la télé russe (RFI)

Gilles Klein - - 0 commentaires

Pour la télévision russe, les manifestants ukrainiens de la Kiev sont des fascistes et des criminels. C'est le constat fait par un journaliste de RFI sur son blog qui prend l'exemple de la chaîne d'information Russia 24

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"Quand on est russe et quand on ne regarde que la télé russe, impossible d’échapper à cette envie d’anéantir les nouveaux gouvernants de l’Ukraine et toute la foule qui les entoure." note Piotr Mmoszynski journaliste à RFI, qui donne en exemple le parti pris de Russia 24, une chaîne d'information basée à Moscou. "Quand toutes les télévisions du monde montraient les policiers ukrainiens tirant sur la foule (...) Russia 24 montrait un autre monde: celui où c’étaient les pauvres et innocents membres de forces spéciales qui étaient persécutés, matraqués, voire tués par les manifestants"

Propriété de VGTRK, la radio-télévision d'Etat russe, Russia 24 couvre l'actualité nationale et internationale. Lancée en 2006 sous le nom de Vesti, cette chaîne a été rebaptisée Russia 24 en 2010. Elle est diffusée en Russie, mais aussi en Europe via par câble et satellite. De plus les abonnés de certains fournisseurs d'accès Internet triple-play (Internet, téléphone, télévision) peuvent la regarder en Pologne, en Estonie ou en Bulgarie, et même en France, avec Free.

Sur Russia 24 les Ukrainiens pro-européens sont présentés comme des fascistes ou "banderistes" explique Mmoszynski. Une référence au nom "de Stepan Bandera, un ultranationaliste ukrainien qui collaborait avec les nazis contre les Soviétiques".

D'où la présence de pancartes anti-nazies portées par des ukrainiens pro-russes régulièrement diffusées à l'antenne comme @si a pu le constater cette nuit picto

Cette manière de traiter l'actualité ukrainienne se fait de manière répétitive explique Mmoszynski : "La télévision russe est allée jusqu’à diffuser en boucle des vidéos qui commençaient à Maïdan pour se terminer par un défilé des SS en Ukraine pendant la Seconde Guerre mondiale. L’amalgame «Maïdan = Bandera = fascistes» marche à plein régime depuis des semaines. Et l’objectif recherché a été atteint: les manifestants prorusses à Donetsk, Kharkiv ou en Crimée répètent à qui veut l’entendre qu’il faut appeler la Russie en aide pour défendre le pays des fascistes qui se sont installés au pouvoir à Kiev."

Et la télévision russe martèle que "face à l’avènement du «fascisme» et du «terrorisme antirusse» en Ukraine, il faut appeler Moscou au secours ou, encore mieux, «rendre la Crimée à la Russie »" mais comme le rappelle Mmoszynski, les Tatars ont peuplé la Crimée du 13e au 18e siècle, jusqu'à l'occupation russe. Donc "si on devait éventuellement rendre la Crimée à quelqu’un, ce serait aux Tatars qu’il faudrait la proposer, et certainement pas aux Russes".

Car ajoute le journaliste "en conséquence de la déportation de tous les Tatars de Crimée, ordonnée par Staline, les chiffres du recensement de 1959 étaient éloquents: 0% Tatars, 71,4% de Russes, 22,4% d’Ukrainiens… Les Tatars n’ont été autorisés à revenir qu’en 1989. Depuis, leur nombre augmente, mais aujourd’hui il dépasse à peine 12% de la population locale, alors que les Russes en font environ 60%."

Sur la stratégie des Russes en Ukraine, voir notre émission "Poutine avait tout écrit".

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