L'étrange "grève" des agences de notation passe inaperçue en France
La rédaction - - 0 commentairesLes agences de notations protestent à la suite de la promulgation, le 21 juillet, par l'administration Obama, de la loi sur la régulation financière
. Elles refusent que, désormais, les notes qu'elles attribuent figurent par écrit dans des prospectus de vente et engagent donc leur responsabilité. Ce qui bloque des émetteurs d'emprunts. Pourtant dans la presse française, même spécialisée : rien. Le sujet serait-il trop aride pour les journaux en été ? L' information, révélée (hors-USA) par une dépêche de l'agence de presse suisse awp (que l'on peut lire ici: dépêche de 6h30), ne trouve d'écho que sur le blog du Monde de Georges Ugeux (PDG d'une mini-banque d'affaires internationales à New-York).
[Petit rappel: les agences de notations sont des organismes qui évaluent le risque de solvabilité financière des Etats, des collectivités locales ou des entreprises en leur attribuant une note au regard de certains critères prévus par des règlementations. Elles mesurent donc le risque de non-remboursement des dettes que présente l'emprunteur. On a beaucoup parlé de ces agences au moment de la crise financière qui a mis en lumière le manque d'exactitude de leurs notes et leur faible réactivité.]
Les agences de notations refusent "de noter les nouvelles émissions d'obligations adossées sur des actifs automobiles notamment, à la suite de la promulgation de la nouvelle loi financière américaine mercredi", explique la dépêche. L'information n'est d'ailleurs que partiellement exacte puisque les agences refusent surtout d'être tenues pour responsables de leur notation. "Elles et ont donc refusé d'entériner des notations depuis mercredi, bloquant ainsi des émissions de dette en préparation".
"La chaîne financière américaine CNBC faisait ainsi valoir jeudi que le constructeur américain Ford voyait une émission obligataire en préparation bloquée à cause du refus des agences de notation de l'évaluer", ajoute la dépêche.
Mais en France, on n'en saura rien. L'information n'a pas été reprise par l'AFP (même si le nom de l'agence apparaît en co-signature dans la dépêche suisse, on n'en retrouve trace sur le fil de l'agence) et échappe donc à la presse. Seule référence au sujet : le blog du banquier Georges Ugeux qui revient sur le "caprice" de ces agences de notation, qui passent de "l'arrogance à la démission". Il n'hésite pas à parler de "grève" pour décrire la situation (terme qui semble un peu fort).
"Apres des années d’arrogance, le Roi est nu. Prétextant de la nouvelle réglementation financière qui leur impose une plus grande transparence, elles ont pris cette décision qui les met hors-jeu. Ce ne sont évidemment pas les agences de notations qui ont souhaité cette décision, mais bien leurs actionnaires parmi les quelles nous rencontrons le Français Fimalac, Warren Buffett et Mc Graw Hill. De quoi ont-ils peur?", explique ce spécialiste de la finance. |
Le changement auquel les agences de notation refusent de se soumettre est de taille: "les investisseurs lésés par les agences de notation auront un droit d’action contre elles. Subitement, les agences de notation devront rendre compte, non seulement à la SEC qui a des pouvoirs renforcés, mais aussi a ceux que leurs avis ont lésés", précise le blog.
Il n'est précisé nulle part le nombre d'agences en "grève" mais un article du Wall Street Journal souligne que les trois plus grosses "Moody's Investor Service, Standard & Poor's, Fitch Ratings " ont déclaré que les nouveaux standards étaient trop risqués.
D'ailleurs, l'autorité américaine des marchés financiers, la SEC, a déjà réagi au blocage en accordant, ce matin, un délai de six mois aux entreprises qui veulent émettre des obligations.
"Ce délai va "donner aux émetteurs, aux agences de notations et aux autres participants une période de transition pour mettre en place les changements nécessaires pour être en règle avec les nouvelles exigences réglementaires liées aux émissions de titres de dette adossés à des actifs", ajoute le communiqué (ndlr: du SEC, reçu jeudi tard)", souligne la dépêche de l'agence suisse.
Là encore, aucun article dans la presse française. L'information est pourtant bien relayée aux Etats-Unis:
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(Par Julie Brafman)