Le New York Times modifie un article sur Sanders (médiatrice)

Robin Andraca - - Médias traditionnels - 0 commentaires

Le New York Times a failli se montrer clément avec Bernie Sanders. Failli, puisqu'après avoir publié un article plutôt positif sur les nombreux succès législatifs du candidat (et sénateur) démocrate, le Timesa fait marche arrière, ajoutant deux paragraphes très critiques et modifiant son titre. Sans en avertir ses lecteurs. Suffisant pour faire bondir Marget Sullivan, la médiatrice du journal.

L'article du Times, après modification

On peut reprocher beaucoup de choses au New York Times, mais pas à la médiatrice du journal de ne pas faire son travail. Lundi 14 mars, le site du quotidien publie un article sur les nombreux succès législatifs de Sanders au Congrès, alors qu'il s'y présentait jusqu'en 2015 comme indépendant (et donc non soutenu par le parti démocrate). "Durant ces douze années passés au Congrès, M. Sanders a fait passer plus d'amendements que n'importe quel autre membre des deux chambres. Au Sénat, il a permis de sauver les exploitations laitières et les centres communautaires de santé [en leur permettant d'emprunter], a empêché les banques d'embaucher des employés étrangers (...) Concrètement, Sanders poursuit la même politique au Congrès depuis qu'il est devenu maire de Burlington, dans les années 80, une politique qui privilégie les travailleurs, les anciens combattants et les étudiants", écrit la journaliste Jennifer Steinhauer.

Un article plutôt positif donc, qui accorde à Sanders, en même temps qu'une grande pugnacité, une certaine cohérence politique. Trop positif pour un journal qui, fin janvier, avait apporté son soutien à Hillary Clinton, estimant que la candidate était la seule capable d'offrir à "la classe moyenne la prospérité, aux femmes davantage de droits et au pays des alliances internationales solides" ? Quelques heures après sa publication en ligne, le Times a fait marche arrière en ajoutant, en plein milieu de l'article, deux paragraphes cinglants sur les promesses soit-disant non convertibles de Sanders, candidat à l'investiture démocrate en vue des élections présidentielles de novembre 2016 :

"Mais dans sa campagne présidentielle, M. Sanders tente d'adapter toutes ces propositions à l'échelle nationale, et il y a peu de choses qui laissent penser que cette stratégie législative à petits pas puisse fonctionner. Soudainement, M. Sanders ne promet plus seulement quelques étoiles ici et là, mais la lune et une bonne partie du soleil, de l'université gratuite pour tous financée par les impôts à l'immense augmentation de la participation du gouvernement dans les soins de santé, ce qui a même rendu sceptiques les démocrates les plus libéraux."

Deux paragraphes, mais pas seulement. Le Times a aussi modifié le titre de l'article, "Les nombreuses victoires législatives de Bernie Sanders par des voies détournées" devenant "Les modestes victoires législatives de Bernie Sanders, par les voies détournées du Congrès".

C'est le site du magazine Rolling Stone qui a, le premier, repéré les modifications

Une intervention de l'équipe de Clinton ? La médiatrice pose la question



Que s'est-il donc passé au sein de la rédaction du prestigieux quotidien américain ? C'est Margaret Sullivan, médiatrice du journal, qui le raconte dans un billet publié le 17 mars... sur le site du Times. "Plusieurs rédacteurs en chef ont relu l'article après publication et ont estimé qu'il devait être plus réaliste sur les chances de Sanders de mener la même politique s'il était élu président", écrit-elle. La demande aurait-elle pu provenir de l'équipe de Clinton ? La médiatrice a posé la question au directeur de la rédaction du Times. Réponse de Dean P. Baquet : "Pas à ma connaissance."

Pas très rassurant, et absolument injustifiable pour Sullivan qui écrit en conclusion de son billet : "Les changements apportés au papier étaient si importants qu'un lecteur ayant lu la première version de l'article n'en sortait pas du tout avec le même sentiment sur les accomplissements législatifs de Sanders qu'un lecteur qui le découvre aujourd'hui." "Le Times n'a aucune raison valable de fonctionner ainsi", ajoute la médiatrice. "Les mises à jour, en bas d'article, existent mais les rédacteurs en chef ont l'air de considérer cela comme quelque chose à éviter, le plus possible." Ambiance.

Lire sur arretsurimages.net.