Le Monde tente de recadrer la parole publique de ses journalistes

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Mais à qui fait-il allusion ? Dans un communiqué adressé à toute la rédaction du Monde, publié par un utilisateur de Twitter, Jérome Fenoglio, le directeur du Monde, fait état d'un "trouble croissant", au sein de la rédaction, "à propos des effets dommageables que peuvent provoquer certaines expressions publiques [des journalistes du Monde] et certains comportements sur les réseaux sociaux". Les journalistes du Monde invités ou chroniqueurs réguliers des plateaux télé et radio sont ainsi incités à "solliciter [l'] autorisation" du directeur. En cause : l'expression de leur "opinion personnelle ou de leurs préférences politiques" engagerait toute la collectivité du journal, qu'ils représentent.

Les journalistes sont aussi invités à ne pas céder aux "effets de foule (...) jeux de postures et interpellations agressives" sur Twitter. "Nous devons donc nous garder d'émettre des opinions politiques personnelles qui risquent de brouiller l'image de notre média, de nuire à sa crédibilité, d'être utilisées contre nous ou tout simplement de compliquer le travail de nos rubricards. Nous devons également nous garder de publier des messages blessants pour toute personne. Il faut aussi faire attention à ne pas alimenter le discours anti-journalistes ambiant, en nous moquant de confrères. Nous devons nous démarquer du dénigrement systématique des politiques, même si ceux-ci ne sont pas les derniers à se livrer à l'outrance en ligne." a énuméré le directeur du Monde, sans nommer explicitement les journalistes visés.

"En toute subjectivité"

Certains journalistes du Monde ont déjà été soupçonnés de prises de position politiques marquées dans l'actuelle présidentielle. Le Monde s'était fendu d'un article "Le Monde roule-t-il pour Macron ?" afin de répondre à ces accusations. Frank Nouchi assurait alors [Edit: la citation était attribuée à Luc Bronner, directeur des rédactions du Monde. Elle est en fait de Frank Nouchi, médiateur du Monde] : "Je peux dire ici que les journalistes du service Politique du Monde sont, d'abord et avant tout, des journalistes rigoureux. Vous ne les verrez que très rarement sur les plateaux de télévision se livrer au petit jeu des commentaires à chaud." Un peu plus haut, le médiateur du Monde, il tempérait : "Tout autre est le rôle des chroniqueurs, comme Françoise Fressoz, Gérard Courtois ou Arnaud Leparmentier, qui, eux sont libres de donner leur point de vue. En toute subjectivité s'ils le souhaitent."

Effectivement, Arnaud Leparmentier, directeur éditorial du Monde depuis 2015, et Françoise Fressoz, éditoraliste, prennent régulièrement la parole à l'extérieur, comme co-animateur de l'émission 28 Minutes sur Arte et chroniqueur sur France Inter pour Leparmentier, dans Questions d'Info sur LCP pour Fressoz. Leparmentier retweete fréquemment des tweets favorables à Macron, ou défavorables à ses adversaires, et émet parfois lui-même des "tweets" un peu acerbes, comme ici à l'égard de l'économiste américain Joseph Stiglitz :

En toute subjectivité.

Invité par @si à préciser quels journalistes visait sa remarque, Jérôme Fenoglio ne nous a pas répondu.

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