L'Afrique, sa savane, ses couchers de soleil et ses acacias

Alain Korkos - - 0 commentaires


Deux compilations de couvertures de livres couraient sur les réseaux sociaux depuis quelques semaines, l'une montrait une accumulation de paysages africains et l'autre une brochette de femmes voilées. Elles font depuis peu l'objet d'un article du Guardian, intitulé Book cover clichés: have you spotted recurrent designs? (Couvertures de livres : avez-vous remarqué des images récurrentes ?).


«Les couvertures de beaucoup de romans "à propos de l'Afrique" semblent avoir été conçues par quelqu'un dont la principale idée qu'il a du continent est issue du Roi Lion », écrit le Guardian qui emprunte la citation au blog Africa is a Country.

Laquelle se réduit à un coucher de soleil et un acacia, avec parfois en option une ou deux silhouettes humaines ou pachydermiques. Parce que l'Afrique noire c'est la savane, un coucher de soleil, un acacia et basta. Pourquoi faire compliqué quand une image simple, toujours la même, peut suffire à vendre des livres aussi différents que ceux de Doris Lessing, André Brink ou Nadine Gordimer ?

Africa is a Country mentionne aussi, avec un certain énervement, les couvertures de The Memory of Love d'Aminata Forna et de Someone knows my name de Lawrence Hill, qui utilisent la même photo :


Les couvertures de livres montrant des femmes voilées en gros plan sont conçues elles aussi selon une idée simple, voire simpliste. Mais il faut reconnaître, à la décharge des graphistes, que les textes qu'elles doivent illustrer le sont aussi parfois. Dans ce cas de figure, l'emballage respecte le produit !

Sommes-nous, en France, épargnés par cette fainéantise éditoriale anglo-saxonne ? Certes non. Il suffit de rechercher sur l'Amazone des bouquins dont l'action se passe en Afrique (en prenant comme point de départ La ferme africaine de Karen Blixen) ou dans les pays de tradition musulmane (en prenant comme point de départ Jamais sans ma fille de Betty Mahmoody), pour dénicher une cargaison de couvertures similaires avec coucher de soleil sur la savane, acacia et silhouettes humaines ou animales en option…


… et une cargaison de couvertures similaires itou avec voiles sombres et regards de braise :


Qu'ils aient pour décor l'Afrique noire ou pour sujet les femmes voilées musulmanes, ces livres se vendent très bien. Pourquoi les éditeurs n'ont-ils jamais pensé à faire d'une pierre deux coups ? Avec une bonne campagne d'affichage sur les bus, sûr qu'un titre tel que Moi, Kenza, esclave voilée au Kenya battrait des records de vente ! En voici la couverture conçue (ou plutôt copiée-collée) par mes soins, il ne reste plus qu'à trouver le nègre littéraire prêt à le rédiger :

 

Merci à Justine Brabant qui m'a indiqué l'article du Guardian.


L'occasion de lire ma chronique intitulée
Pourquoi L'Express a choisi le rouge en couverture.

Lire sur arretsurimages.net.