Kamel Daoud : fatwa et réponse sur Facebook
La rédaction - - Nouveaux medias - 0 commentaires"50 nuances de haine."
Le finaliste du Goncourt 2014 Kamel Daoud, auteur algérien de Meursault contre-enquête est dans le viseur des salafistes algériens. Un des chefs du groupe "Front de l'éveil salafiste libre", l'imam Abd El Fettah Hamdache, a appelé mardi "le système algérien à condamner à mort publiquement" l'écrivain, qualifié d'"apostat, mécréant, sionisé" et de "criminel [qui] insulte Dieu".
Capture TSA-Algérie du post d'Abd El Fettah Hamdache
Aux yeux du chef salafiste autoproclamé, l'écrivain mènerait une "guerre contre Allah" et "si la charia islamique était appliquée en Algérie, la sanction serait la mort pour apostasie et hérésie". En cause, les critiques souvent virulentes que Daoud adresse à la société algérienne et à une conception rigoriste de l'islam, dans des chroniques comme "En quoi les musulmans sont-ils utiles pour l'humanité?" ou "Ce pourquoi je ne suis pas 'solidaire' avec la Palestine", rapportent Les Inrocks, qui notent son côté "iconoclaste et provocateur". Mais la fatwa intervient surtout quelques jours après l'intervention de Daoud sur le plateau de Laurent Ruquier, samedi 13 décembre.
Daoud présente son livre, où il revisite l'ouvrage d'Abert Camus, L'Etranger, en se mettant dans la peau du frère de l'Arabe, tué par Meursault dans le roman. Islamiste dans sa jeunesse, Kamel Daoud entretient désormais un rapport "distant" avec la religion. Pour lui, le monde arabe doit mettre "de la distance" avec la question religieuse, "pour avancer"
"Je n'ai pas dit que j'allais le tuer"
Alors que son post et sa page Facebook sont désormais indisponibles, Abdelfatah Hamadache, décrit comme un "petit prédicateur de quartier" qui s'est fait connaître sur les réseaux sociaux, a nuancé mais confirmé ses propos. "C’est qu’il (Kamel Daoud) est impardonnable en disant « quand je lis leur livre » en s’excluant. J’assume ma responsabilité . Mais je n’ai pas dit que j’allais le tuer et je n’ai pas appelé les musulmans à le faire. On demande au pouvoir algérien d’appliquer « al Had » (la condamnation à mort) et c’est une chose dont nous sommes fiers !" a-t-il rapporté au site TSA-Algérie.
En Algérie, un des principaux partis algériens, Le Rassemblement pour la culture et la démocratie, qui se présente comme une organisation laïque, a exprimé "son entière solidarité" à Kamel Daoud, également soutenu par plusieurs pétitions en ligne. En revanche, les dirigeants algériens font pour l'instant preuve d'un "silence assourdissant", note Le Figaro.
De son côté, Daoud a lui aussi choisi de s'exprimer sur Facebook pour répondre à l'imam salafiste. Il s'étonne notamment que les vrais problèmes de l'Algérie ("rues sales, immeubles hideux, dinar à genoux, Président malade, une dizaine de migrants tués dans un bus sur la route du rapatriement, dépendance au pétrole et au prêche, niveau scolaire misérable") gênent moins que "l'avis de Kamel Daoud".